Les murs, les parements et la structure, fabriqués en usine, ont été assemblés sur place et intégrés au paysage en 1979. Des plans standardisés permettaient alors de construire des établissements scolaires en série, et de faire une place aux enfants des classes populaires sur les bancs du collège unique. C’est un bijou d’architecture industrialisée. Tout y est d’origine, même l’amiante des faux plafonds. Ripoliné maintes fois à peu de frais. On le voudrait vintage ; il est délabré.
Les W.-C. ont perdu de leur lustre depuis les « trente glorieuses ». Au rez-de-chaussée, ils sont sous clé, réservés à la direction. Au premier étage, professeurs, personnels de vie scolaire et agents d’entretien se partagent deux cabinets seulement : il faut jouer des coudes à la récréation. Difficile, sous la crasse, d’apprécier le cachet du lieu. L’endroit fait pourtant l’objet d’une attention particulière, comme en témoignent les nombreuses affiches, plastifiées et punaisées au mur :
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« Merci à tous d’éteindre la lumière en partant !
(Si vous êtes le dernier.) »
« Nous visons à garder ces toilettes propres, nous apprécierions que vous visiez juste. »
« Madame, Monsieur, afin de permettre à l’agent technique de faire son travail, je vous remercie de bien vouloir :
— ne pas laisser vos boîtes de nourriture sur le lavabo ;
— ne pas introduire de produits de nettoyage non répertoriés dans l’établissement.
Je vous remercie pour votre précieuse collaboration.
Mme l’Intendante »
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La puanteur du lieu avait poussé quelques désespérés à l’achat, sur leurs propres deniers, d’un bidon (« non répertorié ») de Canard WC.
Pourtant, les agents techniques ne ménagent pas leur peine. Ce sont plutôt des agentes, d’ailleurs. En sous-effectif, elles s’épuisent à briquer ce qui ne peut l’être. Alors (…)
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