• sam. Sep 28th, 2024

Dans les derniers arbres, le siège final des opposants à l’A69


Verfeil (Haute-Garonne)

Jeudi 26 septembre, la Cellule nationale d’appui à la mobilité (Cnamo) était de retour à Verfeil en Haute-Garonne. Après une semaine de siège policier ne permettant que de rares ravitaillements en eau et nourriture aux opposants à l’A69, perchés dans les arbres et sur le toit de la maison — jusqu’il y a peu occupée par la dernière famille qui résistait au chantier — les gendarmes-grimpeurs ont tenté une nouvelle intervention à la zad du Verger.

Harnachés dans leurs baudriers oùu pendent leurs mousquetons, les sous-officiers de cette cellule « quasi unique en Europe », selon le site du ministère de l’Intérieur, ont investi le toit de la maison où quelques militants étaient retranchés depuis le lundi 16 septembre pour empêcher l’avancée du chantier de l’autoroute A69. Aidée par un énorme talus érigé par les pelleteuses du concessionnaire NGE-Atosca, la Cnamo n’a eu aucun mal à accéder au toit.

Les opposants avaient installé des cordes allant du toit de la maison aux arbres occupés.
© Antoine Berlioz / Reporterre

Malgré la résistance des opposants, qui s’étaient attachés le bras à l’intérieur du toit en utilisant la technique de l’« arm-lock », les sous-officiers ont pu désentraver quatre d’entre eux et les contraindre à descendre. D’autres ont fini par descendre par eux-mêmes en échange de nourriture. Cinq « écureuils » — les militants perchés dans les arbres — sont toujours perchés dans les deux derniers noyers du Verger pour empêcher leur abattage.

Depuis le lundi 16 septembre et le début de la tentative d’expulsion, la Cnamo s’est heurtée à la détermination des écureuils, ne parvenant initialement pas à faire descendre l’ensemble des militants des arbres et du toit. Face à cet échec, la stratégie a évolué, s’inspirant fortement de l’intervention policière à la zad de la Crem’Arbre en mars dernier dans le Tarn.

La Cnamo en intervention sur le noyer Zineb retire les espaces de couchage et d’abri pour ne laisser que la nourriture et l’eau aux écureuils de l’arbre.
© Antoine Berlioz / Reporterre

Le vendredi 20 septembre, des Compagnies républicaines de sécurité (CRS) ont été dépêchées sur place pour assurer une présence toutes les nuits et des spots lumineux ont été amenés par le concessionnaire sur le site. Ces lumières puissantes sont dirigées vers les militants sur le toit et dans les arbres et perturbent leur sommeil.

« Ils cherchent clairement à nous pousser à bout »

« Ils cherchent clairement à nous pousser à bout et à ce qu’on descende de nous-mêmes », dénonce Kiwi, une écureuil descendue de son arbre mercredi 25 septembre. « Presque toutes les nuits, les CRS font en sorte de rire et de parler fort, parfois en nous interpelant par notre surnom, parfois en utilisant de la tôle pour faire du bruit et pour nous réveiller. Il y a une femme transgenre dans l’arbre aussi, qu’ils font exprès d’appeler au masculin. C’est très dur psychologiquement de tenir », raconte-t-elle.

Aux pieds des gendarmes, quelques vivres comptés et contrôlés, avant d’être échangés contre la descente d’une écureuil.
© Antoine Berlioz / Reporterre

En plus de ces pressions psychologiques, les écureuils sont aussi privés de ravitaillement. Sur une vidéo consultée par Reporterre et tournée dimanche 22 septembre au matin, on voit des gendarmes faire usage d’un taser pour empêcher les militants au sol d’apporter de l’eau et de la nourriture aux « chauve-souris » sur le toit et aux écureuils dans les arbres.

« C’est lunaire d’assister à cela », réagit Petit Jean, un opposant au sol posté à quelques mètres du terrain, comme une dizaine de ses camarades. « De l’eau et de la nourriture, c’est pourtant des choses vitales. »

Journalistes interdits

Ces pratiques avaient déjà été utilisées par la préfecture du Tarn lors du siège de la Crem’Arbre et dénoncées par le rapporteur de l’ONU Michel Forst lors de son passage sur le site, qui avait demandé à la France des « mesures immédiates » pour assurer la protection des militants.

Dans son rapport, Michel Forst dénonce également les entraves à la liberté de la presse, qui semblent se répéter depuis une semaine à la zad du Verger, puisque les journalistes ont interdiction de pénétrer sur le terrain et donc de communiquer avec les militants dans les arbres et sur le toit. « Atosca ne veut plus de journalistes sur son terrain », répond à Reporterre un lieutenant-colonel de la gendarmerie sur place.

Le 27 septembre en fin de matinée, une pelle mécanique a entamé la destruction de la maison.
© Antoine Berlioz / Reporterre

En négociant avec les gradés de la gendarmerie, les militants ont pu faire passer quelques litres d’eau, des produits d’hygiène et des médicaments à leurs camarades en hauteur. « On a négocié ma descente contre un sac de nourriture », raconte Kiwi, qui est descendue d’un noyer mercredi. « Même là, les gendarmes ont fait le tri dans le sac et n’ont laissé monter qu’une ration de nourriture pour un jour et pour une personne. C’est délirant », raconte-t-elle. « Il y a des jours où on peut monter deux litres par personne, d’autres où c’est rien du tout, c’est très aléatoire. »

Contactée par Reporterre, la préfecture de Haute-Garonne a déclaré n’avoir « pas de commentaires à faire sur une opération en cours ». Malgré les moyens déployés par le concessionnaire et la préfecture, une poignée d’opposants continue à résister dans les arbres du Verger pour continuer à faire vivre le dernier bastion de résistance sur les 53 kilomètres de tracé de l’autoroute A69 entre Toulouse et Castres.

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