Recherche française en Antarctique, une ambition négligée, par Clémence Guetté (Le Monde diplomatique, novembre 2024)


Pour aller en terre Adélie, il faut endurer 2 700 kilomètres de navigation, une semaine depuis la Tasmanie dans les mers les plus imprévisibles du globe. La durée de la traversée sur L’Astrolabe est variable, selon les humeurs des « quarantièmes rugissants », « cinquantièmes hurlants » et « soixantièmes aphones ». On doit s’habituer aux mouvements de l’océan, tenir ses couverts pendant les repas et se caler dans sa couchette pour ne pas en être éjecté la nuit. C’est le périple que nous avons eu la chance d’entreprendre en décembre dernier, pendant un mois de pause parlementaire, avec le groupe d’études sur les pôles à l’Assemblée nationale, à l’invitation de l’Institut polaire français Paul-Émile-Victor (IPEV). Après plusieurs exercices budgétaires lors desquels la recherche dans ces zones extrêmes a été sous-dotée, avec la crise inflationniste qui affecte le plus gros poste de dépense, c’est-à-dire, le fioul, nous sommes allés constater sur place les contraintes des chercheurs et l’utilité de leurs résultats.

À l’approche du continent, les repères se brouillent. Les icebergs tabulaires surprennent les sens par leurs dimensions, jusqu’à plusieurs kilomètres, à tel point qu’on confond ces géants avec la silhouette du continent à l’horizon. Il faut s’habituer à voir en blanc, bleu, gris ; pas d’arbres, d’herbe, de mousse ; se familiariser avec les silences profonds, brusquement zébrés de gigantesques craquements quand des glaciers se fissurent et vêlent. Et oublier le bourdonnement incessant de l’hélicoptère survolant la base scientifique française pour décharger les tonnes de fret indispensables à la vie et à la survie en isolement de ceux qui se préparent à hiverner, pour de longs mois, à la base scientifique française Dumont-d’Urville.

Leur décor est fait de bâtiments épars, aux toitures rouges visibles de loin, montés au fil des missions depuis 1956. Lieux de vie collective où l’on ne pénètre qu’en chaussons, laboratoires de biologie, de sismologie, local informatique, hangars de stockage pour les vivres, les outils, les (…)

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