La pandémie de Covid-19 a non seulement mis à rude épreuve les systèmes de santé mondiaux, mais elle a aussi révélé des failles profondes dans la gouvernance scientifique et politique. Cinq ans après les premiers confinements, des révélations récentes au Royaume-Uni mettent en lumière un conflit d’intérêts majeur au sein des comités d’experts qui ont guidé les décisions publiques. Ce scandale, impliquant des subventions massives non déclarées de la Wellcome Trust, soulève des questions sur l’intégrité des conseils scientifiques. En France, où les mécanismes de décision ont été tout aussi opaques, ces événements invitent à un parallèle troublant : l’absence de transparence sur les données, la science et les processus décisionnels a érodé la confiance citoyenne et potentiellement biaisé les politiques sanitaires. Retour sur ces dysfonctionnements et leurs conséquences durables.

Le scandale britannique : 210 millions de livres non déclarés par les conseillers Covid
Au cœur de la réponse britannique à la pandémie se trouvait le Scientific Advisory Group for Emergencies (SAGE), un groupe d’experts influent qui a conseillé le gouvernement sur les confinements, les vaccins et les restrictions. Selon un rapport publié le 6 décembre 2025 par le Daily Mail, 26 membres de ce comité – sur un total de 149 – ont omis de déclarer plus de 210 millions de livres sterling (environ 250 millions d’euros) de subventions accordées par la Wellcome Trust entre 2018 et 2026. Près de 175 millions de livres ont été versés durant les années critiques de 2020 et 2021, sans figurer sur le registre officiel des intérêts des participants (ROPI).
La Wellcome Trust, l’une des plus grandes fondations philanthropiques au monde avec un dotation de 28 milliards de livres, est un investisseur majeur dans l’industrie pharmaceutique. Elle finance des recherches sur les vaccins et les traitements, mais ses liens avec des géants comme Roche, Novartis ou Johnson & Johnson – qui ont profité de la ruée vers les solutions Covid – posent question. Des figures clés du SAGE, comme le professeur Neil Ferguson (dont les modélisations ont justifié le premier confinement en mars 2020) ou le professeur Gavin Screaton (expert en vaccins), ont reçu des millions sans aucune déclaration de transparence. Ferguson, par exemple, a été un demandeur principal avec 5,6 millions de livres, dont 1,25 million pour des études sur des virus grippaux en Asie, sans mentionner la source.

Cette non-déclaration constitue un « conflit d’intérêts apparent », selon le rapport, qui s’appuie sur les données publiques de la Wellcome Trust. Bien que la fondation soit une entité caritative, ses investissements dans l’industrie pharma (plus de 1,25 milliard de livres dans des entreprises Covid) brouillent les lignes entre philanthropie et intérêts économiques. Des articles antérieurs du BMJ (2021) avaient déjà alerté sur ces chevauchements, soulignant comment Jeremy Farrar, directeur de Wellcome et membre du SAGE, influençait à la fois les politiques et les financements.
Conséquences au Royaume-Uni : érosion de la confiance et appels à la réforme
Les répercussions de ce scandale sont multiples et profondes. D’abord, il alimente une défiance généralisée envers les institutions scientifiques. Des enquêtes comme celle du Guardian (novembre 2025) sur la période Covid, qui a déjà coûté 200 millions de livres, pointent du doigt une « corruption facilitée par les ministres conservateurs », avec des contrats opaques accordés à des amis politiques. Cela renforce les théories conspirationnistes et complique la préparation à de futures crises : comment restaurer la crédibilité des experts quand leurs liens financiers sont occultés ?

