Des châteaux de sable high-tech dans le désert saoudien, par Lise Triolet (Le Monde diplomatique, décembre 2025)


Derrière l’utopie futuriste

C’est un grand projet censé aboutir à la plus impressionnante réalisation mondiale de la première moitié du siècle. Avec ses villes avant-gardistes, ses énergies renouvelables et ses multiples innovations, Neom incarne les ambitions modernisatrices du très autoritaire prince héritier d’Arabie saoudite Mohammed Ben Salman (« MBS »). Pour l’instant, faute de réalisme et de cohérence, la montagne n’accouche que d’une souris.

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Simulation numérique du projet The Line réalisée par le service de presse de Neom, 2025

© NEOM Company

La longue route qui mène de la ville saoudienne de Tabouk à la mer Rouge est déserte. De vastes étendues arides laissent progressivement place à des formations rocheuses. Les fermes bédouines s’étendent sur des steppes clairsemées, où seules quelques touffes d’herbe résistent à la chaleur. Sous un soleil écrasant, des troupeaux de dromadaires apparaissent, guidés par des chameliers, la tête et le visage protégés par leur keffieh. Longtemps, la survie a dépendu de l’élevage nomade et de l’exploitation des ressources marines. Les Bédouins parcouraient le désert en quête de points d’eau. Aujourd’hui, ils se sont installés dans des villages, mais les projets pharaoniques du royaume leur infligent de nouveaux bouleversements. De fait, cette région du nord-ouest de l’Arabie saoudite est au cœur de la transformation économique et urbaine du pays voulue par le prince héritier de 40 ans, M. Mohammed Ben Salman, dit « MBS », fils du roi Salman Ben Abdelaziz Al-Saoud. Baptisée Neom, une nouvelle zone de développement s’étend du golfe d’Akaba jusqu’aux montagnes de l’intérieur, sur 26 500 kilomètres carrés — soit l’équivalent de la Belgique. Le nom, devenu une marque déposée, signifie « nouveau futur » : un pléonasme formé du préfixe grec neo- et de la première lettre du mot moustaqbal, « futur » ou « avenir » en arabe.

Un des plus vastes chantiers du monde

C’est ici que le royaume ambitionne de bâtir une mégapole ultratechnologique au cœur d’un ensemble urbain destiné à dépasser, en matière d’innovation, des villes connectées à l’architecture futuriste comme Songdo en Corée du Sud ou Woven City au Japon. Aéroports, marinas, hôtels de luxe, trains à grande vitesse, tours de verre et d’acier pour accueillir des entreprises et des centres d’affaires, bases logistiques et canaux maritimes : rien n’est censé y manquer.

Pour l’heure, le paysage demeure stérile, des pelleteuses creusent la terre, et des poids lourds vont et (…)

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