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La structure du pouvoir aux États-Unis, ou pourquoi démocrates et républicains sont les deux faces de la même pièce

ByVeritatis

Août 2, 2024


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par Opposition Controlée

Nulle part comme aux États-Unis, le terme «société du spectacle» ne trouve une illustration aussi éclatante. La campagne électorale présidentielle ne fait pas exception à la règle.

C’est même un élément fondamental, d’ordre psychologique, dans le sens où le spectacle permet de donner une forme visible à l’idée démocratique, pousse les électeurs à s’engager à divers degrés dans un camp contre un autre. L’offre politique est la conséquence de l’exploitation maximale de cette mise en scène spectaculaire, en la réduisant à deux partis, à un système d’opposition binaire. Mais ce spectacle n’est destiné qu’à la plèbe, au grand public non-averti, aux profanes, qui ne voient que la surface des choses, et prennent au sérieux la mise en scène permanente de l’affrontement républicain-démocrate. Il y a une compétition réelle entre les partis, mais celle-ci est essentiellement une question de carrières individuelles. Les enjeux de cette compétition ne sont pas politiques, ou ne concernent que des aspects politiques mineurs, non stratégiques. Les politiques importantes, les plans stratégiques majeurs, sont le fruit d’un processus rationnel d’élaboration et de délibération, dans lequel les bouffonneries de la politique spectacle n’ont pas de place.

On entend souvent cette complainte remonter des couches supérieures de la plèbe : «Nous ne sommes pas dans une vraie démocratie». C’est une erreur d’analyse. Voyez l’archétype du système démocratique : Athènes, qui est le modèle de référence, célébré jusque dans l’architecture des bâtiments publics. La cité d’Athènes, c’est une poignée d’hommes armés, dotés des droits civiques, qui exploitent une multitude d’esclaves et de métèques. Ne dites plus «nous ne sommes pas en démocratie», dites : «nous ne sommes pas des citoyens». Il y a une incompréhension fondamentale sur la nature de nos régimes dits «démocratiques». Une incompréhension volontairement entretenue d’ailleurs, puisqu’elle est un pilier de l’ordre social. La démocratie ne consiste pas à prendre l’avis de la populace, qui est de toutes façons inculte et incompétente dans tout ce qui touche à l’exercice du pouvoir et aux politiques étatiques. La démocratie ne sert qu’à une chose : donner une légitimité incontestable au pouvoir.

Ceci n’est pas une opinion de ma part, c’est un fait historique, particulièrement visible en France d’ailleurs, qui n’a adopté la «démocratie» (comprendre le suffrage universel) que tardivement, avec l’avènement de la IIIe République, entérinée en 1875. C’est une assemblée presque intégralement composée de monarchistes, tous de grands possédants, qui a finalement opté pour le système républicain, dont le promoteur le plus influent fut Adolphe Thiers, célèbre pour sa haine du petit peuple, et couvert du sang des communards. Thiers et ses amis vont réussir à convaincre l’assemblée que la République est le meilleur système pour la conservation de leur fortune et de leur mainmise sur la société, précisément parce que cette domination s’exercera au nom de tous, qu’elle sera invisible aux yeux du profane, ou plutôt qu’elle restera anonyme. À l’inverse, dans un système monarchique quelconque, le peuple identifie le pouvoir au nom du souverain, il sait contre qui tourner sa colère, le souvenir des répressions est définitivement attaché à la dynastie régnante, et, explique Thiers, pour ces raisons, le souverain pourrait être tenté de prendre le parti du peuple contre ceux qui l’exploitent, c’est-à-dire ceux à qui il s’adressait. C’est après 4 ans de débats, à partir de 1871, que son point de vue sera majoritaire, et que nous entrerons dans le régime qui est le nôtre.

