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Les médias contre Julian Assange, par Laurent Dauré (Le Monde diplomatique, août 2024)

ByVeritatis

Août 5, 2024


Une nouvelle faillite du quatrième pouvoir

La libération du journaliste australien, fin juin, clôt un calvaire de quatorze ans. Elle n’allège pas en revanche la responsabilité de ses persécuteurs. Dans ce domaine, Washington, Londres et Stockholm ont agi avec la complicité d’une institution censée dire la vérité au pouvoir et protéger les innocents : la presse, pour une fois assez peu confraternelle…

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Gabriel Dawe. — « Pain n°12 » (Douleur n°12), de la série « La Douleur », 2009

Depuis le 25 juin 2024, grâce à un accord de plaider-coupable conclu avec le ministère de la justice américain, Julian Assange est libre. Mais la presse mondiale n’a pas tiré ce feu d’artifice euphorique qui aurait accueilli le retour à la vie commune de n’importe quel journaliste enfermé pendant quatorze ans pour avoir révélé des crimes de guerre. L’ambiance éditoriale était teintée d’une étrange retenue. « Ses actions ont divisé l’opinion », constatait The Guardian (26 juin), principal quotidien de « gauche » au Royaume-Uni, qui avait publié plusieurs dizaines d’articles hostiles au fondateur de WikiLeaks. Invariablement, les portraits consacrés à l’heureux dénouement accordent une large place aux détracteurs : « un divulgateur imprudent qui a mis des vies en danger » (The New York Times, 27 juin), « quelqu’un qui recherche la publicité » (BBC, 25 juin), « soupçonné de servir les intérêts de Moscou » (FranceInfo, 25 juin), bref, un « personnage trouble » (Le Monde, 27 juin). Pour le quotidien vespéral, cette mauvaise réputation s’expliquait aisément : « Julian Assange n’a cessé d’alimenter la controverse. » Une controverse que les journalistes avaient eux-mêmes largement nourrie avant de la décrire comme un fait…

« Il n’y a qu’une seule façon de s’y prendre : abattre illégalement ce fils de pute. » Depuis l’appel au meurtre du « traître » lancé sur Fox News en 2010 par le commentateur démocrate Robert Beckel jusqu’aux éditoriaux de « soutien » en forme de pendaison, en passant par les fausses informations du Guardian concernant une prétendue collusion de Julian Assange avec M. Donald Trump et Moscou en 2018, le journaliste emprisonné a pu apprécier le nuancier de la malveillance médiatique. Le sujet central n’était plus le message — le contenu des révélations de WikiLeaks et la réalité crue du pouvoir américain qu’elles dévoilaient — mais la personnalité et l’éthique du messager, voire son hygiène (Daily Mail, 13 avril 2019).

On (…)

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