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pourquoi les conserves peuvent être mortelles


11 septembre 2024 à 14h53

Durée de lecture : 5 minutes

Cinq personnes sont hospitalisées dans un état grave au CHU de Tours depuis le weekend dernier. Elles seraient atteintes de botulisme. L’Agence régionale de santé (ARS) du Centre-Val-de-Loire pense avoir identifié la source de cette contamination : du pesto à l’ail des ours, préparé par la marque Ô Ptits Oignons, et que toutes les victimes ont dégusté au cours d’un même repas.

Les restes de ce repas ont été envoyés au Centre national de référence (CNR) des bactéries anaérobies et du botulisme à l’Institut Pasteur pour être analysés, explique la Direction générale de la santé dans un communiqué. Les résultats sont attendus pour le 12 septembre. Le CNR n’a pas pu répondre à nos questions, « l’équipe de recherche étant concentrée sur les analyses ».

600 pots de pestos vendus

La DGS alerte les professionnels de santé : « Le botulisme se déclare après une incubation de quelques heures à quelques jours, en fonction du mode de contamination. Aussi, la survenue d’autres cas dans les prochains jours n’est pas exclue. » Le fabricant de pestos, un artisan qui vend notamment sur les marchés, a en effet commercialisé plusieurs lots de ces conserves dans le cadre de divers évènements en Indre-et-Loire, entre mars et septembre 2024. L’ARS a décidé par mesure de précaution d’organiser le rappel immédiat de tous les bocaux de pestos concernés après investigation chez le producteur. Celle-ci a « montré l’absence de maîtrise du processus de stérilisation de ces conserves ». 600 pots de pestos potentiellement contaminés ont été vendus. Toute personne qui en détiendrait ne doit pas les consommer.

Le botulisme est une toxi-infection alimentaire grave qui touche le système nerveux et peut mener jusqu’à la paralysie des muscles respiratoires conduisant à la mort. Les cinq victimes présentent une atteinte « des paires crâniennes [nerfs crâniens] pouvant évoluer vers une paralysie descendante », précisent les autorités de santé. Elles sont actuellement en réanimation ou ont été placées en soins intensifs.

La bactérie Clostridium botulinum est présente sous forme de spores dans une large variété d’aliments peu acides.
© E.B / Reporterre

Une personne décédée en 2023

Déjà en 2023, une contamination au botulisme avait défrayé la chronique. Une quinzaine de personnes avaient été touchées — l’une d’elle était décédée — après avoir consommé, dans un restaurant de Bordeaux, des rillettes de sardines mises en conserve sur place. Au début, les symptômes peuvent parfois ressembler à ceux d’une intoxication plus classique (nausées, vomissement, diarrhées). « La grande majorité des malades pris en charge sans délai guérissent sans séquelle, mais la durée du traitement et de la convalescence peut durer plusieurs mois », prévient la DGS.

Marinades de poisson, conserves de haricots verts, de carottes, tapenades, terrines de viande, jambon cru, champignons baignés dans l’huile… La bactérie Clostridium botulinum est présente sous forme de spores dans une large variété d’aliments peu acides, précise l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) sur son site. C’est lorsqu’elle se retrouve en absence (ou avec une faible teneur) d’oxygène qu’elle se développe et produit une toxine, très puissante, potentiellement mortelle, même à faible dose. On peut ainsi la retrouver dans des conserves mal stérilisées, mais aussi dans des produits conservés par salaison sèche (et non par lactofermentation). De même, il ne faut pas conserver des aliments crus (fines herbes, légumes) dans de l’huile sans stérilisation, même au réfrigérateur, sauf à les consommer rapidement.

« Il faut passer les conserves à l’autoclave »

Lorsque l’aliment est acide (sauces tomates, fruits, cornichons…), le risque est moins élevé, l’acidité aidant à tuer les spores. En revanche, gare aux aliments non acidifiés, comme des légumes, poissons, viandes, ragoûts, sauces à la viande : « Il faut les passer à l’autoclave [1] pour atteindre des températures supérieures à 100 °C pour tuer les spores de la bactérie Clostridium botulinum », explique Anne-Marie Desbiens (alias la Foodie scientifique) dans une interview donnée à Radio Canada. La scientifique a compilé ses conseils dans l’ouvrage Comment faire ses conserves sans empoisonner sa famille (éd. La presse, 2023).

Quelques recommandations à suivre

Selon l’institut Pasteur, les cas de botulisme restent rares en France : « L’incidence moyenne s’est stabilisée à une dizaine de foyers par an, impliquant le plus souvent chacun un à trois malades. » Pour éviter tout risque, on peut suivre les recommandations émises par l’Anses lors de la préparation et de la consommation de conserves :

  • Nettoyer les végétaux, respecter l’hygiène lors de l’abattage des animaux à la ferme et de la préparation des viandes, veiller à la propreté des récipients et des emballages utilisés ;
  • respecter les consignes de stérilisation données par les fabricants de stérilisateurs : températures/temps, nombre d’unités de conserves par stérilisateur. Attention, une cuisson par ébullition est insuffisante pour stériliser les denrées alimentaires car les spores de Clostridium botulinum résistent même à l’eau bouillante.
  • ne pas consommer les boîtes de conserve déformées/bombées ou celles dégageant une odeur suspecte à l’ouverture. Lors de l’ouverture des bocaux de verre, le bruit provoqué par l’entrée d’air doit être entendu. Dans le cas contraire, il faut jeter le produit. (Nous précisons que la toxine peut très bien être invisible et que les conserves contaminées peuvent avoir l’air « normales ».)
  • pour les jambons de préparation familiale, il est impératif de respecter les concentrations en sel de la saumure et le temps de saumurage.
  • ne pas donner de miel aux enfants de moins d’un an, des spores botuliques pouvant s’y trouver.

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