Les défis d’un bouleversement industriel et culturel
Alors que le Parti national écossais (SNP) a longtemps misé sur le pétrole pour asseoir l’indépendance de l’Écosse, la première ministre Nicola Sturgeon, issue de ses rangs, a récemment semblé opérer une volte-face. Mais remplacer un tissu productif organisé autour de l’« or noir » s’avère d’autant plus difficile que les énergies renouvelables peinent à tenir leurs promesses.

Image issue de la série « The Shetland Project » du collectif de photographes britanniques Map6, 2019
© Mitch Karunaratne, Map6 Collective
Sur l’île principale des Shetland, à 180 kilomètres au nord des côtes écossaises, le propriétaire d’un petit restaurant indien rêve d’ailleurs. « Il faut partir, il n’y a plus rien à faire ici. C’était très vivant il y a quelques années, mais désormais c’est fini. » Arrivée en 1984 à l’heure du boom du pétrole, sa famille a ouvert deux établissements sur l’archipel. L’un à Brae, petit village portuaire situé tout près de l’immense terminal pétrolier et gazier, et l’autre à Lerwick, la capitale de l’archipel. À l’époque, les lieux crépitent d’activité et l’argent coule à flots. De très importants gisements ont été découverts au début des années 1970 en mer du Nord et font, depuis, le bonheur de Shell et de BP. Quant à la collectivité locale, elle aussi s’est assurée de toucher sa part du gâteau. Depuis le début des forages, chaque baril transitant par l’archipel fait ainsi l’objet d’une taxe versée à l’autorité des Shetland par le biais d’une fondation — soit le résultat d’un accord financier unique au Royaume-Uni, imposé aux majors pétrolières pour compenser les désagréments engendrés par le terminal.
En quarante ans, la collectivité s’est ainsi constitué un véritable trésor de guerre sur le dos des géants des hydrocarbures. Au total, près de 320 millions de livres (365 millions d’euros) ont garni les poches de cet archipel d’à peine vingt-trois mille habitants. De quoi permettre à la fondation de financer des associations culturelles, de rémunérer du personnel soignant pour prendre en charge les personnes âgées et handicapées, ou encore d’ériger pas moins de huit piscines et même un centre culturel à la pointe du chic, que l’on croirait tout droit sorti d’un quartier branché de Londres. « On pouvait s’offrir la crème sur le gâteau, c’est-à-dire ce dont on n’avait pas vraiment besoin mais qui nous faisait envie », résume la propriétaire d’un bed and breakfast de Lerwick, ex-conseillère municipale.
Cette période faste a cependant connu une fin brutale avec la chute du prix du pétrole en 2014. Au cours (…)
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