Une enquête du site d’investigation Disclose publiée le 17 juin a révélé que le groupe Thales avait vendu à Israël des composants électroniques pour ses drones Hermes 900. Des appareils employés par l’État hébreu dans sa guerre contre le Hamas à Gaza.
Selon une enquête publiée le 17 juin par Disclose, l’entreprise française Thales «a récemment livré» à l’État hébreu «des équipements électroniques pour l’assemblage» de drones Hermes 900. Ces drones MALE (moyenne altitude, longue endurance) de reconnaissance seraient employés par Tsahal «dans les bombardements en cours à Gaza», affirme le site d’investigation.
Celui-ci déclare avoir recensé «au moins huit frappes meurtrières perpétrées par des drones israéliens contre la population ou des infrastructures civiles à Gaza» depuis le déclenchement du conflit en octobre 2023. Décompte effectué en «compilant plusieurs rapports d’ONG et des déclarations» de Tsahal, a précisé le média français.
«Malgré l’usage des Hermes 900 dans les bombardements en cours à Gaza, le groupe Thales, détenu à 26% par l’État français, a récemment livré des équipements électroniques pour l’assemblage de ces drones armés, comme le révèlent une dizaine de documents confidentiels obtenus par Disclose», est-il stipulé.
Une livraison estimée à plus de 400 000 euros
D’après ces sources, ces équipements vendus à l’État hébreu seraient des transpondeurs, d’une valeur «de 55 000 euros l’unité». Un matériel classé par le ministère français des Armées dans la catégorie des «systèmes de surveillance, de poursuite de cible et de reconnaissance», permettant notamment aux drones israéliens d’éviter toute collision ou des tirs «amis» entre aéronefs, développe le média.
«Au moins huit de ces transpondeurs devaient être expédiés en Israël entre décembre 2023 et fin mai 2024, soit plusieurs mois après les premiers bombardements aériens de Tsahal», stipule Disclose, qui ajoute : «deux d’entre eux ont été livrés au début de l’année 2024. Les six autres unités seraient bloquées par les douanes françaises».
Une expédition qui, souligne le média, était prévue fin mai 2024, mais «selon nos informations, les colis sont actuellement bloqués à l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle, faute d’autorisation des douanes».
Ce n’est pas la première fois que le média d’investigation s’intéresse aux livraisons d’armes françaises à Israël. En mars dernier, Disclose révélait que la France avait livré, en catimini, plus de 100 000 pièces de cartouches à l’armée israélienne, et ce, en pleine offensive de Tsahal à Gaza.
La France complice potentiel «de violations du droit international», estiment des ONG
Concernant la vente d’armes françaises à Israël, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, avait déclaré dans un article de Mediapart le 24 janvier que Paris exportait «des équipements militaires à Israël afin de lui permettre d’assurer sa défense, comme l’article 51 de la Charte des Nations unies lui en donne le droit», sans plus de précisions. Selon le dernier rapport sur les exportations d’armement de la France, Paris a vendu pour 208 millions d’euros de matériel militaire à Israël sur dix ans, dont 25,6 millions en 2022. Le 20 mars, la porte-parole du gouvernement Prisca Thévenot affirmait : «Nous ne livrons des armes que dans le cadre de composants défensifs pour le Dôme de fer.»
Mi-avril, huit ONG ont déposé des référés devant le tribunal administratif de Paris afin de s’opposer aux ventes d’armes françaises à Israël. Parmi elles, on retrouve Amnesty International, Action sécurité éthique républicaines (ASER), Attac, la Fédération des Tunisiens pour une citoyenneté des deux rives (FTCR), l’Association France Palestine solidarité (AFPS), l’Association des Marocains de France (AMF), le Comité pour le respect des libertés et des droits de l’homme en Tunisie (CRLDHT) et l’Union syndicale solidaires.
Ces organisations soutiennent que «les armes et les équipements militaires que la France exporte vers Israël sont utilisés pour commettre de graves crimes contre des populations civiles dans la bande de Gaza occupée». Elles estiment que «la France viole les règles internationales relatives notamment au Traité sur le commerce des armes», risquant ainsi de devenir complice «de violations du droit international – y compris de crimes de guerre – et d’un possible génocide».