4 intox climatiques qui ont fait le buzz


À chaque vague de froid, les climatosceptiques y voient une nouvelle « preuve » que le climat ne change pas. Pourtant, ces épisodes s’inscrivent dans la perturbation globale du climat. Dans un contexte où fausses informations et rumeurs circulent plus vite que les données scientifiques, démêler le vrai du faux devient essentiel. Debunk.

Plus de six ans après, on se rappelle de la séquence lunaire du 6 mai 2019 sur le plateau « L’heure des pros » de Pascal Praud où Claire Nouvian avait du faire face au sexisme et au climatoscepticisme. En 2025, on s’attaque à 4 intox qui avaient à l’époque fait le buzz et qui continuent aujourd’hui d’alimenter le scepticisme climatique. 

FAKE #1 : « Les vagues de froid montrent que le climat ne change pas »

À écouter les climatosceptiques, il suffirait de regarder par la fenêtre pour se faire une idée de l’état du climat… Pourtant, les vagues de froid intensif sont également une conséquence de la perturbation globale du climat.

Exemple de sophisme populaire

En Europe et aux États-Unis, certaines vagues de froid ont pour cause l’augmentation rapide des températures au niveau du pôle nord (augmentation deux fois plus rapide qu’au niveau mondial). Pendant que l’Arctique se réchauffe, les vents de haute altitude (courant-jet), qui dépendent de la différence entre l’air froid de l’Arctique et l’air tropical chaud ralentissent et deviennent plus sinueux. Alors que le vortex polaire se déstabilise, le phénomène favorise des descentes froides sur les continents de l’hémisphère nord, mais également des anomalies de températures positives.

Quelques journées particulièrement froides n’empêchent d’ailleurs pas que les hivers, tout comme les étés, aient tendance à se réchauffe. Ainsi, la France connaît de moins en moins de jours de gel. Sur la période 1951-2000, on note « une diminution du nombre de jours de gel en hiver […] de l’ordre de 3 à 4 jours tous les 10 ans à Toulouse et de 4 à 5 jours à Nancy[…] »,  selon Météo FranceLes vagues de froid ne sont donc absolument pas incompatibles avec une hausse globale des températures moyennes. Toutes les études scientifiques sur ces questions ne laissent d’ailleurs aucun doute là-dessus.

Lorsque le courant-jet s’affaiblit, il forme des ondulations favorables aux épisodes hivernaux froids. Source : NASA

FAKE #2 : « L’activité solaire est la principale cause des variations des températures »

Selon cet « argument » très courant chez les sceptiques, le soleil serait la principale cause des variations des températures. L’argument est utilisé pour déresponsabiliser les êtres humains et mettre en doute le rôle qu’ils jouent dans le changement climatique en cours. Certains prédisent même des années froides dans les prochaines années en raison de l’affaiblissement de l’activité solaire…

Or, si les cycles du soleil jouent un rôle indéniable dans les variations de température, ces cycles n’ont qu’un rôle secondaire et minime dans le réchauffement en cours. Selon la NASA, les radiations solaires seraient tout au plus à l’origine d’une hausse des températures de l’ordre de 10 % au cours du 20e siècle.

Si le hoax continue à faire le bonheur des forums, c’est que, dans les années 1990, plusieurs études font le lien entre variations des rayonnements solaires et variations des températures terrestres. Mais depuis, de nouvelles études ont largement battu en brèche ces premières conclusions. Aujourd’hui, il n’existe pas de modèle climatique qui puisse expliquer la hausse des températures actuelle sans y inclure l’effet de serre qui se renforce avec les activités humaines.

FAKE #3 : « Il n’y a pas de hausse des températures »

Capture d’écran sur le site Wikistrike.

Autre rumeur souvent partagée, la supposée absence d’évidence en ce qui concerne la hausse des températures. Des sites – plus ou moins connus – publient régulièrement des articles allant en ce sens, au mépris de toutes les évidences scientifiques accumulées toutes ces années et alimentant ainsi diverses théories du complot.

Par exemple, en 2018, c’est une étude réalisée par Frank Lansner et Jens Olaf Pepke Pedersen et publiée dans la Revue Energy & Environment qui était reprise pour alimenter cette idée. La revue en question est critiquée pour la très faible évaluation par des pairs avant publication. En effet, la valeur d’une publication scientifique dépend grandement de l’observation par une série d’autres scientifiques qui peuvent confirmer (ou pas) la méthodologie et le sérieux de l’étude. Par ailleurs, la revue est connue pour multiplier les études mettant en cause le changement climatique. Mais comment pourrait le savoir un lecteur d’une telle étude si personne ne l’en informe ?

