• ven. Sep 20th, 2024

La Rochelle haut-lieu de la lutte antibassines


La Rochelle (Charente-Maritime), reportage

À l’ombre de tracteurs venus à petite vitesse depuis l’île de Ré voisine, deux cents paysans, activistes de l’eau et faucheurs volontaires d’OGM ont bloqué les hangars de la coopérative céréalière Soufflet dans le port de La Rochelle, dès 6 h 45 samedi 20 juillet. Leur but : paralyser un des principaux bénéficiaires du système des mégabassines. Ce blocage matinal, suivi d’une manifestation encadrée par une forte présence policière et marquée par des dégradations, constituait l’un des points d’orgue de la semaine d’action antibassines en Poitou-Charentes qui ont rassemblé, en tout, près de [10 000 personnes selon les organisateurs>https://lessoulevementsdelaterre.org/depuis-la-terre-et-la-mer-10-000-personnes-tracteu].

« Notre objectif final, c’est de venir ici au bout de la filière [céréalière], a rappelé au petit matin Anna [1], la voie cassée par une nuit trop brève, entourée de visages barrés de masque à gaz, lunettes de plongés, massés au cœur du port industriel de La Rochelle.

Les forces de police étaient présentes en nombre vendredi 20 juillet au matin.
© Sylvain Lapoix / Reporterre

Irriguant principalement des exploitations céréalières de grande ampleur, les retenues d’eau de Poitou-Charentes maintiennent sous perfusion un système exportateur de céréales menacé par le manque d’eau et le changement climatique. Un système dont le port Atlantique de La Rochelle, deuxième exportateur de céréales en France, constitue l’un des principaux points d’aboutissement avec, selon les estimations, jusqu’à 50 % de la production régionale envoyés à l’étranger.

Lacrymos et tirs de gendarmes

Ce n’est pas la première fois que les antibassines tentent de pointer ce lien. Le 2 septembre 2023, un groupe de militants d’Extinction Rebellion avait déroulé du haut des mêmes silos leur sablier emblème sur fond rouge et une banderole « L’agro-industrie = la mort ».

Peu avant 10 heures, le blocage avait des airs de pique-nique estival, avec des jeux de cartes à l’ombre des arbres, des banderoles « Non à la spéculation sur les céréales » et des passes de rugby entre jeunes agriculteurs venus du Maine-et-Loire, du Morbilhan ou de Vendée. « Je suis là parce que je ne peux pas faire mon métier sans militer, explique Candice, maraîchère bretonne venue en vélo. « Ce que je dénonce, c’est l’agro-industrie : toutes ces terres concentrées de manière contre-productive. Il faut un moratoire mais aussi replanter des arbres pour ramener de l’eau ! »

Des milliers de manifestants se sont réunis au parc Charruyer de La Rochelle en début d’après-midi.
© Les Soulèvements de la Terre

Dix minutes plus tard, la ligne de gendarmes mobiles bloquant la sortie par le port a revêtu casques et boucliers. « Premières sommations ». « Vous nous demandez d’évacuer mais vous bloquez l’autre sortie : vos ordres sont contradictoires ! » a interpellé un organisateur au mégaphone. Les premières lacrymos n’ont pas tardé à saturer l’atmosphère. Désireuse de rejoindre les autres cortèges de militants dans la Rochelle, l’organisation reculait. Mais les tracteurs lambinaient et les tirs se rapprochaient. Des gendarmes mobiles ont tiré sur l’herbe sèche — faisant craindre un départ de feu, comme ce qu’il s’était passé la veille lors de la manifestation à Saint-Maixent-L’École.

Les militants ont fini par retrouver la manifestation, le long de la Corniche. Deux cortèges étaient prévus, l’un revendicatif et « déter’ », l’autre calme et « familial ». Quelques manifestants — kayakistes, catamarans — ont même tenté une approche par la mer.

« Nous reviendrons tant que ses multinationales détruisent nos vies »

Le premier cortège avait commencé par traverser le quartier de Saint-Maurice, où des affrontements ont eu lieu avec les forces de police et des dégradations ont été commises. Le second avait cheminé le long de la mer, avant de s’arrêter pour une pause baignade au niveau de la Cale de Port Neuf. L’objectif était également de se rapprocher du port. Une fois l’ensemble des manifestants réunis, ils ont été bloqués par les forces de l’ordre et certains ont été gazés. Beaucoup ont préféré se disperser et une bonne partie, dont la fanfare, a terminé sa journée sur la plage du centre-ville, dansant et chantant.

La journée d’action s’est terminée par une grande baignade.
© Jérôme Gilles / NurPhoto via AFP

« Nous avons déployé aujourd’hui différentes manières de bloquer le port de La Pallice. Nous y reviendrons tant que ses multinationales détruisent nos vies, nos fermes, nos bassins versants et ceux des populations de l’autre côté de l’océan », ont conclu les Soulèvements de la Terre dans un communiqué.

Ce blocage de Soufflet constituait l’un des points d’orgue de la semaine d’action antibassines en Poitou-Charentes. Elle a débuté le 16 juillet avec l’inauguration du Village de l’eau à Melle (Deux-Sèvres). Elle s’est poursuivie le vendredi 19 juillet avec une mobilisation à Saint-Sauvant (Vienne) — où devrait être construite la prochaine bassine — et Saint-Maixent-L’École. Elle s’est achevée à La Rochelle, suivant le cycle de l’eau et des bassines.



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