Mais revenons aux États-Unis, qui sont les inventeurs du système républicain contemporain. Pour comprendre le fonctionnement du pouvoir dans ce pays, il faut commencer par se débarrasser de toute la gangue du spectacle «démocratique», ce qui sera difficile pour de nombreux lecteurs. Difficile, parce que je m’oppose ici frontalement à la logorrhée d’une foule de journalistes et d’influenceurs, qui sont en concurrence sur le marché du «temps de cerveau disponible». Aller toujours plus loin dans le «putaclic», dans la caricature, dans l’outrance, en réalité simplement dans la connerie, est une condition pour remplir les caisses. Malheureusement, tout un public se couvre de cette fange, et passé un certain degré d’implication personnelle, est incapable de faire machine arrière. C’est le phénomène de la dissonance cognitive, qui est la marque des esclaves de l’Empire du mensonge. Comprenez que la censure contemporaine ne s’exerce plus comme jadis. Il s’agit aujourd’hui d’un brouillage de l’information par saturation de bruit.

Première étape, rayez de votre vocabulaire l’expression «État profond». Ceci n’est pas un concept valide, c’est un slogan politique popularisé par Trump, typique de l’idéologie du parti républicain. C’est caractéristique de la novlangue, c’est une expression qui empêche de penser la réalité, qui la dissimule. Quand on a un peu de culture politique des E-U, on sait que la défiance envers l’État est un discours récurrent et caractéristique des républicains, envers l’État fédéral plus particulièrement. Il y a diverses raisons historiques (principalement la guerre civile) et idéologiques à cela (ils ne veulent pas payer d’impôts), que je ne vais pas expliciter ici. C’est l’origine de l’expression «État profond» comme cause prétendue des malheurs du peuple, tandis qu’en réalité, c’est un substitut pour «classe dominante», mots qu’un milliardaire républicain comme Trump ne peut évidemment pas prononcer. Et même chez les démocrates, il faut aller à l’extrême gauche du parti, pour trouver un Bernie Sanders capable de prononcer les mots «classe sociale». Il y a tout de même un personnage, qui, lui, c’est son style, ne s’embarrasse jamais de pléonasme, le milliardaire Warren Buffett, célèbre pour cette phrase, prononcée lors d’un interview pour le New York Times : «Il y a une guerre de classes, d’accord, mais c’est ma classe, la classe des riches, qui mène cette guerre et nous sommes en train de la gagner».

L’autre caractère nocif de l’expression «État profond» est de suggérer que les principaux mécanismes à l’œuvre dans la société sont occultes, cachés. En réalité, la structure du pouvoir et ses mécanismes sont parfaitement connus, et la plupart des délibérations, dans l’élaboration des politiques importantes, sont publiques. La partie cachée, qui certes existe, n’a pas de caractère structurel et déterminant, on peut parfaitement anticiper l’évolution de la société avec l’information ouverte. À vouloir ne chercher que des choses cachées, on ne voit plus ce qui est visible. C’est aussi une stratégie du pouvoir, faire flotter une aura de mystère, de paranormal autour de la classe dominante. Les innombrables imbéciles qui se prêtent à ce jeu sont des idiots utiles, pour la simple et bonne raison qu’en se fabriquant un ennemi surnaturel, on se désarme : on ne lutte pas contre Soros et Cie avec de l’eau bénite, des prières et des gousses d’ail. Je l’avais déjà écrit dans un article précédent. Il faut prendre conscience que le «complotisme», dans ses excès, est totalement manipulé par le pouvoir, et participe au brouillage de l’information, et plus généralement au spectacle que j’évoquais en introduction.

Je l’écrivais plus haut, structure et mécanismes du pouvoir ont fait l’objet de nombreuses études, de publications sérieuses par des universitaires dont c’est le métier. Ce qui distingue ces travaux de la bouillasse des influenceurs, c’est bien sûr la rigueur de la démarche. Quand bien même il s’agit en partie de sciences humaines, «molles», les méthodes scientifiques existent et sont performatives. Et la preuve ultime de leur qualité, c’est qu’armé de cette connaissance, on retourne dans la rationalité, on comprend la logique à l’œuvre dans les actions du pouvoir. Aussi, je précise que dans la description qui va suivre, je n’invente rien, c’est une synthèse des travaux des spécialistes de la question, citons, pour le cadre conceptuel général, C. Wright Mills : «The Power Elite» (1956), Robert A. Dahl «Who Governs ?» (1961), G. William Domhoff «Who Rules America ?» (première édition en 1967, mise à jour chaque décennie jusqu’en 2017).

