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près d’Athènes, des Grecs abandonnés face aux feux


Athènes (Grèce), correspondance

De légers filets de fumée dansent encore çà et là sur les terrains calcinés de la vallée de Penteli et jusqu’aux proches banlieues athéniennes d’Halandri et de Vrilissia. Un immense incendie, débuté le 11 août à 40 kilomètres au nord-est d’Athènes, a, depuis, ravagé les alentours de la capitale. Des banlieues proches ont dû être évacuées et 10 000 hectares — de forêts surtout — ont déjà été détruits. Pour l’heure, plus aucun front n’est actif autour d’Athènes.

À Penteli, les habitants et les pompiers mobilisés sont venus à bout des flammes dans la matinée du mardi 13 août, mais l’atmosphère est toujours imprégnée de poussière de cendres et d’odeur de bois brûlé. Dans ce coin montagneux et boisé, les flammes ont laissé derrière elles un paysage de désolation. Entre les arbres calcinés, plusieurs maisons ont partiellement ou totalement été détruites.

Une maison brûlée à Penteli, près d’Athènes, le 13 août.
© Isabelle Karaiskos / Reporterre

Eleni Exarkhou et son mari se disent finalement plutôt chanceux. Leur habitation n’a été détruite que sur des parties extérieures ou annexes, bien que tout l’intérieur de l’habitation ait été noirci par les fumées.

« C’est le voisin qui a sauvé notre maison »

« C’est le voisin qui a sauvé notre maison », raconte la retraitée à Reporterre. « Il a cassé la grille entre nos terrains et a arrosé durant des heures avec le tuyau d’arrosage de son jardin, le temps que nous arrivions. Les pompiers eux ne sont jamais venus, car il y avait plus urgent ailleurs. »

Comme souvent dans ce pays, familier des feux estivaux, de nombreux habitants ont été contraints de lutter seuls contre les flammes. Les pompiers sont en effet débordés car en sous-effectif.

Le mont Penteli, un des poumons verts de la région d’Athènes, ravagé par le feu.
© Isabelle Karaiskos / Reporterre

Zéro pompier

À deux pâtés de maisons de là, Nikos Kolivodiakos et sa femme ont été moins chanceux. Les arbres proches du bâtiment dans lequel ils vivaient ont pris feu et les flammes hautes de plusieurs mètres ont carbonisé le premier étage — au-dessus de l’appartement de la mère de Nikos. « On est partis sans même prendre un sous-vêtement, on n’a pas imaginé une seconde que tous nos biens allaient être anéantis. » Le couple et la mère sont depuis hébergés, pour une durée indéterminée, chez des proches habitant le quartier.

Maison détruite à Halandri. Le feu a ravagé 10 000 hectares en tout, principalement de forêt.
© Isabelle Karaiskos / Reporterre

« Pendant que ça brûlait, il y avait dix policiers présents devant chez moi mais zéro pompier. Un camion a fini par arriver au bout de quatre heures avec deux pompiers seulement. Pendant quatre heures, en pleine région d’Athènes, j’étais seul avec mon tuyau à lutter pour sauver ma maison », résume Nikos. Ce dernier est resté près de sa maison le premier jour des feux, alors même que la zone avait déjà été évacuée.

Comme Nikos et sa famille, des milliers d’habitants ont dû partir en début de semaine de plusieurs villes et communes entourant la capitale.

Eleni, devant sa maison brûlée, montre d’où est venu le feu.
© Isabelle Karaiskos / Reporterre

Démarré dimanche 11 août de Varnavas, un village situé à une trentaine de kilomètres d’Athènes, l’incendie a traversé en quarante-huit heures pas moins de trois montagnes et plus de 23 kilomètres pour arriver, à la sidération générale, jusqu’aux portes de la capitale, dans la ville densément peuplée de Halandri. C’est là qu’une femme de 65 ans a péri, prisonnière des flammes dans la petite usine où elle travaillait.

Des pompiers grecs surveillent un entrepôt qui avait pris feu à Penteli.
© Isabelle Karaiskos / Reporterre

Vents forts et sécheresse : le “cocktail” explosif

« Le fait qu’un feu ait pu parcourir une telle distance, dans de telles zones et sans que les autorités n’aient rien pu faire, soulève de nombreuses questions », commente Kostas Lagouvardos, directeur de recherche de l’Observatoire national d’Athènes. « Les vents forts, la sècheresse et les fortes chaleurs sont évidemment le “cocktail” parfait pour attiser les incendies. Mais il faudra qu’enfin une étude sérieuse et officielle soit menée pour établir comment cet incendie a pu se propager ainsi et ce qui aurait pu être fait, pour ne pas répéter les mêmes erreurs », indique le chercheur à Reporterre, qui déplore, aussi, un manque de prévention.

Des effectifs et des moyens limités chez les sapeurs-pompiers, des forêts non entretenues et un manque de coordination des autorités sont entre autres pointés du doigt depuis plusieurs années par des ONG et des experts.

Un habitant muni d’un seau surveille les braises sur son terrain à Halandri.
© Isabelle Karaiskos / Reporterre

Seuls « quelques foyers épars » subsistent, selon le ministère grec de la Protection civile et de la Crise climatique. Les autorités restent cependant prudentes, alors que des vents forts et des températures de plus de 37 °C sont attendus dans la région les jours qui viennent.

Chaque année, en période estivale, la Grèce est en proie à des feux de plus en plus dévastateurs. Depuis 2017, 37 % des forêts de l’Attique, la région d’Athènes, ont été détruites par les incendies, selon l’Observatoire d’Athènes.



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