• jeu. Sep 19th, 2024

sous la menace, la dernière habitante sur le tracé capitule


Verfeil (Haute-Garonne), reportage

«  J’ai signé, ce n’est plus chez moi. On va essayer de se reconstruire maintenant. » Vers 13 heures lundi 16 septembre, Alexandra, la dernière habitante sur le tracé de l’autoroute A69, sort en larmes d’une petite pièce au rez-de-chaussée de son ancienne maison à Verfeil, en Haute-Garonne.

La quadragénaire, qui vivait ici depuis plus de dix ans, a accepté il y a quelques jours une offre de relogement du concessionnaire NGE-Atosca pour quitter sa maison, qui se situe sur le tracé de la future autoroute devant relier Castres à Toulouse. Cette situation devenait une épine dans le pied d’Atosca, qui souhaitait au plus vite poursuivre les travaux.

Alexandra a subi des menaces et des tentatives d’assassinat pour l’obliger à quitter sa maison.
© Antoine Berlioz / Hans Lucas / Reporterre

« C’est dégueulasse ce chantage ! »

Vers 9 heures, plusieurs représentants du concessionnaire et un huissier de justice sont ainsi arrivés sur les lieux pour signer avec Alexandra un accord concluant son relogement en HLM avec son compagnon et son fils, et le versement d’un dédommagement de 20 000 euros.

Une cinquantaine de gendarmes étaient également présents pour «  assister Atosca lors de cette remise des clés  », selon le colonel Stéphane Dallongeville, chef des opérations sur place.

À leur arrivée, une dizaine d’opposants à l’A69 étaient déjà sur le toit de la maison pour empêcher sa destruction, et une vingtaine d’«  écureuils  » — ces militants perchés dans les arbres — étaient postés dans leurs cabanes construites dans les branches pour éviter leur abattage. Au sol, une cinquantaine de soutiens étaient également dispersés dans le jardin d’Alexandra.

Une cinquantaine de gendarmes et plusieurs représentants du concessionnaire étaient présents.
© Antoine Berlioz / Hans Lucas / Reporterre

Durant toute la matinée, les représentants du concessionnaire ont négocié avec l’ancienne locatrice pour qu’elle demande aux militants sur le toit de descendre, sans succès. «  Ils me disent que je ne pourrais pas signer l’accord si vous ne descendez pas !  » lance-t-elle en larmes aux opposants sur son toit. « C’est dégueulasse ce chantage que vous lui faites ! insiste une militante aux salariés du concessionnaire. C’est nous qui décidons d’occuper cette maison, elle n’a rien à voir là-dedans.  »

Après l’intervention d’un lieutenant-colonel, celle qui accueillait sur son terrain des opposants à l’A69 depuis mars 2023 a enfin pu signer l’accord et partir de la propriété vers 13 heures. «  Il y a eu deux tentatives de meurtre ces dernières semaines chez moi. J’ai un enfant de 4 ans, il n’a pas à mourir pour cette putain d’autoroute, voilà pourquoi j’ai accepté cet accord  », résume-t-elle devant plusieurs caméras et appareils photo, en pleurs.

En pleurs, Alexandra a répondu aux questions des nombreux journalistes présents.
© Antoine Berlioz / Hans Lucas / Reporterre

« On résistera jusqu’au bout »

Peu de temps après, une pelleteuse et plusieurs bûcherons ont pénétré au «  Verger  », le nom donné à cette zone par les opposants, pour couper les frênes, noyers, chênes, tilleuls et autres essences non occupées par des opposants dans le jardin de 8 000 m². «  Vous devriez avoir honte !  » crie une militante sur place, encadrée par un cordon de gendarmerie. Le bruit des troncs qui craquent et s’écroulent sur le sol tire des larmes à plusieurs opposants à l’A69, qui assistent, impuissants, à cette scène.

Gendarmes, pelleteuses, militants, journalistes… Le jardin d’Alexandra était plein.
© Antoine Berlioz / Hans Lucas / Reporterre

Dans leurs cabanes perchées, les écureuils empêchent toujours la pelleteuse et les bûcherons d’abattre certains arbres. «  On a beaucoup de provisions et on est déterminés à tenir le temps qu’il faudra pour sauver ces arbres, explique un militant dans sa cabane, le visage masqué. On a peur aussi de ce qui va se passer, s’ils vont nous assiéger comme à la Crem’Arbre ou nous faire chuter comme cela s’est passé récemment à la Cal’Arbre. » Plusieurs militants étaient tombés de leur arbre pendant l’expulsion de la zad.

« On est déterminés à tenir le temps qu’il faudra pour sauver ces arbres », certifient des militants.
© Antoine Berlioz / Hans Lucas / Reporterre

Sur le toit de la maison, la dizaine de militants présents comptent également résister dans la durée. En hauteur, ces opposants devront probablement être également délogés par la Cnamo, la cellule de la gendarmerie spécialisée dans les opérations périlleuses, et cela risque de prendre du temps.

« Même s’ils avancent avec leurs pelleteuses, on ne bougera pas. Cette autoroute est trop injuste socialement, avec ce qu’ils font subir à Alexandra notamment, et écologiquement avec tous ces écosystèmes détruits, pour qu’on abandonne maintenant. On résistera jusqu’au bout », crie à Reporterre un autre écureuil depuis son arbre.




Source link

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *