
Anna Maria Maiolino. — « Entrevidas » (Entre les vies), triptyque de la série « Fotopoemação » (Photopoèmaction), 1981
© Anna Maria Maiolino — Photo : Georges Meguerditchian/Centre Pompidou/MNAM-CCI/Grand Palais-Rmn
En avril 2024, l’écrivaine argentine Selva Almada fait une entrée remarquée dans la « shortlist » de l’International Booker Prize. Grâce à la traduction en anglais de son roman No es un río, cette native de la province d’Entre Ríos, limitrophe de l’Uruguay, ajoute son nom à la longue série des autrices latino-américaines qui, depuis une demi-douzaine d’années, ont figuré parmi les finalistes de ce prestigieux prix littéraire britannique — (mal) nommé jusqu’à il y a peu Man Booker Prize. Un quart des ouvrages présélectionnés pour l’édition 2024 étaient sud-américains.
Même si Almada perd en finale, sa défaite vaut victoire, puisqu’elle lui ouvre les marchés anglo-saxons — les plus porteurs. Ces dix dernières années, le Booker a reconnu et popularisé de nombreuses plumes « latinas » traduites dans la langue de Shakespeare. Pour les Argentines, outre Almada, citons Gabriela Cabezón Cámara, Ariana Harwicz, Claudia Piñeiro, Samanta Schweblin ; pour les Mexicaines, Fernanda Melchor et Guadalupe Nettel ; pour les Péruviennes, Gabriela Wiener.
Adaptations au cinéma — par exemple Crève, mon amour, de Harwicz (Seuil, 2020), par la réalisatrice Lynne Ramsay en 2025 —, déclinaisons sur les plates-formes de streaming — notamment Toxique, de Schweblin (Gallimard, 2017) en 2021, ou La Saison des ouragans, de Melchor (Grasset, 2019) en 2023 —, portraits élogieux dans la presse internationale, traductions dans des dizaines de langues : la littérature latino-américaine a le vent en poupe, et ce sont les femmes qui soufflent le plus fort dans la voile. D’aucuns se risquent à faire un parallèle avec le « boom » du roman latino-américain des années 1960 et 1970, phénomène littéraire qui avait vu la consécration en Occident d’auteurs comme l’Argentin Julio Cortázar, le Péruvien Mario Vargas Llosa, le Colombien Gabriel García Márquez ou le Mexicain Carlos Fuentes. Associé également au mouvement, le Paraguayen Augusto Roa Bastos posait toutefois un regard aussi critique que lucide sur cet (…)
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