Silence – Réseau International


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par Scott Ritter

«Il est clair que l’intention est de détruire les Palestiniens à Gaza par des actes qui répondent aux critères énoncés dans la Convention sur le génocide». – Conseil des droits de l’homme des Nations unies.

Mon père a fêté ses 89 ans l’autre jour.

Il vit avec ma mère dans une résidence médicalisée dans le sud de la Californie. Ils ont déménagé là-bas au début de l’année. Ils ont résisté à l’idée de déménager, car cela représentait pour eux une perte de souveraineté, pour ainsi dire. Mais ma mère, qui a 91 ans, a des problèmes de mobilité, et mon père, qui souffre de démence, n’était plus en mesure de la conduire en toute sécurité à ses nombreux rendez-vous médicaux. Il a donc rendu ses clés de voiture, et ils ont quitté la maison où ils vivaient depuis deux décennies pour emménager dans un petit appartement où ils finiront leurs jours.

Né en 1936, mon père fait partie de ce qu’on appellait «la génération silencieuse», cette partie de la société américaine née pendant la période difficile de l’histoire américaine, de la Grande Dépression à la Seconde Guerre mondiale. Il a atteint l’âge adulte à une époque où le rock’n’roll balayait l’Amérique, mais au lieu des Beatles et d’Elvis, notre maison résonnait des chansons de Johnny Cash et des Tijuana Brass.

Officier de carrière dans l’armée de l’air, mon père était en théorie apolitique. Républicain convaincu, il a baptisé notre premier chien, un magnifique braque de Weimar, Barry Goldwater, en l’honneur du politicien conservateur dont il a soutenu la candidature à la présidence en 1964. Je ne sais pas s’il était membre de la John Birch Society ou s’il se contentait de débattre de leurs idées avec ma mère autour de la table de la cuisine. Mais je sais qu’il était très conservateur.

En 1967, il a été envoyé suivre le cours d’officier d’escadron, le cursus de carrière de l’armée de l’air pour les capitaines, à la base aérienne de Maxwell, près de Montgomery, en Alabama. Ma mère était alors enceinte de celle qui allait devenir ma troisième sœur. Comme il n’y avait pas de logement disponible sur la base, nous vivions dans un appartement loué dans un quartier défavorisé de la ville.

Montgomery n’était pas seulement la capitale de l’Alabama, mais aussi la première capitale de la Confédération. C’était également la ville natale de Rosa Parks et de Martin Luther King Jr., qui y prêchait son engagement en faveur des droits civiques et de l’égalité depuis l’église baptiste de Dexter Avenue. Toutefois, en 1967, l’Alabama était encore le fief de «Bull» Connor, un raciste blanc notoire, et même si les bus de Montgomery n’étaient plus ségrégués, le racisme institutionnalisé demeurait omniprésent.

Nous avons été confrontés à cette réalité un soir d’été 1967. Comme notre petit appartement au deuxième étage n’était pas climatisé, mes parents avaient laissé les fenêtres ouvertes dans l’espoir que la brise puisse dissiper la chaleur humide d’une nuit d’été en Alabama. Nous étions tous couchés lorsque le silence de la soirée a été troublé par les cris perçants d’une femme en détresse. Je me souviens que mon père s’est levé d’un bond, a regardé par la fenêtre, puis a enfilé un pantalon et un T-shirt avant de se précipiter dehors en disant à ma mère : «appelle la police».

Pendant que ma mère composait le numéro, je me suis précipité à la fenêtre pour regarder dehors. Sous notre appartement, à la lueur blafarde d’un réverbère au coin de la rue, deux hommes blancs agressaient une femme noire. Mon père est sorti de l’immeuble au moment où les hommes s’emparaient du sac à main de la femme. Une fois leur butin en main, les hommes se sont enfuis dans une ruelle. Mon père a vérifié que la femme allait bien, puis il s’est précipité à la poursuite des deux hommes. Dans sa hâte de quitter l’appartement, il n’avait pas mis de chaussures et s’est donc retrouvé pieds nus, courant dans une ruelle jonchée de détritus et de verre brisé.

