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L’esprit critique « littérature » : désarmer la violence par l’écriture

ByVeritatis

Mai 26, 2024


Un tueur de femmes dominical, une tentative d’assassinat sur un écrivain et une dérive interlope entre littérature, alcool et amour. Tel est le programme du centième numéro de « L’esprit critique » depuis sa création. On évoque trois livres récents : d’abord L’Assassin du dimanche, signé Leslie Kaplan et publié aux éditions P.O.L. Ensuite le nouveau livre de Simon Johannin, intitulé Ici commence un amour, que font paraître les Éditions Allia. Et on revient enfin sur l’événement éditorial de ce printemps, à savoir la parution du nouveau livre de Salman Rushdie, Le Couteau, qui vient de paraître chez Gallimard.

« Ici commence un amour »

Ici commence un amour est le nouveau livre publié aux Éditions Allia de Simon Johannin, déjà remarqué pour deux romans tournant autour de vies précaires, L’Été des charognes (2017) et Nino dans la nuit (2019) – écrit avec Capucine Johannin –, ainsi que plusieurs recueils de poésie. 

Il plante ici son décor à Marseille dont il fait un laboratoire des travers de notre époque et notamment des violences envers les corps fragiles et marginaux. Théo, jeune écrivain ayant un peu de succès mais continuant une vie précaire, alter ego de Simon Johannin, passe d’un bar à l’autre, d’un lit à l’autre, du jour à la nuit, de la rue à des endroits plus feutrés, avec à chaque fois pas mal d’alcool, de drogue, mais surtout des rencontres, d’amis, d’inconnus et enfin de Gloria, l’« amour » du titre de l’ouvrage, avec lesquels il dialogue sur les grandes questions sociétales contemporaines : la violence que le capitalisme fait au corps, celles que les hommes exercent sur les femmes, la transition de genre…

« L’Assassin du dimanche »

« C’était un drôle de moment. Il y avait des signes de toutes sortes, mais les repères se perdaient, oppression partout, nouvelles dominations qui se mettaient en place, la contestation se transformait, mouvements nouveaux qui s’ajoutaient aux anciens, les mots manquaient souvent pour dire de quoi il s’agissait, une insatisfaction générale, les hommes, les femmes, les jeunes, les vieux, toutes les professions, des agriculteurs aux cinéastes, des bouchers aux employés de bureau, des professeurs aux prostitués, bien entendu tout le monde se plaignait du manque de perspectives, des projets il y en avait, mais les moyens, on ne voyait pas, pas du tout, c’étaient des questions dans tous les sens, mais pas coordonnées, légitimité du pouvoir, valeur de la recherche, ce n’étaient pas des problèmes techniques, on ne saisissait pas les liens entre les différentes parties de la société, on ne voyait pas de commun, quelque chose se terminait, mais sans calme, au contraire, de la guerre sans arrêt, ouverte ou larvée. La fin d’un système, peut-être ? » Ainsi débute le nouveau livre aussi bref que singulier signé Leslie Kaplan et publié par les éditions P.O.L.

« Le Couteau. Réflexions suite à une tentative d’assassinat »

Le Couteau constitue l’événement éditorial de ce printemps puisque Salman Rushdie y revient sur la tentative d’assassinat dont il fut victime trente-trois ans et demi après la fatwa lancée contre lui par l’ayatollah Khomeini à la suite de la publication des Versets sataniques. Le célèbre écrivain a survécu presque miraculeusement aux coups de couteau reçus en vingt-sept secondes. Il en est sorti à l’article de la mort, grièvement blessé, perdant notamment son œil droit.

Le livre publié aux éditions Gallimard et traduit par Gérard Meudal est constitué à la fois du récit de l’agression, d’une déclaration d’amour de l’écrivain adressée à sa compagne, du récit de sa convalescence, d’une réflexion sur la vengeance, qui est un plat qui se mange décidément froid, et aussi d’un étrange dialogue fictif entre le narrateur et son agresseur.

« C’est vraiment le passé qui revient, mon propre passé qui fonce sur moi, non pas un gladiateur dans un rêve, mais un homme masqué armé d’un couteau qui tente d’appliquer une sentence de mort vieille de trois décennies », écrit Rushdie.

On discute de ces trois livres avec :

  • Lise Wajeman, professeure de littérature comparée, qui chronique l’actualité littéraire pour Mediapart 
  • Blandine Rinkel, à la fois écrivaine, critique et musicienne
  • Et Youness Bousenna, qui chronique l’actualité littéraire pour Télérama

« L’esprit critique » est un podcast proposé par Mediapart, enregistré dans les studios de Gong et réalisé par Karen Beun.



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