Tout ce qui nous sépare, par Grégory Rzepski (Le Monde diplomatique, décembre 2024)


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Juraj Florek. – « Demolition of faculty I » (Démolition de la faculté I), 2021

En être privé, une malédiction ; en avoir, trop souvent un supplice quand le travail donne le sentiment de se noyer dans un océan de tâches abrutissantes, surnuméraires, pénibles, dépourvues de sens. Depuis les années 1980, les gouvernants français contribuent à faire du salariat une expérience de l’injustice. Et consolident cette alternative : ça ou rien.

Cet automne, dans l’automobile, la chimie ou la grande distribution, les annonces de réduction d’effectifs se succèdent. Le ministre de l’industrie Marc Ferracci redoute des disparitions de postes par dizaines de milliers. La secrétaire générale de la Confédération générale du travail (CGT) Sophie Binet table, elle, sur 150 000 suppressions. Pourtant, malgré la conjoncture européenne en berne et l’échec patent de sa politique, le gouvernement accélère : le temps de travail devrait augmenter ; le nombre d’agents, diminuer dans plusieurs services publics — dont celui de l’emploi. Au Parlement, une majorité très relative défend, encore et toujours, les allégements de cotisations sociales. Cette mesure inefficace — qui consiste à dispenser partiellement les employeurs de leur obligation de payer les salariés puis de refacturer l’exonération à l’État — a coûté 80 milliards d’euros aux finances publiques en 2023, c’est-à-dire au contribuable

Les dirigeants français s’acharnent à abaisser le « coût du travail » (les salaires et la protection sociale) au nom de la compétitivité. Cette politique toujours échoue, à défendre l’emploi de qualité comme à doper les exportations — hormis de rares produits, dans le luxe, l’aéronautique… Les entreprises, elles, conduisent leurs propres stratégies low cost : elles délocalisent, sous-traitent, évincent les salariés âgés et intensifient le travail de ceux qui restent. La pression s’accroît aussi sur les fonctionnaires — toujours plus « évalués » et dévalués — ainsi que sur les chômeurs — toujours plus contrôlés et moins indemnisés. Car des économies sur le budget de l’État comme sur celui de l’assurance-chômage (…)

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