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L’art de la prière, par Lotfi Hadjiat

ByVeritatis

Sep 3, 2023



L’homme ordinaire est convaincu que le plus grand bonheur consiste à n’avoir confiance qu’en soi, en ses moyens, en sa puissance, en ses réseaux, en son pognon… Mais le plus grand bonheur est au contraire de n’avoir confiance ni en soi ni aux autres et de ne plus avoir confiance qu’en Dieu.

 

La prière c’est l’art de l’humilité, l’art suprême.

 

Ce n’est pas l’ego qui doit prier, nous devons au contraire prier pour nous en libérer !

 

La prière est un aveu, aveu d’impuissance, impuissance de nos certitudes.

 

On pourrait penser que prier c’est se bercer d’illusion, mais c’est au contraire se dépouiller de ses illusions, de ses prétentions…

 

La prière est ce moment où l’âme se tourne vers une ouverture où semble couler le miel de l’esprit.

 

Les rationalistes vous diront que la prière est une négation du réel, une négation consolante. Je dirais que la prière est la célébration intérieure et silencieuse d’une présence bien plus réelle que le réel ordinaire. « La vraie vie est absente. Nous ne sommes pas au monde », disait Rimbaud.

 

La prière est cette puissance de l’âme qui embrasse l’océan des possibles jusqu’à dessiner la forme des vagues à la surface.

 

La prière est comme une caresse infinie qui efface notre appartenance au corps.

 

Prier c’est entendre ce que l’éternité nous souffle à l’oreille.

 

Le plus fabuleux voyage est une prière exaucée.

 

La prière dévoile la plus subtile des vies que le réel ordinaire enterre.

 

Prier c’est mettre à nu notre âme jusqu’à faire résonner sa trans-parente vérité.

 

La prière s’exauce quand elle est un don du cœur, un vouloir-du-bien. Elle s’exauce rarement quand elle exprime un désir.

 

Le cœur aspire, le corps désire. Et malheureusement, le cœur est enchaîné au corps.

 

Prenons soin de distinguer entre désirer obtenir la sagesse (science, philosophie… ) et aspirer à être sage… On peut paradoxalement être un grand philosophe comme Alain Badiou et paniquer face à la mort…

 

Le désir est misérable par essence, il atteste de notre servitude.

 

Le désir de liberté aboutit lorsqu’on se libère précisément de tout désir.

 

Le désir qui nous rend le plus misérable est sans aucun doute le désir de reconnaissance.

 

La reconnaissance arrive lorsqu’on ne la désire plus et que l’on chemine enfin sur la voie de l’accomplissement de soi.

 

Quand notre volonté de créer du lien n’aboutit pas, ou pas assez, ou mal, nous allons vers la volonté de créer de l’art, qui lorsqu’elle n’aboutit pas, nous fait chuter dans la volonté de puissance, qui lorsqu’elle n’aboutit pas, nous fait chuter dans la volonté de nuire, qui lorsqu’elle n’aboutit pas, nous fait chuter dans le suicide.

 

La prière est moins un appel à l’aide qu’une aspiration de l’âme à se réfugier en Dieu, moins une demande instante que l’humilité de s’en remettre à Lui, moins un désir que l’acceptation de s’abandonner à Lui, de tout laisser à Son pouvoir…

 

Reconnaître qu’on ne sait rien est le début de la sagesse, reconnaître qu’on ne peut rien est le début de la prière.

 

Prier jusqu’à laisser la compassion divine se manifester, telle est la prière éternelle de l’âme libérée.

 

Le seul pouvoir de Dieu c’est sa grâce infinie et insondable. La prière est l’art profondément subjectif qui nous rapproche de cette grâce.

 

Vouloir s’approprier la grâce divine, vouloir la posséder, vouloir même l’acheter était le désir d’un israélite de Samarie : Simon le Magicien, le premier gnostique… Acheter la grâce divine !… C’est vous dire à quel point la gnose est l’œuvre du Diable.

 

S’approprier la grâce divine par la connaissance, telle est la prétention de la gnose moderne. Mais la grâce divine est inappropriable, insaisissable, même par le plus subtil intellect, même par un intellect aussi subtil que celui de René Guénon. Prier c’est précisément se désappro-prier.

 

L’intellect ne peut saisir la vérité, il peut seulement guider le corps, le cœur, l’âme, vers leur bien ; l’intellect n’est que leur serviteur, un serviteur qui s’efface lorsque notre intuition est enfin libérée. Aujourd’hui, l’intellect se rebelle et veut être le seigneur qui écrase l’intuition, et tout particulièrement l’intuition du divin.

 

La prière est l’art de libérer notre intuition.

 

Méditer c’est faire advenir le vide en nous en fixant notre esprit sur un point. Prier c’est faire advenir l’accomplissement de ce à quoi aspire notre cœur. Et notre cœur n’aspire pas au vide mais à la plus pleine intensité de vie.



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