Un cinéma post-traumatique, par Pierre Conesa (Le Monde diplomatique, janvier 2025)


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Dinh Q. Lê. – « Persistence of Memory #14 » (Persistance de la mémoire n° 14), 2000-2001

© The Estate of Dinh Q. Lê

Dans le sous-sol du commissariat d’une petite bourgade du nord-ouest des États-Unis, des policiers maltraitent un vétéran vagabond que le shérif du coin a pris en grippe. Ainsi s’emballe l’action de Rambo (1982). Campé par Sylvester Stallone, John J. Rambo oppose une résistance passive et muette, mais quand l’un des agents brandit un rasoir, le souvenir des tortures subies par le soldat lorsqu’il était prisonnier des Vietnamiens resurgit. La suite est connue. Rambo se déchaîne, s’échappe dans les bois et finit par détruire la moitié de la ville avant de se rendre au colonel Trautman, son ancien supérieur.

En 1978, déjà, Voyage au bout de l’enfer, de Michael Cimino, mettait en scène trois ouvriers de retour du « ’Nam » en proie à des troubles physiques et, surtout, psychologiques. Si nul n’ignorait les conséquences psychiques des guerres, la catégorie des troubles de stress post-traumatique (ou TSPT) s’applique pour la première fois aux vétérans de l’intervention américaine au Vietnam (1965-1975), pour connaître ensuite un succès sans précédent. Impossible d’évoquer un conflit sans aborder la question. Même les auteurs d’atrocités ont droit à cette attention, comme en témoignent une série d’articles sur les TSPT endurés par des soldats israéliens participant aux destructions de Gaza. Si, dans le film de Cimino, le personnage de Mike (joué par Robert De Niro) semble enclin à renoncer à la violence lors de son retour au pays, tel n’est pas le cas de trois autres grands guerriers cinématographiques — sujets aux TSPT si l’on s’en tient à leurs multiples performances de baroudeurs.

Dans Rambo II. La Mission (1985), Stallone redonne de la fierté aux Américains qui pansent les plaies du « bourbier » vietnamien (2,3 millions de GI y ont servi). Son personnage passe ainsi du statut de paria à celui de héros capable à lui tout seul de rejouer la guerre du Vietnam. « Cette fois, on y va pour gagner ? », demande-t-il au colonel Trautman, qui lui répond : « Cette fois, ça dépend de (…)

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Pierre Conesa

Ancien haut fonctionnaire au ministère de la défense, auteur de Hollywar. Hollywood, arme de propagande massive, Robert Laffont, Paris, 2018.



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