Décès du «maître du droit» français à l’origine des mandats d’arrêt de la CPI


par Ramona Wadi

Gilles Devers, avocat et docteur en droit français, est décédé mardi. Le «champion de la justice palestinienne» avait 68 ans.

Devers était considéré comme le «maître du droit» à l’origine des mandats d’arrêt émis la semaine dernière par la Cour pénale internationale (CPI) contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou et son ancien ministre de la Défense Yoav Gallant, accusés de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité. Sa maladie le faisait beaucoup souffrir, mais le jour où les mandats ont été émis, il a dit à son fils : «Maintenant, je peux mourir en paix». Malgré la douleur, il a tenu à parler aux médias de cette victoire judiciaire exceptionnelle et a fait ses dernières déclarations sur le sujet à Al-Jazeera.

Pendant 30 ans, Gilles Devers a partagé son travail entre les secteurs de la santé et du social et la défense des minorités en France et dans le monde. La cause palestinienne était sa première priorité, et il était l’un des porte-parole d’un groupe de 350 ONG, représenté par 40 avocats, chargé de gérer une plainte déposée auprès de la CPI concernant les crimes de guerre commis lors de l’offensive militaire israélienne de 2008-2009 contre les Palestiniens de Gaza. L’Autorité palestinienne l’avait chargé de déposer une plainte en son nom en janvier 2009.

L’avocat français a également déposé une plainte contre Israël en juillet 2014 concernant sa guerre contre Gaza la même année, ce qui a donné lieu à une importante campagne médiatique et à une pression sur l’AP et la Cour internationale de justice (CIJ). Cela a conduit la Palestine à adhérer au Statut de Rome et la CPI à accepter d’ouvrir un examen préliminaire des faits qui ont eu lieu à partir du 13 juin 2014.

L’expert français en droit international Abdelmajid Merari l’a décrit comme un «avocat humanitaire et de principe» qui a consacré sa vie à la défense des questions humanitaires, notamment de la cause palestinienne. Merari a déclaré à Al- Jazeera Net qu’il lui avait beaucoup appris. «Il a été mon mentor dans plusieurs affaires pendant plus de 15 ans de travail en commun et il a accueilli à bras ouverts les divergences d’opinion. Avec sa disparition, nous perdons une figure inestimable du droit et des droits de l’homme».

Malgré les obstacles rencontrés par l’équipe juridique et le rejet des demandes qu’il a présentées dans le dossier de la CPI, Devers s’est distingué par son insistance à ne pas abandonner.

«L’esprit chevalersque du peuple palestinien», a-t-il déclaré, «est plus importante que celui des avocats».

Dans ce contexte, Merari – l’un des avocats les plus proches de lui – a souligné que Devers avait défendu la cause palestinienne avant l’émission des mandats d’arrêt. «En effet, [il l’a fait] depuis que la Palestine est devenue membre du Statut de Rome, et lorsque la décision du 5 février 2021 a été rendue confirmant la compétence de la CPI sur les territoires palestiniens occupés par Israël en 1967, y compris Jérusalem-Est, la Cisjordanie et la bande de Gaza, il a examiné et aidé les experts de la CPI à rédiger le texte».

Les événements du 7 octobre 2023 ont incité Devers à agir encore plus intensément sur le dossier des Palestiniens. Selon Merari, il était le «moteur» de l’équipe juridique. «Il posait des questions quand nous nous relâchions, et il écrivait des centaines de pages de notes quand nous étions paresseux. Dans cette affaire, il a fait pression sur les membres de l’équipe pour qu’ils recueillent des preuves, et il a travaillé pour coordonner leurs rôles malgré tous les problèmes de santé dont il souffrait à l’époque». Il a ajouté que «Gilles Devers a pleuré à la porte de la CPI lorsqu’une avocate palestinienne s’est excusée de ne pas être venue, car tous les membres de sa famille avaient été tués la veille du 9 novembre, lorsque nous sommes allés déposer la plainte au tribunal, ce qui a été le principal motif pour émettre les mandats d’arrêt».

Merari a déclaré à Al-Jazeera que même si Devers se préparait à subir une opération «extrêmement dangereuse» – «une question de vie ou de mort» – la dernière chose dont il a parlé était le quartier de Sheikh Jarrah à Jérusalem-Est occupée. De plus, il prévoyait de soulever à la CPI la question des prisonniers palestiniens détenus par l’État d’occupation.

Merari, son ami et collègue proche, a conclu en affirmant que les mandats d’arrêt émis contre Netanyahou et Gallant étaient «le cadeau» que Devers recherchait depuis plus de 15 ans. «Il a quitté [ce monde] avec la conscience tranquille, et nous poursuivrons notre bataille juridique dans l’esprit de Gilles Devers et pour exécuter sa volonté, car le véritable travail, le plus difficile, a en fait commencé après l’émission des mandats».

source : Middle East Monitor via International Solidarity Movement

proposé par Marie-Ange Patrizio



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