L’arbre dragon témoin d’un passé interdit à Socotra, par Quentin Müller (Le Monde diplomatique, janvier 2025)


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Un arbre dragon immortalisé en pleine nuit dans la forêt de Firmihin

Quentin Müller, 202

De petits moutons aux oreilles pendantes et à la laine noire bouclée formant des anglaises s’abritent avec peine sous un abri de pierre. MM. Saad Ahmed Souleymane et Issa Azazin Ghulam observent le mauvais temps s’emparer du ciel depuis leurs huttes de fortune. Les quelques familles du clan Sohbi se sont réfugiées sur ce bout de falaise il y a neuf ans, après le passage de deux puissants cyclones surnommés Megh et Chapala. La terre sur laquelle ils vivent est d’un rouge sombre. La roche, omniprésente, est tranchante comme des lames de rasoir. Sur les hauts plateaux de Socotra, pas grand-chose ne pousse si ce n’est de curieux arbres aux branches tentaculaires. « Je connais tous ceux du coin. Ils étaient là avant ma naissance et ils seront là après ma mort », affirme M. Souleymane.

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Ahmed Saeed Suliman Abdullah, ornithologue socotri, constate sur le plateau de Diksam la disparition des arbres dragons après les cyclones de 2015

Quentin Müller, 202

Depuis le petit hameau de Sadaqa s’ouvre une vue imprenable sur une autre falaise et sur Firmihin, la dernière grande forêt d’arbres dragons de l’archipel. « Les cyclones ont détruit dans certaines zones jusqu’à 50 % des aarieb [appellation socotrie de l’arbre dragon]. Chez nous, ils ont emporté la trentaine de nos habitations historiques, une partie de notre troupeau ainsi que toutes nos économies », se rappelle M. Ghulam. Le lieu de vie des deux hommes est à plusieurs jours de marche de la ville principale, Hadiboh. Sa famille vivote, vendant de temps en temps une chèvre pour s’en sortir. Seules des batteries de voitures servant de générateurs électriques éphémères tranchent avec le passé.

Symbole de la biodiversité de l’archipel

Pour ces populations semi-sédentarisées, la collecte de sève d’arbres dragons ne représente plus une activité économique importante. « Certains commerçants nous passent parfois de grosses commandes pour l’étranger, mais c’est un revenu anecdotique comparé à nos troupeaux de chèvres et de moutons », précise M. Souleymane. Jusqu’en 1967 et l’avènement d’un régime socialiste au Yémen du Sud en lieu et place d’un sultanat, (…)

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