Sur le plan sociétal, les conséquences se font sentir dans la vaccination et la santé publique. Le Royaume-Uni, pionnier des vaccins, voit ses taux de couverture vaccinale stagner, avec une hausse des hésitations post-pandémie. Économiquement, les erreurs de modélisation (comme celles de Ferguson, critiquées pour leur pessimisme) ont coûté des milliards en aides Covid frauduleuses – 10,9 milliards de livres selon un rapport BBC de décembre 2025. Politiquement, cela pèse sur le gouvernement Starmer, qui promet des réformes pour plus de transparence, mais les survivants du SAGE risquent des poursuites pour manquement éthique.
Enfin, ce cas illustre un risque systémique : quand la science est financée par des acteurs aux intérêts croisés, les décisions publiques – confinements prolongés, priorisation des vaccins – peuvent favoriser des agendas privés au détriment d’alternatives plus équilibrées, comme les traitements précoces ou les stratégies ciblées.
Le parallèle français : opacité institutionnalisée et science sous cloche
De l’autre côté de la Manche, la France n’a pas été en reste. Si le scandale britannique met l’accent sur les conflits financiers, le modèle français révèle une opacité structurelle, cristallisée autour du Conseil de défense sanitaire (CDSN) et du Conseil scientifique Covid-19. Créé en mars 2020 à la demande d’Emmanuel Macron, ce dernier – présidé par Jean-François Delfraissy – devait « éclairer la décision publique » sans contrainte politique. Pourtant, dès ses débuts, il a été critiqué pour son manque de légitimité : absence de base légale, nominations sans évaluation par les pairs, et chevauchement avec des instances existantes comme la Haute Autorité de santé (HAS) ou le Haut Conseil de la santé publique (HCSP).
Les 35 signataires d’une tribune parue dans un média mainstream – dont des épidémiologistes et médecins – ont appelé à sa « refondation ou suppression », dénonçant un déficit de « transparence, pluralisme et débat contradictoire ». Le conseil, composé majoritairement de Parisiens (10 sur 13), ignorait souvent les voix dissidentes et s’appuyait sur des modélisations contestées.
Pire, des conflits d’intérêt ont émergé : plusieurs membres ont perçu plus de 250 000 euros de laboratoires pharmaceutiques entre 2014 et 2019, selon la base Transparence Santé, sans que cela n’altère leur influence sur les recommandations vaccinales.

Quant au CDSN, réuni 32 fois durant la crise, il opérait en huis clos sous le sceau du « secret défense ». Classés confidentiels pour 50 ans, ses débats – impliquant Macron, Castex et Véran – échappaient à tout contrôle parlementaire. Des médias comme Challenges (2020) et Le Figaro (2021) ont décrit ces réunions comme un « comité secret » où les décisions (confinements, passes sanitaires) étaient prises sans comptes-rendus publics. L’opposition, de Mélenchon à Braun-Pivet (LREM), réclamait une instance plus transparente, à l’image du Conseil de défense écologique, sans que la conviction ni l’action ne soit au rendez-vous. Même Olivier Véran promettait une « opération transparence » en 2020, mais les données brutes sur les hospitalisations ou les effets secondaires des vaccins restaient inaccessibles, favorisant les soupçons de manipulation statistique et de mensonges.
Conséquences en France : défiance sociétale et leçons pour l’avenir
Ces opacités ont eu des effets dévastateurs. La crise de confiance est flagrante : sondages post-pandémie montrent une chute de 20 % de la confiance dans les institutions scientifiques, avec une hausse des mouvements anti-vax et des théories du complot.
Un sondage récent réalisé par l’Institut MIS Group pour France-Soir et BonSens.org, auprès de 1200 Français le 30 novembre 2025, illustre parfaitement que les Français ne sont pas dupes de ces dysfonctionnements.

Ainsi, 49 % désapprouvent la gestion gouvernementale de la crise sanitaire, tandis que 47 % affirment avoir perdu confiance dans la vaccination en raison des « mensonges » des autorités. Plus frappant encore, 81 % rejettent la nouvelle campagne de vaccination Covid, marquant une « fracture durable du contrat de confiance sanitaire », comme le souligne l’étude. De même, 56 % estiment que les médias ont mal informé sur les risques vaccinaux, et 49 % croient que le ministère de la Santé et l’industrie pharmaceutique ont « caché la réalité sur la nocivité des vaccins ». Ces chiffres, avec une marge d’erreur de ±3,1 %, confirment une méfiance ancrée : opposition record à 59 % pour certaines vaccinations, et 37 % des vaccinés rapportant des effets secondaires.

