Entre 2021 et 2024, l’Ifremer et le laboratoire EPOC ont analysé les eaux et les coquillages de 30 sites côtiers français. Des dizaines de substances chimiques, pour la plupart non réglementées, polluent l’ensemble du littoral. Des pesticides interdits, des résidus de médicaments, des antifoulings marins, le tout dans des proportions qui pourraient menacer la biodiversité et la santé humaine.
Sous la surface paisible des côtes françaises, c’est un cocktail chimique permanent que révèle une étude conjointe de l’Ifremer et du laboratoire EPOC, relayée par Le Monde. Menée sur trois ans, elle révèle la présence massive de substances organiques d’« intérêt émergent », parmi lesquelles des pesticides obsolètes et des médicaments d’usage courant, détectés sur l’ensemble des zones surveillées. En moyenne, 15 substances sont identifiées par site, parfois jusqu’à 80 % d’entre elles sur certains littoraux.
L’atrazine, interdite en France depuis 2003, est encore omniprésente, retrouvée dans 70 % des analyses. On y croise aussi du paracétamol, de la carbamazépine ou de l’oxazépam, tous passés des boîtes à pharmacie aux estuaires. « Il nous manque encore des seuils robustes pour ça », reconnaît Isabelle Amouroux, responsable de l’unité « contamination chimique » à l’Ifremer. Autrement dit, on connaît les intrus, mais pas leurs effets concrets sur les écosystèmes ni sur notre santé.
Face à cette pollution invisible, les scientifiques appellent à renforcer la surveillance et à intégrer ces contaminants dans les normes environnementales. Car aujourd’hui, la réglementation laisse ces molécules voguer librement. « Si ce travail aboutit à intégrer ces polluants d’intérêt émergent dans la surveillance du littoral, ce sera une belle victoire », espère Marc Valmassoni, coordinateur eau et santé à la fondation Surfrider Europe.