Voici schématiquement ce qu’il ressort de ces travaux (les liens en bleu «%» indiquent un rapport de propriété, le «$ $ $» un flux de financement).

Nous voyons tout en haut la «classe dominante», elle a plusieurs caractéristiques. C’est un ensemble d’individus organisés socialement, dotés d’une conscience de classe. Ils sont les plus riches matériellement, reçoivent la meilleure instruction, ont accès aux meilleurs soins. Aujourd’hui aux E-U, le fameux «1%» de la population, qui ne sont que le haut de la classe dominante, c’est important de le préciser, possèdent plus de 25% de la richesse du pays. En particulier, ils détiennent presque 50% de l’ensemble des actions, et reçoivent donc la même part des dividendes versés. C’est un changement par rapport au gros capitaliste du XIXe siècle, qui était généralement aussi un patron, la propriété des entreprises se fait via des fonds d’investissement, ce qui permet de couvrir les risques du marché des actions par la diversification. Plutôt que d’être détenteurs uniques d’un Trust, ils détiennent une part limitée d’un grand nombre d’entreprises. La plupart des membres de la classe dominante sont impliqués dans la direction des grandes entreprises, ils sont souvent membres des conseils d’administration de plusieurs.

Mais notons que la classe dominante est sociologiquement plus large que ces «1%». La frontière est toujours difficile à tracer, mais on peut observer que 20% de la population aux E-U détient plus de 75% de la richesse totale, mobilière et immobilière. Cette situation est unique au monde, vous pouvez voir sur le diagramme suivant le PIB par habitant sur l’axe vertical, l’indice «GINI», qui est une mesure des inégalités sociales, sur l’axe horizontal. Les E-U se trouvent, seuls, sur la diagonale, c’est-à-dire qu’il s’agit à la fois d’un pays très riche, et à la fois exceptionnellement inégalitaire dans la distribution de cette richesse. À l’inverse, la Norvège est à la fois riche et égalitaire, l’Afrique du Sud est encore plus inégalitaire que les E-U, mais beaucoup moins riche…

Il existe une véritable solidarité de classe entre membres de l’élite. Quand la compétition existe, elle reste toujours «sportive», dans le sens où il n’y a pas de lutte à mort dans ces milieux, ou très exceptionnellement. Ils cultivent cette solidarité en se socialisant dès le plus jeune âge avec les membres de leur classe. Il existe de nombreuses institutions de socialisation de la classe dominante, qui peuvent être des clubs de golf, de vacances, des lieux de villégiature, des «bals de débutantes», et toutes sortes d’événements sociaux qui leur permettent de se connaitre, de discuter. Ils assurent la pérennité de leur classe avec quelques mécanismes fondamentaux. Ils se marient entre eux, pratiquent l’exclusion des non-membres, mais également ramènent régulièrement du sang neuf. C’est un trait qu’il faut noter : contrairement à d’autres groupes ethno-culturels fermés, il y a une recherche permanente de nouveaux membres, d’individus brillants, compétents, et surtout aptes à adopter les réflexes d’exclusion, c’est-à-dire à renier leurs origines de classe.

C’est aussi au nom de cette solidarité que la classe dominante organise des groupes de discussion lorsqu’il s’agit de définir les politiques du pays. Car, nous en détaillerons le mécanisme, ce sont eux et eux seuls qui définissent les politiques importantes, et recherchent systématiquement le débat et le consensus parmi leurs membres. Ces groupes, vous en connaissez certains, le Forum de Davos par exemple, répondent à cette définition. Celui-ci est international, il rassemble les classes dominantes du monde entier, entre lesquelles il existe également un certain degré de solidarité, mais moindre qu’au niveau national. La trilatérale rassemble les membres de l’élite des E-U, de l’Europe et du Japon, le groupe Bilderberg ceux des E-U et de l’Europe, Le Council on Foreign Relations est uniquement américain, et instrumental dans la définition de la politique étrangère des États-Unis. Nommons aussi le «American Enterprise Institute», «The Aspen Institute», «Brookings Institution» etc, etc.

