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Au Royaume-Uni, des peines de prison inédites pour le blocage d’une autoroute


Le 7 novembre 2022, des militants de Just Stop Oil ont interrompu, et ce durant quatre jours, le trafic de l’une des autoroutes les plus empruntées d’Angleterre.

22 juillet 2024 à 15h42
Mis à jour le 22 juillet 2024 à 16h10

Durée de lecture : 3 minutes

« Chacun d’entre vous a franchi la ligne qui sépare le militant inquiet du fanatique », a justifié le juge Christopher Hehir. Jeudi 18 juillet, Roger Hallam — cofondateur des mouvements Just Stop Oil et Extinction Rebellion —, Daniel Shaw, Louise Lancaster, Lucia Whittaker De Abreu et Cressida Gethin, âgés de 22 à 58 ans, ont été reconnus coupables de complot en vue de provoquer des nuisances publiques et condamnés à quatre et cinq ans de prison. Il leur est reproché d’avoir participé à une réunion Zoom afin de recruter des activistes pour bloquer la M25, le périphérique encerclant le Grand Londres.

Le 7 novembre 2022 au matin, quarante-cinq militants, veste orange Just Stop Oil sur le dos, escaladaient les portiques le long de la M25, l’une des autoroutes les plus empruntées du pays, forçant la police à arrêter la circulation. Leur demande : que le gouvernement conservateur mette fin à toutes les nouvelles licences pétrolières et gazières, destinées à renforcer la sécurité énergétique du pays dans un contexte d’inflation — un plan qualifié d’illégal et inconstitutionnel par les activistes.

Le blocage a duré quatre jours. Selon l’accusation, plus de 700 000 automobilistes ont été affectés, des vols, des funérailles, des rendez-vous médicaux ont été manqués, tandis qu’elle estime le coût économique global à près de deux millions d’euros.

« Jour sombre »

Ces peines de prison dépassent un nouveau record au Royaume-Uni. Déjà, en avril 2023, deux activistes de Just Stop Oil ont été condamnés à près de trois ans de prison pour nuisance publique. Ils avaient escaladé le pont Queen Elizabeth II à l’est de Londres et étaient restés suspendus dans des hamacs au-dessus du vide pendant 37 heures, bloquant la circulation sur le pont. Des condamnations critiquées par les Nations Unies.

Aujourd’hui, le rapporteur spécial de l’ONU sur les défenseurs de l’environnement, Michel Forst, ne mâche pas ses mots. Le 18 juillet est un « jour sombre » tandis que la condamnation « devrait choquer n’importe quel citoyen et devrait tous nous mettre en alerte sur l’état des droits et libertés civiques au Royaume-Uni ».

Un cadre législatif répressif

Si ces peines inquiètent tant, c’est qu’elles s’inscrivent depuis quelques années dans un cadre jugé liberticide par de nombreuses voix au Royaume-Uni, y compris parfois par celles qui sont en désaccord sur les méthodes utilisées par Just Stop Oil. Elles sont « non pas une anomalie ponctuelle, mais le point culminant de plusieurs années de lois répressives », souligne notamment Greenpeace.

Face à la multiplication des actions des écologistes, le gouvernement a introduit en 2023 le Public Order Act, qui criminalise de façon détaillée toute manifestation susceptible de perturber l’ordre public. Un an plus tôt, le Police, Crime, Sentencing and Courts Act dotait la police de pouvoirs étendus l’autorisant à arrêter des participants qu’elle estime trop bruyants. En outre, des juristes s’alarment des restrictions faites aux droits de la défense des manifestants, comme celle de l’excuse légitime.

Le changement de gouvernement fonde des espoirs. Le nouveau Premier ministre travailliste, Keir Starmer, est sous la pression de l’aile gauche de son parti qui exige des « réparations à notre démocratie », en réaction aux condamnations. Dale Vince, magnat de l’énergie verte et grand donateur du Labour, présent devant le tribunal le 18 juillet, exhorte le locataire du 10, Downing Street à « inverser l’injustice ». Or, Keir Starmer refuse d’intervenir sur la décision de justice et indique que dans l’immédiat, aucune loi ne sera modifiée.



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