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En Afrique de l’Ouest, le panafricanisme rime désormais avec « dégagisme », par Rémi Carayol (Le Monde diplomatique, septembre 2024)

ByVeritatis

Sep 17, 2024


« Les jeunes ne veulent plus de dirigeants corrompus, et surtout ils ne veulent plus de la Françafrique »

Le 6 juillet dernier, le Mali, le Niger et le Burkina Faso, qui avaient déjà fondé l’Alliance des États du Sahel, ont annoncé la création d’une « confédération ». Rejetant la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao), jugée pro-occidentale, ils revendiquent panafricanisme et défense de la souveraineté. Repris un peu partout sur le continent, ces mots sont aussi forts qu’ambigus.

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Jess Atieno. — « My Lady Madonna, I Present to You Three Acts of Lamentation » (Ma Madone, je vous présente trois actes de lamentation), 2023

© Jess Atieno – Photographie : Bruno Demeocq – Galerie Cécile Fakhoury, Dakar, Paris

Élu sur une promesse de rupture, c’est néanmoins paré de tous les atours de la respectabilité — costume et cravate bleus, écharpe verte de grand-croix de l’ordre national du lion et collier en or du grade de grand-maître — que M. Bassirou Diomaye Faye a prêté serment devant un parterre de chefs d’État et de gouvernement africains le 2 avril dernier. Le nouveau président sénégalais, le plus jeune de l’histoire du pays (44 ans), vainqueur dès le premier tour du scrutin avec plus de 54 % des suffrages, est resté serein derrière son pupitre. Ni fanfaronnade, ni anathème : son discours minimaliste d’une dizaine de minutes ne tranche en rien avec ceux de ses pairs d’Afrique de l’Ouest : « démocratie », « liberté », « progrès », « souveraineté » mais pas de « rupture », et encore moins de « révolution ». Il n’a pas non plus parlé de la jeunesse, celle qui l’a porté au pouvoir à l’issue d’une succession de manifestations réprimées dans le sang par le régime de M. Macky Sall (au moins cinquante-six morts depuis 2021 selon Amnesty International). Il a tout de même consenti à rappeler que « les résultats sortis des urnes expriment un profond désir de changement systémique ».

Une semaine plus tôt, le 25 mars, une fois sa victoire acquise, le candidat des Patriotes africains du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef) avait pourtant mis un mot chargé en symbole sur cette envie de changement : « Je suis porteur d’un panafricanisme de gauche », avait-il lancé à ses partisans. Le seul panafricanisme qui vaille, selon ses conseillers. « C’est ce pour quoi nous nous battons depuis le début, assure l’un d’eux. Nous luttons pour un Sénégal libre, dans une Afrique libre, dans un monde libre. » La victoire du Pastef, veut croire ce dernier, est une « étape fondamentale » dans le renouveau de cette grande idée que beaucoup pensaient obsolète, à force de dévoiement.

Le panafricanisme est « une énigme historique », estime l’historien Amzat Boukari-Yabara, qui rappelle (…)

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