Tous ces groupes de discussion reposent sur l’expertise des meilleurs universitaires, qui sont des experts sur un sujet particulier, et qui sont conviés à synthétiser leurs travaux dans des think tanks. On cherche généralement, via ces Think tanks, à avoir plusieurs sons de cloche, à développer des opinions différentes. Je distingue le think tank du groupe de discussion, même si parfois l’appellation est utilisée de manière interchangeable. Le think tank est systématique spécialisé, par exemple dans le domaine militaire, on trouve le «Center for Strategic and International Studies», la fameuse «RAND Corporation, ou lorsqu’il s’agit de politique internationale, il sera centré sur un pays en particulier. Tandis que les groupes de discussion ont une vocation plus large, et sont des lieux où l’on tranche les questions, on délibère et on choisit une orientation parmi les travaux concurrents des think tanks. Ce sont des lieux où politiciens et membres de la classe dominante se rencontrent et se mettent d’accord.

Il y a une autre caractéristique de ces groupes de discussion. C’est certainement la phrase la plus importante de cet article, et je cite ici textuellement le professeur Domhoff : «Les organisations politiques de la classe dominante ne sont pas appelées «politiques». Tous les groupes dits non-partisans, bi-partisans ou apolitiques, ce sont les organisations politiques de la classe dominante». Il faut bien comprendre ce que signifie cette phrase. Les affrontements cataclysmiques entre républicains et démocrates sont, comme je l’ai déjà écrit, un spectacle à destination des gueux. Les questions politiques importantes sont toujours, je répète, toujours traitées dans des groupes de discussion dits non-partisans, c’est-à-dire qui regroupent des membres des deux partis, qui se mettent systématiquement d’accord entre eux. Ce qui reste de politique partisane sont des questions soit sans conséquence, soit «symboliques» car hors du champ d’action de l’État, et souvent des questions non-politiques. Ou dit autrement, la classe dominante définit les politiques qui lui seront profitables et nécessaires à sa perpétuation, obtient un consensus sur ces questions, et les sort du champ du débat. Ainsi, tout ce qui pourra se passer dans l’arène politique ne les atteindra jamais. La «politique» au sens vulgaire ne commence que là où les intérêts de la classe dominante s’arrêtent.

Cette domination s’exerce par l’argent, mais elle n’est efficace que grâce à la solidarité de classe. En effet, la vie politique, intellectuelle et culturelle est irriguée par l’argent de la classe dominante. Les universités sont financées en grande partie par ce qu’on peut appeler «big corp», les grandes entreprises, soit directement, soit par l’intermédiaire de fondations. Ces financements sont déterminants dans l’orientation des développements technologiques. Typiquement, une monstruosité comme le transhumanisme a été planifiée dès les années 1960, dans une optique mêlant les intérêts de la classe dominante, puisque c’est avant tout un instrument de contrôle des populations, et les intérêts de la grande industrie, ici électronique. Mais ces financements sont aussi déterminants dans l’orientation idéologique des experts, qui peupleront les cabinets de conseils, et notamment orienteront les réglementations, chose très importante pour «big corp». La formation universitaire donne autorité et légitimité dans tous les domaines, il est important qu’elle reste idéologiquement compatible avec les intérêts de la classe dominante.

Aux E-U, le financement des organisations politiques est très réglementé. Les financements des particuliers sont plafonnés et les listes des donateurs, nominatives, sont publiques. À l’heure où j’écris, fin juillet 2024, le montant total des dons des particuliers s’élève à plus d’un milliard de dollars. Cependant, il est beaucoup plus difficile de tracer les financements venant des entreprises, qui sont toujours indirects, doivent passer par des fondations aux statuts juridiques spécifiques, des «PAC», «501’s» ou «527’s». Cette réglementation, censée être une mesure pour la transparence de la vie politique, a plutôt tendance à produire l’inverse. Une épaisse couche de complexité bureaucratique, nappée d’un jargon impénétrable découragera le profane trop curieux. Quoi qu’il en soit, ici encore, le financement de la vie politique est sous contrôle de la classe dominante. À quelques exceptions près, les grands intérêts économiques arrosent les deux partis équitablement, ce qui est très logique compte-tenu de ce que j’écrivais précédemment. Il y a deux avantages à financer grassement la vie politique. D’abord, bien sûr, il s’agit d’acheter la loyauté des politiciens. On ne mord pas la main qui vous nourrit. Ensuite, cet argent finance le spectacle démocratique. Dans un pays qui se vante d’être celui de la liberté, il est normal que ce soit un spectacle a gros budget. Surtout que l’affaire est très rentable, si vous vous référez au diagramme plus haut, sur le niveau des inégalités qui règne là-bas.

