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De la mer partagée à la mer morcelée, par Philippe Leymarie (Le Monde diplomatique, juin 2024)

ByVeritatis

Juin 13, 2024


Course aux armements dans le bassin méditerranéen

Cimetière marin pour les migrants, lac pour cohortes de touristes en quête de repos balnéaire, « Mare nostrum » concentre un nombre croissant de tensions. Les flottes militaires des pays riverains et des grandes puissances s’y croisent et se défient, tandis que chaque capitale entend découper les zones maritimes à son avantage au risque de provoquer un affrontement avec ses voisins.

Un vieux carrefour où se sont « en­tassées des civilisations les unes sur les autres », selon la formule de l’historien Fernand Braudel, telle est la Méditerranée : un condensé de passions entre riverains du nord et du sud, Israéliens et Palestiniens, chiites et sunnites, Arabes et Africains ; un bassin fermé entouré d’une vingtaine d’États ; 8 % de l’espace maritime global par où transitent un quart du commerce mondial et deux tiers des flux d’énergie à destination des pays européens. C’est une mer parcourue de tubes et de câbles sous-marins, corridor entre l’Atlantique (par le détroit de Gibraltar), l’océan Indien ou le Pacifique (par le canal de Suez et la mer Rouge), et la mer Noire (par le détroit du Bosphore). Enjeu de pouvoir, théâtre d’un jeu de puissances, foyer de crises multiples qui s’enflamment désormais sur fond d’une « multipolarité chaotique sans précédent », analyse Jean-Michel Martinet. Le chercheur associé à la Fondation méditerranéenne d’études stratégiques (FMES) y voit « à la fois un pont et un tampon entre deux mondes : les pays de la rive nord — riches, postmodernes, à la population vieillissante — et les pays de la rive sud, confrontés à des difficultés économiques, démographiques, sociales et politiques ».

« D’espace partagé, la Méditerranée est devenue un espace contesté », relevait le rapport d’information établi juste avant l’invasion de l’Ukraine par les députés français Jean-Jacques Ferrara et Philippe Michel-Kleisbauer, lesquels dénombraient plusieurs sources de tensions : stratégies et rivalités de puissance (Russie, Occident, Chine), logiques de « déni d’accès » (Russie, Syrie, Turquie), remise en cause du statu quo de conflits « gelés » (Chypre, Sahara occidental), répliques sans fin de la guerre civile libyenne dans les pays du Sahel (Mali, Burkina Faso, Niger). Depuis, les cartes ont été rebattues : le conflit russo-ukrainien fait rage à l’est de l’Europe et au bord de la mer Noire, qui a la Méditerranée pour unique débouché ; la cinquième guerre de Gaza ; une Arménie (…)

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