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bonne ou mauvaise idée ?


L'impact numérique régulé par l'État : Bonne ou mauvaise idée ?

Quelle empreinte laisse la donnée sur les écosystèmes ? En questionnant les multiples facettes de l’impact du numérique sur notre santé, nos sociétés, l’environnement et la biodiversité, le Cercle de la Donnée et l’Agora 41 plaident pour un « numérique responsable » dans un nouvel essai paru au printemps 2024. Fruit d’une réflexion menée pendant près de trois ans, l’ouvrage propose des solutions innovantes et audacieuses pour espérer corriger la trajectoire actuelle et opter pour un usage réfléchi de la donnée numérique.

Y a-t-il un lien entre la donnée numérique et le vivant ? Bien loin de la perception d’immatérialité ou de virtualité collée aux contenus qui peuplent les réseaux numériques, la donnée s’inscrit définitivement dans nos environnement naturels et humains.

« Des dizaines de milliers de gigaoctets par habitant »

Mais qu’entend-on par donnée ? D’après Philippe Bihouix, ingénieur et essayiste français, spécialiste des ressources minérales et promoteur des low-tech, ce sont toutes « ces informations qu’il faut bien produire : photos, vidéos, fichiers divers et données brutes avec nos téléphones et nos ordinateurs, mais aussi avec des capteurs et des objets connectés de plus en plus nombreux » qui nous permettent de transmettre, traiter et transformer, copier, stocker et diffuser.

« Elle se compte désormais en dizaines, et même centaines de zettaoctets, soit des dizaines de milliers de gigaoctets par habitant sur Terre… Une quantité qui augmente de façon exponentielle », détaille l’ingénieur et essayiste dans la préface du nouvel ouvrage du Cercle de la donnée intitulé « L’empreinte de la donnée sur le Vivant : un essai pour un numérique responsable ».

Menée en collaboration avec l’Agora 41, think thank français dédié aux enjeux de transformation numérique de nos sociétés, l’étude s’emploie non seulement à détailler l’impact de la donnée sur notre santé, nos sociétés, l’environnement et la biodiversité, mais également à contribuer au débat public en avançant des propositions fortes pour un numérique responsable.

Catastrophe numérique pour le climat et la biodiversité

Et pour cause, l’essor rapide des technologies numériques a considérablement transformé nos sociétés, sans que personne ne mesure véritablement ses multiples impacts. Aujourd’hui, de nombreuses études ont démontré l’empreinte environnementale majeure de cette révolution. Les auteurs du rapport expliquent :

« Parmi les principaux signaux révélateurs permettant de mesurer l’impact du numérique en général et de la donnée en particulier, nous retrouvons les dérèglements environnementaux touchant la biodiversité, l’occupation des sols, l’acidification de l’eau et le changement climatique »

Entre demande croissante des matières premières nécessaires à la fabrication des appareils électroniques – tels que les métaux rares, la construction d’infrastructures pour héberger les centres de données et la conversion de certains territoires sauvages ou agricoles, l’utilisation de produits chimiques dangereux dans les processus de fabrication et l’émission de gaz à effet de serre des centres de données qui nécessitent d’énormes quantités d’énergie pour fonctionner et refroidir les serveurs, le bilan est sans appel.

La santé en proie aux écrans

À cela s’ajoute également l’impact de la pratique immodérée des outils digitaux sur la santé physique et mentale des utilisateurs, mais également les effets parfois délétères de l’usage de la donnée sur les systèmes de soin et la pratique médicale elle-même. `

Couplé à l’usage croissant des données numériques, l’augmentation des temps d’écran  entraîne non seulement une augmentation du temps de sédentarité et une diminution du temps d’activité physique, mais aussi une augmentation des troubles du sommeil et une perturbation des mécanismes de régulation de l’appétit. Des études concluent ainsi à « une modification du comportement alimentaire, qui tend à augmenter les apports caloriques et le grignotage, étant précisé que le comportement alimentaire est lui-même modifié par les troubles du sommeil », précisent les auteurs de l’ouvrage.

En outre, une augmentation de troubles cognitifs et psychologiques semble également liée à un temps d’écran toujours plus important. Des professionnels de la santé s’inquiètent à ce titre de la prévalence des troubles de l’attention au sein de la « génération Z ».

Quand les notifications s’emballent et que les informations se suivent en continu, le cerveau subit une véritable surcharge qui induit une fatigue psychique considérable. – Source photo : Pixabay

Pour chaque utilisateur et quelque soit son âge, les écrans et le flot d’informations continu augmentent la charge mentale et la fatigue cognitive, tout en jouant sur l’exacerbation de nos biais cognitifs et la diminution de nos esprits critiques pour faire danser les algorithmes. Malgré tout, l’usage des technologies numériques est croissant dans la population, « et les catégories d’âge exposées se font de plus en plus précoce », s’inquiètent les experts.

Repenser notre utilisation des données

Bien sûr, aux côtés de ces nombreuses dérives, il existe également des avantages considérables à l’usage des technologies numériques. Les réseaux numériques et le partage rapide de données peuvent par exemple renforcer la résilience des communautés en période de crise politique, ou en permettant une communication et une coordination efficace des secours en cas de catastrophes naturelles ou sanitaires.

Ils facilitent également l’accès à l’information, à l’éducation et aux services publics pour des utilisateurs potentiellement éloignés géographiquement. En outre, l’émergence de la Data for Green traduit encore la volonté de mobiliser le potentiel des données au service de la transition écologique.

Pour autant, au-delà de l’utilité incontestable de la donnée dans certains domaines, il reste nécessaire de s’interroger sur l’impact environnemental, social et sanitaire des services numériques « qui se multiplient sur le marché au nom de l’innovation technologique et bien souvent au détriment des besoins réels des populations », rappellent les chercheurs.

L’ouvrage est disponible en accès gratuit et numérique.

Si revenir à un mode de vie dépourvu de l’utilisation des nouvelles technologies apparaît « utopique, tant pour des raisons sociétales qu’économiques », il est toutefois indispensable de redéfinir le cadre dans lequel ces outils existent et se développent.

Vers un numérique responsable ?

« À bien y réfléchir, la loi de Gabor, selon laquelle ce qui peut être fait techniquement le sera nécessairement, n’est pas inéluctable et un autre modèle est possible : celui d’un numérique « responsable », celui où la puissance publique protègerait, par exemple en examinant les produits/services numériques avant leur mise sur le marché, pour vérifier que leurs impacts sur le vivant ont été pensés et sont contrebalancés par des garanties ou des limites d’usage », proposent les auteurs de l’étude.


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Est-il encore temps de réagir ? « Oui », répondent en coeur les membres du Cercle de la Donnée et de l’Agora 41. « Des pistes sérieuses existent, à condition d’être courageux ». Cette étude s’adresse ainsi « à tous ceux qui partagent l’urgence de reprendre le contrôle sur le numérique irresponsable et souhaitent corriger la trajectoire actuelle en optant pour un usage réfléchi de la donnée numérique » résume Jean Martinot, Vice-Président du Cercle de la Donnée et coordinateur de l’ouvrage à découvrir en accès gratuit ici.

– L.A.


Photo de couverture de cottonbro studio.

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