25 janvier 2025 à 09h53
Mis à jour le 25 janvier 2025 à 12h30
Durée de lecture : 4 minutes
Ancelle (Hautes-Alpes), reportage
Ce 24 janvier, à Ancelle dans les Hautes-Alpes, impossible de manquer le rallye Monte-Carlo. Depuis quelques jours, les camping-cars se sont installés sur les parkings de la petite station du Champsaur. Lors de la journée de course, ils sont rejoints par les voitures qui s’alignent sur les bas-côtés des routes menant au village. Il y a foule pour la mythique spéciale du col de Moissière.
À l’arrière-plan, le faible enneigement de la vallée de la Rouanne rappelle que le changement climatique frappe déjà de plein fouet les territoires de montagne. Dans ce contexte, le maintien de la vieille tradition de ce rallye automobile, qui se tient du 22 au 26 janvier, interroge.
« Des sommets enneigés, des spéciales réputées pour leur technicité et des routes qui glissent un peu. » C’est ce que viennent chercher au rallye Monte-Carlo les amateurs qui se regroupent peu à peu dans les virages de la spéciale n °5 qui traverse Ancelle.
Le dérèglement climatique ? « On sait ! Mais… »
Et le dérèglement climatique ? « On sait ! » répondent les spectateurs, qui n’éludent pas la question, « mais ce weekend, c’est rallye. On veut se rassembler, faire la fête, on en a besoin en ce moment ».
Rencontrés la veille dans la fanzone de Gap, Romain et Mathéo reconnaissent les contradictions du sport automobile. Mais pour eux, il fait partie de la solution. « Le sport auto a toujours participé à améliorer l’automobile. Aujourd’hui, il peut aider à trouver des alternatives, par exemple les biocarburants », pensent-ils.
Pour Claire, qui est passée voir la fanzone, il est temps de passer à autre chose : « Je suis Gapençaise. Jusqu’à il y a quelques années, je suivais le rallye, j’aimais ça, mais avec le dérèglement climatique, je ne peux plus : c’est trop en contradiction avec ce que l’on voit en montagne. Les voitures brûlent du carburant au pied de glaciers qui fondent, de montagnes qui s’effondrent. »
Pour elle, c’est une bonne chance que des carburants neutres en carbone sont développés, mais il faudrait faire plus : changer nos modes de vie et notre rapport à l’environnement. Et cette course n’y aide pas.
Le rallye Monte-Carlo représente une source de retombées économiques non négligeables. Selon l’association Gap Sud, qui rassemble les commerçants et les artisans de la préfecture haut-alpine, le territoire en a besoin. Des membres de l’association s’inquiètent des conséquences sur leur commerce si le rallye venait à se dérouler ailleurs.
Une nécessité économique à relativiser
Mais selon les associations environnementales, il faut relativiser ce bénéfice économique. « Les commerçants disaient déjà cela pour la Croisière Blanche [1]. La Croisière blanche n’est plus là, les commerçants, si », dit Hervé Gasdon, président de la Société alpine de protection de la nature.
Pour ce Haut-Alpin, son département est riche de dynamiques citoyennes qui cherchent à faire évoluer nos modes de vie, de personnes qui souhaitent travailler en ce sens. « En matière de sport, en matière d’économie, on sait faire autre chose. Ce qui ne suit pas, ce sont les financements publics. »
Dans les Hautes-Alpes, le rallye Monte-Carlo vient chercher un paysage et de la technicité pour faire durer le spectacle de la course automobile, mais l’heure n’est plus à la fête. L’enfant du pays, Sébastien Ogier, octuple champion du monde, le reconnaît auprès du Dauphiné Libéré : « On est unanime pour dire que le WRC ne vit pas sa meilleure période. »
La spéciale n° 5 a finalement été annulée à cause de chutes de pierres sur des spectateurs. Comme les chevreuils qui ont traversé juste devant une voiture pendant l’épreuve test mercredi 22, la montagne semble vouloir prendre part à la discussion.