• sam. Sep 21st, 2024

les derniers « écureuils » résistent, pour combien de temps encore ?


21 septembre 2024 à 10h21
Mis à jour le 21 septembre 2024 à 10h38

Durée de lecture : 4 minutes

Verfeil (Haute-Garonne), reportage

« À ton avis, ils s’arrêteraient s’ils tuaient quelqu’un ou ils continueraient l’autoroute ? » Nous sommes le 20 septembre au matin et des opposants à l’autoroute A69 se réchauffent autour d’un feu de camp et d’un café à la zad du Verger, à Verfeil, en Haute-Garonne. Les militants écologistes échangent de manière décontractée. Quelques minutes plus tard, ils remontent en vitesse leurs bouts de tissu au-dessus du nez — masques, T-shirt enroulé autour du visage — pour ne pas être reconnaissables. Une dizaine de voitures de gendarmerie arrivent à vive allure et pénètrent sur la zone.

Devant l’entrée de la zad, la carcasse encore fumante d’un rouleau compacteur embaume le périmètre d’une odeur nauséabonde. La police scientifique, qui photographie et récolte des indices sur les cendres de la machine, est également sur place. Le compacteur incendié appartenait au groupe NGE-Atosca, concessionnaire de la future autoroute A69 qui doit relier Toulouse à Castres.

Un engin de chantier sur l’entrée du lieu d’occupation brûlé pendant la nuit.
© Antoine Berlioz / Reporterre

La zad du Verger, ou ce qu’il en reste, est le dernier rempart physique à l’avancée des travaux de l’autoroute écocidaire et antisociale. Celle-ci a été créée fin mars dans le jardin d’une famille, qui a depuis accepté de déménager.

« Il n’y a plus aucun arbre »

Non revendiquée, le sabotage intervient cinq jours après le début des opérations de gendarmerie visant à expulser les derniers opposants retranchés en hauteur, dans les arbres et sur le toit d’une maison au cœur de cette ancienne propriété qui se situe en plein milieu du tracé de l’A69.

Ces derniers jours ont été intenses pour les militants. « Regardez autour de vous, il n’y a presque plus aucun arbre. Quand on sait à quoi ressemblait cet endroit avant, cela fend le cœur », lance un zadiste. Encore habité il y a quelques jours par Alexandra et sa famille, le « verger » a été dépouillé depuis leur départ. Les arbres, le potager, le poulailler, la cuisine extérieure… Les machines du concessionnaire NGE-Atosca ont presque tout rasé et ont commencé à terrasser la zone.

Des « écureuils » sont toujours dans des arbres malgré les tentatives d’évacuation de la Cnamo ces derniers jours.
© Antoine Berlioz / Reporterre

Occupation du toit d’une maison sur le tracé

La maison, amochée mais encore debout, est toujours occupée depuis le toit par une dizaine de militants. Leur présence empêche pour le moment le concessionnaire de procéder à sa destruction. Depuis le jeudi 19 septembre, le concessionnaire a décidé d’ériger une énorme butte contre cette maison, en entassant de la terre contre les murs. « J’espère qu’ils savent ce qu’ils font », s’inquiète un zadiste sur le toit, « parce que si la maison s’effondre alors qu’on est dessus, cela va être un drame ! »

Malgré le déploiement de la Cnamo, la cellule de la gendarmerie spécialisée dans les interventions périlleuses, trois arbres restent encore occupés par des militants. « On a l’impression qu’ils ne s’arrêteront devant rien, même s’il y a un mort », dit depuis son noyer une zadiste. « On a déjà eu un camarade qui est tombé l’autre jour de plus de 6 mètres, la Cnamo prend des risques énormes pour nous obliger à descendre », poursuit-elle. Mercredi 18 septembre, alors que la Cnamo tentait de déloger des « écureuils » [le nom donné aux militants perchés dans les arbres] de leurs branches, un opposant à l’A69 a chuté d’environ 6 mètres et s’est fracturé le fémur.

Les arbres, le potager, le poulailler, la cuisine extérieure… Les machines du concessionnaire NGE-Atosca ont presque tout rasé et ont commencé à terrasser la zone.
© Antoine Berlioz / Reporterre

« C’est la quatrième chute en vingt jours », s’indigne un opposant à l’A69 qui soutient jour et nuit les « écureuils » depuis une butte voisine.

Pour les zadistes, cette chute est due à la pression exercée durant plusieurs heures par la Cnamo, qui pousse certains militants à prendre des risques — ils ou elles se décrochent de leurs cordes pour échapper à l’interpellation tout en empêchant l’abattage des arbres. Selon le colonel Stéphane Dalongeville, sur place le 20 septembre au matin comme depuis le début de la semaine, une enquête est actuellement en cours pour déterminer les circonstances de cette chute. « Il y a également une investigation pour l’incendie volontaire de cette machine », précise-t-il en pointant du doigt la carcasse du rouleau compacteur derrière lui.

Lire aussi : Zad contre l’A69 : deux nouveaux blessés lors d’une expulsion matinale

Depuis le 16 septembre et le début de l’opération, huit « écureuils » — le nom des militants qui se perchent dans les arbres — sont descendus volontairement ou de force de leurs arbres. « Même s’ils nous mettent en danger, même si on est constamment sous pression, cela n’enlèvera pas notre détermination, on tentera de sauver ces arbres jusqu’au bout », dit une zadiste depuis son noyer qu’elle a appelé Zineb.

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