«Bull» Connor, raciste américan

La police de Montgomery est arrivée rapidement sur les lieux, les gyrophares rouges de leur voiture de patrouille projetant des ombres inquiétantes dans la rue déserte, à part cette femme noire qui se tenait au coin de la rue et que l’on entendait pleurer. Les policiers, qui croyaient avoir reçu l’appel d’une femme blanche en détresse, ont été contrariés de constater qu’ils s’étaient déplacés pour une femme de couleur. Juste après l’arrivée de la police, mon père est sorti en boitant de la ruelle, le sac à main de la femme à la main, les deux agresseurs l’ayant laissé tomber en voyant qu’ils étaient poursuivis.

La femme noire a pris le sac à main des mains de mon père et en a examiné le contenu. Rien ne manquait. Mon père a commencé à décrire les deux hommes blancs qui avaient volé le sac à main, mais la police l’a interrompu. «Il ne manque rien dans le sac à main, donc il n’y a rien à signaler». Ils ont prié la femme noire de s’en aller. Elle est partie en remerciant mon père, puis s’est éloignée dans la nuit.

La police a ensuite interrogé mon père, qui a insisté pour qu’un procès-verbal soit établi. Lorsqu’ils ont découvert qu’il était officier de l’armée de l’air en poste à Maxwell, leur attitude s’est légèrement radoucie.

«Tu n’es pas d’ici, donc tu ne peux pas comprendre. Un homme blanc ne doit pas se mêler des affaires d’une femme noire. Occupe-toi de tes affaires et retourne te coucher».

De retour à l’appartement, ma mère s’est occupée des pieds de mon père, coupés par les débris de verre dans la ruelle. Je me souviens qu’il nous a regardés, mes deux sœurs et moi.

«Quand quelqu’un appelle à l’aide», a-t-il dit, «vous avez le devoir de répondre. Peu importe de qui il s’agit. Peu importe sa couleur de peau».

Cette leçon m’a marqué pour le restant de mes jours.

J’ai écouté la voix de mon père au téléphone, quand nous lui avons souhaité son anniversaire. C’était la voix d’un vieil homme affaibli. Mais quand je ferme les yeux, je revois mon père dans la fleur de l’âge et j’entends la force qui résonnait dans sa voix ce soir-là.

Vous voyez, «la génération silencieuse» n’était pas si silencieuse que ça, finalement.

Les bombes israéliennes détruisent les maisons de Gaza

J’ai regardé une vidéo sur mon téléphone portable l’autre jour. Elle montrait une bombe israélienne frappant un bâtiment à Gaza. Après l’explosion, on pouvait entendre les cris et les pleurs des personnes piégées dans les décombres en feu, brûlant vives.

Ce son me hante, tout comme la voix de la petite Hind Rijab qui appelait à l’aide pendant les dernières minutes de sa vie, tragiquement interrompue lorsque la voiture dans laquelle elle se trouvait, entourée des cadavres de sa tante, de son oncle et de ses cousins, a été pulvérisée par un tir de char israélien. Ses derniers mots m’ont particulièrement bouleversé. Lorsqu’un médecin palestinien lui a demandé pourquoi elle ne parlait pas, Hind a répondu :

«Je ne parle pas parce que chaque fois que je parle, du sang sort de ma bouche et salit mes vêtements, et je ne veux pas que ma mère ait à les nettoyer».

Les Israéliens ont tiré 335 balles sur la voiture où se trouvaient Hind et ses proches.

Le bruit de ces coups de feu peut être entendu sur l’enregistrement audio de l’incident.

Et pourtant, le monde se tait.

Un véritable génocide est en train de se dérouler à Gaza sous les yeux du monde entier.

Les habitants de Gaza appellent à l’aide.

Et personne ne fait rien.

Je me demande souvent ce que cela a dû représenter d’être Polonais à Varsovie, entre 1942 et 1943, pendant la liquidation du ghetto. Se promener avec sa famille dans les jardins saxons historiques (le parc Saski), en faisant semblant de ne pas entendre le massacre qui se déroulait à quelques centaines de mètres.