Autre exemple, en 2015, une enquête a révélé que le chercheur américain Willie Soon, principal scientifique animant le scepticisme climatique aux USA, a reçu des fonds importants – plus d’un million de dollars – de l’industrie pétrolière durant toute sa carrière. Ses travaux sont pourtant toujours brandis en exemple par les sceptiques du monde entier, notamment sur de nombreuses vidéos publiées sur Youtube. Vincent Courtillot, référence du climatoscepticisme à la française, reconnaît recevoir des fonds du pétrolier Total, mais estime que ceci n’influence pas ses travaux…

Quoi qu’on en dise, il existe aujourd’hui un consensus scientifique écrasant en ce qui concerne la question. Les quelques études qui n’établissent pas de hausse des températures sont minoritaires et sur nombre d’entre elles, il existe des doutes importants d’influence par l’industrie pétrolière. Par ailleurs, des résultats différents peuvent s’expliquer pour des raisons de méthodologie ou des erreurs.

Une enquête (2021) a analysé 88 125 articles sur le climat publiés entre 2012 et novembre 2020, et conclut que « le consensus scientifique exprimé en proportion du total des publications évaluées par des pairs dépasse 99 % ».

Selon le GIEC, la hausse des températures actuelle est d’ores et déjà de l’ordre +1°C par rapport à l’ère préindustrielle et augmente de 0,2°C par décennie.

FAKE #4 : « Selon la NASA, il n’y a pas de changement climatique »

Dans une tribune publiée sur le média belge La libre, le polémiste Ludovic Delory, co-auteur de Climat : 15 vérités qui dérangent (Éd. Texquis, 2013) et rédacteur en chef de Contrepoints – site d’information en ligne d’inspiration libérale et qui s’est fait une spécialité de publier des articles qui remettent en cause le changement climatique – affirme que la NASA serait bien plus nuancée quant à la réalité du changement climatique. Il écrit : « Lisez les données brutes de la Nasa et ne vous contentez pas des « rapports pour décideurs » du Giec. Vous y trouverez une réalité bien plus nuancée ».

Son allégation, basée sur une interprétation toute personnelle et non scientifique, cherche à créer le doute en ayant recours à un procédé simple : renvoyer à une autorité scientifique reconnue, qu’importe si l’autorité en question a réellement tenu de tels propos. La méthode est particulièrement malhonnête, car rares sont ceux qui vérifieront ce que dit réellement l’autorité en question.

Ce que dit vraiment la NASA. Source : climate.nasa.gov

Mais que dit vraiment la NASA ? L’agence américaine reprend les principales conclusions du GIEC et indique que :

« La tendance de réchauffement actuelle est particulièrement significative, puisqu’elle est essentiellement (à une probabilité de 95 %) le résultat des activités humaines depuis la moitié du 20e siècle et a lieu à un rythme sans précédent depuis des décennies voire des millénaires ».

Les recherches menées par la NASA concluent également à la fonte spectaculaire de l’Antarctique et suggèrent que le réchauffement des océans pourrait augmenter la fréquence de tempêtes extrêmes. Les données brutes de la NASA sont tout aussi claires : la température moyenne globale a augmenté de 1 °C entre 1880 et aujourd’hui.

Autrement dit, la NASA ne met à aucun moment en doute la réalité du changement climatique.

Une guerre de l’information

Vérifier les informations qui circulent concernant le réchauffement climatique (comme de nombreux sujets faisant polémique) est une démarche longue et laborieuse. Ici, nous venons de vérifier 4 intox qui circulent sur les réseaux sociaux dans l’intérêt de préserver le modèle social actuel.

Manifestation du 1er mai 2024. Paris. Flickr.

Quatre intox seulement, et pourtant, ceci représentante plusieurs heures de travail, de recherches, de vérifications. Comme nous l’expliquions dans un récent article, la loi de Brandolini : démentir une intox prend 10 fois plus d’énergie que de la diffuser. Puisqu’il est largement plus facile de distiller une contre-vérité séduisante, nos précédents dossiers sur les Boomer Traps, la désinformation et les procédés rhétoriques le confirment : vigilance et esprit critique sont indispensables.

Mr Mondialisation


Photo de couverture : Ivan Rioufol. Climatosceptique notoire. Wikimedia.

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