Sur le plan socio-culturel, les fondations ont un rôle déterminant. Ce sont par l’intermédiaire de leurs financements que la société est modelée, via des associations, des projets sociaux, des initiatives culturelles qui bénéficient de leur soutien. On pensera par exemple à la très célèbre «open society» de M. Soros, qui arose une constellation d’ONG au niveau mondial, la non moins célèbre «Bill et Melinda Gates fondation», etc. Celles-ci sont les plus connues, mais on trouve plusieurs centaines de fondations influentes aux E-U. Et on retrouve ici le même schéma que pour le financement des partis politiques. La classe dominante finance autant le pseudo-progressisme LGBT que le conservatisme le plus obscurantiste. Il est très important de conserver une diversité au niveau de l’offre socioculturelle, afin de maintenir une tension dans la société. Il y a plusieurs bénéfices tirés de ces financements, économiques et politiques. Le principal étant de déplacer les débats dans la société hors des sujets qui fâchent, j’entends qui fâchent la classe dominante.

Dernier aspect de la mainmise de la classe dominante sur la société, les médias. Pour faire une boutade, je dirais que leur rôle principal est de dissimuler tout le contenu du présent article. Voir mieux, le rendre incompréhensible ou insupportable au lecteur. Les médias sont les metteurs en scène du spectacle démocratique. Ici aussi, pas de bon spectacle sans rivalité. Les journalistes, par leurs choix éditoriaux, leurs angles de traitement et la sélection des sujets, jouent un rôle crucial dans l’orientation des débats publics. Ils créent une narration autour de figures politiques ou de célébrités, créent des intrigues captivantes. Les rivalités politiques, les controverses et les scandales sont ainsi mis en scène, pour accaparer l’attention du public. Nous sommes dans le règne de l’Infotainment, un mélange d’information, de divertissement et de fiction. La classe dominante s’en sert aussi pour maintenir la pression sur les politiciens, qui sont très souvent critiqués de la manière la plus virulente. Cela permet de toujours les mettre sur la défensive, et de les pousser à régulièrement prouver la sincérité de leur allégeance. Il y a divers degrés de qualité de la presse. Il est remarquable, d’ailleurs, qu’en comparaison avec la presse française, les E-U conservent des publications de très bon niveau. Mais force est de constater que l’audience est inversement proportionnelle à la qualité.

Pour conclure, je ferai remarquer ceci : le gouffre qui sépare les 20% des classes supérieures du reste de la population s’élargit à grande vitesse. Non seulement sur le plan matériel, mais aussi culturel et intellectuel. Aujourd’hui, rien ne laisse présager un changement dans cette dynamique, qui a été théorisée dans les années 1960 dans les universités américaines, et qui a servi de feuille de route aux transformations de la société. En 1972, le groupe de discussion «Club de Rome» annonçait la grande bascule pour l’année 2020, dépopulation, pénuries, guerres, épidémies. En 1967, le XXIe siècle était dessiné par des groupes d’experts : Transhumanisme, manipulation génétique de l’humain, contrôle total de l’opinion publique, fin de la démocratie, rendue obsolète par le contrôle social. Tout ceci n’avait rien d’une fatalité, c’est de la prophétie auto-réalisatrice. Cette orientation particulière correspond à l’idéologie et à la psychologie de la classe dominante. Et si celle-ci domine, c’est d’abord parce qu’elle a une conscience de classe, et pratique la solidarité de classe. Elle écoute, elle débat, elle réfléchit. Elle est attentive aux idées nouvelles, aux technologies, à tout ce qui peut être mis au service de ses intérêts. Parallèlement, elle trompe, elle corrompt, elle incite les classes inférieures à la division, aux comportements les plus bas, à l’oisiveté et à la malhonnêteté intellectuelle.

Dans la prochaine partie, nous analyserons la structure de l’économie américaine et les mutations de la scène internationale.

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