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« Nous ne sommes pas traités comme des citoyens », par Ariane Bonzon (Le Monde diplomatique, septembre 2024)

ByVeritatis

Sep 12, 2024


Dossier : Proche-Orient, l’abîme

En dépit de sa violence aveugle, la guerre menée par Tel-Aviv contre l’enclave de Gaza n’a pas suscité de grandes manifestations de solidarité de la part de la population arabe vivant en Israël. Confrontée à une situation de discrimination multiforme, celle-ci demeure une catégorie de citoyens de seconde zone et tend à s’isoler de l’État comme de la vie politique.

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Nasser Almulhim. — « Land and Sea » (Terre et mer), 2023

© Nasser Almulhim – Tabari Artspace, Dubaï

Des badauds flânent sur la promenade du front de mer. Les petites filles sont tirées à quatre épingles, la plupart des femmes portent un hidjab, parfois du dernier cri : vert mordoré ou imitation peau de lézard. De puissants canots pneumatiques à moteur surchargés de familles entières dessinent des arabesques autour des ferrys d’où s’échappe la musique tonitruante des stars égyptiennes Amr Diab ou Akram Hosny. Poupées, reproductions d’AK-47 et grand sabre made in China : les marchands de jouets pour enfants font recette. Ça pourrait être dans n’importe quel pays arabe, et pourtant, nous sommes à Saint-Jean-d’Acre dans le nord d’Israël, un jour d’Aïd el-Fitr qui marque la fin du ramadan. Les Gazaouis vivent sous les bombes à deux cents kilomètres de là. Ici on court, on joue, on rit, on s’interpelle.

Plus d’un citoyen israélien sur six, soit près de 1,7 million sur un total de 9,66 millions, est arabe. Les attaques du 7 octobre ont exacerbé les contrastes et les paradoxes de la situation que vivent les membres de cette communauté, qui se définissent souvent comme « Israéliens de citoyenneté mais Palestiniens d’identité ». Certains d’entre eux, bédouins pour la plupart, ont été tués ou pris en otage durant les raids du Hamas. D’autres ont joué un rôle décisif dans les secours. Pourtant leur malaise est grand face à la guerre contre Gaza — où beaucoup ont de la famille —, que leurs impôts financent.

On aurait pu penser que les Arabes israéliens — dénomination officielle à laquelle nombre d’entre eux préfèrent l’expression « Palestiniens d’Israël » — se mobiliseraient pour leurs frères vivant dans l’enclave, comme ce fut le cas lors de la seconde Intifada en 2000 ou lors du soulèvement de mai 2021. Mais, en fait, pas vraiment. « Bien sûr qu’on a voulu manifester mais on en a été empêchés, soutient Mme Aida Touma-Suleiman, députée de Saint-Jean-d’Acre et membre du Front démocratique pour la paix et l’égalité (Hadash, communiste). Nous nous étions rassemblés à vingt-cinq dirigeants pour (…)

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Ariane Bonzon

Journaliste, auteure de Turquie. L’heure de vérité (Empreinte temps présent, Tharaux, 2019).



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