Pillage du patrimoine palestinien, par Olivier Pironet (Le Monde diplomatique, octobre 2024)

Lors d’un vol de la compagnie britannique Virgin Atlantic, fin 2017, le nom d’une entrée inscrite au menu de la nouvelle carte des repas servis à bord suscita la polémique. La « salade de couscous palestinien », en référence au maftoul, un couscous traditionnel du Proche-Orient très populaire dans la région, selon un bref résumé, se voulait « inspirée des saveurs de Palestine ». Mais un passager mécontent publia sur les réseaux sociaux un cliché de la page des hors-d’œuvre en accusant la compagnie aérienne et son personnel d’être des « sympathisants de terroristes ». L’image, relayée par des organisations pro-israéliennes, se répandit sur la Toile, provoquant la colère de nombreux internautes. Certains affirmèrent même qu’il s’agissait en fait d’une salade « juive » ou « israélienne ». Face aux pressions, la compagnie s’excusa officiellement pour l’« offense faite à [ses] clients », puis supprima les mots « palestinien » et « Palestine » du nom et du descriptif de l’entrée sur ses cartes.

La compagnie émiratie Flydubai, qui a ouvert une ligne aérienne entre les Émirats arabes unis et Israël après l’accord de normalisation signé par les deux pays en 2020, a pris soin, pour sa part, de ne pas commettre la même « offense » : son petit « Guide du tourisme en Israël », disponible sur son site Internet, vante notamment « les délices et le goût authentique » du houmous (une purée de pois chiches), du falafel (boulette de pois chiches et de fèves) ou de la msabaha (une variante du houmous), caractéristiques selon lui de la gastronomie israélienne alors que ce sont des mets typiques du terroir palestinien et du Levant. Mais, contrairement à Virgin Atlantic, Flydubai n’a fait aucun cas des critiques que lui ont adressées des Palestiniens et d’autres citoyens de pays arabes.

Tout sauf anecdotiques, ces deux exemples illustrent la bataille culturelle et idéologique que mènent les Israéliens contre les Palestiniens depuis des décennies pour consolider leur domination sur le terrain (…)