En octobre 1940, les autorités allemandes ont bouclé une zone du centre-ville de Varsovie dans laquelle s’entassaient environ 400 000 juifs. Puis, durant l’été 1942, les Allemands ont procédé à une série de déportations massives, expulsant quelque 265 000 juifs du ghetto vers le camp de concentration de Treblinka. Environ 35 000 juifs ont été tués dans le ghetto de Varsovie durant cette période. Au début de l’année 1943, il ne restait plus que 70 000 à 80 000 juifs dans le ghetto.

Liquidation nazie du ghetto de Varsovie, 1943

En janvier 1943, la résistance juive s’est organisée face aux opérations de déportation des derniers juifs du ghetto menées par les Allemands. En avril, ils ont envoyé des milliers de soldats SS et d’auxiliaires paramilitaires à Varsovie, où ils ont commencé à détruire systématiquement le ghetto. Ces violences ont duré un mois. Des quartiers entiers ont été démolis et incendiés. Quelque 7000 juifs ont été tués et 7000 autres ont été faits prisonniers au cours de ces combats. Finalement, la résistance a fini par être brisée et les 42 000 juifs survivants ont été rassemblés puis envoyés dans divers camps de concentration, où la plupart d’entre eux sont morts.

Les habitants de Varsovie savaient que les Allemands commettaient un massacre, mais ils ont continué à vivre leur vie comme si de rien n’était.

Ils ont gardé le silence.

Ce silence persiste encore aujourd’hui, alors que le monde assiste à la réédition du massacre du ghetto de Varsovie par les descendants de ceux qui y sont morts, sauf que cette fois, ce sont les citoyens de Gaza qui sont systématiquement rassemblés et assassinés par l’armée israélienne.

Il n’y a pas d’autre expression pour décrire les agissements des Israéliens que le «nettoyage ethnique génocidaire».

Un crime de guerre d’une ampleur inimaginable se déroule sous les yeux de la communauté internationale.

Et le monde garde le silence.

Les habitants de Gaza ramassent littéralement les cadavres de leurs proches dans les décombres des bâtiments qui furent autrefois leur foyer, mais qui sont aujourd’hui rasés par l’armée israélienne, rappelant cruellement la destruction du ghetto de Varsovie.

Silence.

Des centaines de corps d’enfants ont été découverts, tués d’une balle dans la tête par des snipers israéliens.

Silence.

Je me promène dans mon quartier paisible de banlieue, où de nombreuses familles ont installé dans leur jardin des pancartes sur lesquelles on peut lire «Nous soutenons Israël».

Ils pourraient aussi bien écrire «Nous soutenons le génocide».

J’imagine la réaction des gens si les pancartes disaient plutôt : «Nous soutenons le lynchage des Noirs».

Car la réalité est la même, simplement dissimulée par un langage dissimulant la terrible réalité en cours.

Israël est le «Bull» Connor du Moyen-Orient, et les civils de Gaza sont l’équivalent moderne de la femme noire qui appelait à l’aide dans les rues de Montgomery, en Alabama, il y a près de soixante ans.

Il a fallu qu’un membre de la «génération silencieuse» prenne parti pour cette femme, ignorant le racisme qui prévalait à l’époque.

Car ses appels à l’aide ne pouvaient être ignorés.

Qui parmi nous se ralliera aujourd’hui à la cause de Gaza ?

Qui bravera le racisme flagrant des sionistes qui ont infiltré tous les aspects de la société américaine actuelle, tout comme le racisme flagrant de «Bull» Conner avait infiltré la société de l’Alabama en 1967 – pour venir en aide à ceux qui en ont besoin ?

Allons-nous être ces passants polonais se promenant dans les jardins saxons pendant que des meurtres avaient lieu derrière les murs qui les séparaient du ghetto juif ?

Car des meurtres génocidaires motivés par le racisme se produisent en ce moment même, à Gaza.

Nous le savons.

Nous choisissons simplement de ne rien faire.

Mon père a su quoi faire en entendant un appel à l’aide.

Et nous ?

Notre silence collectif nous condamne, tandis qu’une fillette de six ans hésitait à parler de peur que le sang qui s’écoulait de ses poumons perforés ne salisse la robe que sa mère lui avait si tendrement préparée.

Hind avait une bonne raison de garder le silence.

Pas nous.

Hind Rijab, 6 ans, assassinée par Israël

source : Scott Ritter via Spirit of Free Speech



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