Cette défiance s’inscrit dans un « cercle vicieux » plus large, comme l’analyse ce sondage qui mesure une défiance de 74 % envers le gouvernement français, 64 % remettant en cause l’objectivité des médias mainstream (comme TF1, France TV ou BFM), et une perméabilité à 51 % aux théories du complot.

Sur le plan sanitaire, 49 % estiment que le ministère de la Santé et l’industrie pharmaceutique ont dissimulé la nocivité des vaccins, tandis que 30 % croient que des traitements précoces comme l’hydroxychloroquine ont été délibérément discrédités pour favoriser les vaccins. De plus, 59 % perçoivent la justice comme non indépendante et au service du pouvoir politique, et 41 % affirment que « les médias mainstream et les leaders politiques mentent systématiquement pour protéger les intérêts des élites, et qu’il faut se fier aux sources alternatives sur internet ».

De plus, 53 % ne consomment plus les médias traditionnels, préférant les alternatives (45 %), ce qui alimente un vide informationnel fertile aux narratifs conspirationnistes. Comme l’explique l’étude : « La perte de confiance dans l’exécutif et la justice n’est pas un phénomène marginal, mais une réalité partagée par une large majorité de Français. Les médias traditionnels ont perdu leur rôle de confiance. Ce vide créé par le manque de confiance et d’information est un terrain fertile où les narratifs alternatifs prospèrent, avec plus d’un Français sur deux se déclarant perméable. »
Sociétalement, les confinements « enfermés » dans le CDSN ont exacerbé les inégalités – fermetures d’écoles, explosion de la santé mentale – sans évaluation rigoureuse, comme l’a analysé France-Soir (2024) sur la « détournement de la science ». Économiquement, le coût est estimé à 200 milliards d’euros, avec des erreurs comme le maintien des élections municipales en mars 2020 (malgré les alertes du Conseil scientifique) ou l’ignorance d’études sur l’immunité naturelle. Politiquement, cela a alimenté les crises, culminant avec les manifestations contre le pass sanitaire en 2021.
Aujourd’hui, l’absence de commission d’enquête indépendante – contrairement au Royaume-Uni – laisse des cicatrices : une science perçue comme « capturée » par l’exécutif, et une démocratie sanitaire fragilisée.
Vers une transparence restaurée ?
Le scandale britannique et son écho français rappellent que la science au service du public exige des garde-fous : registres obligatoires de conflits d’intérêts, accès ouvert aux données, et débats pluralistes.
En 2025, avec les menaces agitées par les autorités de d’autres pandémies et l’absence de transparence sur les données de santé, il est urgent de réformer.
La Wellcome Trust pourrait auditer ses financements et surtout son retour sur investissement en termes de perte de confiance plutôt qu’en bénéfices.
En France, une enquête complète avec contrôle parlementaire et citoyen s’impose. Elle devrait inclure d’autres personnes que ceux qui ont fait montre d’un « suivisme à tout égards » des décisions des autorités sanitaires comme Mathieu Molimard et tant d’autres. Aujourd’hui auréolées de Légions d’honneur ou incluses dans des missions pour lutter contre la désinformation en santé, ces personnes sont les principaux pourvoyeurs de fausses informations qui entraine une réelle perte de confiance par manque de transparence, d’objectivité ou ayant des liens d’intérêts avec les labos.
Cela entraine une véritable dérive déontologique au détriment des patients, comme le montre une enquête récente sur un pharmacologue renais au cœur d’un scandale de partialité, une dérive qui pourrait hypothéquer la formation des futurs cliniciens.
Sans cette mise à plat, ce-bureau-enquête accident pour reprendre les termes de l’industrie du transport aérien, la prochaine crise risque de nous trouver encore plus divisés, prouvant que l’opacité n’est pas seulement un vice administratif, mais un poison pour la société.
