« Stop aux destructions des jardins populaires ! »


À Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre de la Transition écologique, Mme Martine Aubry, maire de Lille, M. Damien Castelain, président de la Métropole européenne de Lille, Mme Doriane Bécue, maire de Tourcoing, Mme Karine Franclet, maire d’Aubervilliers, M. Mathieu Hanotin, président de Plaine Commune et maire de Saint-Denis, Mme Nathalie Koenders, maire de Dijon, Mme Johanna Rolland, maire de Nantes, Mme Anne Vignot, maire de Besançon.


Mesdames et messieurs Pannier-Runacher, Aubry, Castelain, Bécue, Franclet, Hanotin, Koenders, Rolland, Vignot, vos politiques technocrates, hors sol, ignorent ce qu’est un jardin : un morceau de soi ancré dans la terre, un espace de sociabilité essentiel et une ressource vivrière, en résumé un lieu fourmillant de vie, entre nature et culture.

Selon vous, une terre jardinée est une « dent creuse », une « opportunité de promotion », et, « après tout, ces jardins peuvent être déplacés, remplacés ». On retrouve ces formulations, quasiment à l’identique, dans la plupart de vos discours et documents officiels.

En avril 2022, nous étions plusieurs représentants de jardins à nous retrouver à Besançon pour créer la Coalition des jardins populaires en lutte. Nous avons fait bloc, avons mené des combats, et avons souvent remporté des victoires, judiciaires comme d’opinion. Mais pour chacune de ces victoires, combien de jardins détruits dans le silence médiatique le plus complet ?

Les projets destructeurs se poursuivent en dépit des victoires

Aux jardins des Vertus, à Aubervilliers, malgré les victoires judiciaires, la mairie ne veut pas remettre en état les parcelles détruites, mais sauvées du béton. Quelques arbres rachitiques ont été plantés dans une zone clôturée accolée à la piscine olympique. De nouvelles parcelles sont menacées par l’implantation d’un pôle multimodal (gare de transport voulue par Plaine Commune, communauté de communes locale), qui se ferait autour de la gare du Grand Paris en cours de construction, et par d’autres projets immobiliers. Le Conseil d’État a été saisi pour les sauver, la lutte continue !

Les jardins ouvriers de Tourcoing restent menacés par un projet de zone commerciale : en mars 2022, la mobilisation avait obtenu l’annulation du permis de construire et la maire s’était engagée publiquement à les préserver. Pourtant, le 15 octobre 2024, soit trois jours avant l’entrée en vigueur du nouveau PLU, qui devait entériner cette protection, la mairie a accordé de nouveau le permis au promoteur .

La Friche Saint-Sauveur de Lille a été et aurait pu continuer d’être un refuge pour la biodiversité, un lieu de solidarité et d’échange de savoir-faire, un espace d’expérimentation collective comme ce fut le cas ces dix dernières années. Mais, il y a plus d’un an, la mairie et la métropole ont décidé de saper la mobilisation des habitants en clôturant le site et en détruisant les jardins aménagés au fil des ans.

Sourds aux revendications émanant de la société civile et de nombreuses associations, Martine Aubry et Damien Castelain maintiennent la bétonisation du site et la construction d’une piscine olympique, en dépit de toutes les urgences sanitaires et environnementales. 

Aux jardins des Vaîtes, à Besançon, après six ans de lutte et trois victoires judiciaires, la mairie a relancé son projet de promotion immobilière en novembre 2024. Contrainte d’abandonner son projet initial, elle se paie aujourd’hui les services d’une boîte de com parisienne, véritable mercenaire de grands projets inutiles, pour convaincre l’opinion publique de l’intérêt de son « acte 2 » de projet d’écoquartier. 

Bétonisation et menaces d’expulsion

Première phase de cet « acte 2 » : les jardinières des Vaîtes sont sommées d’accepter un remembrement total des jardins actuellement en autogestion. Les parcelles doivent être redécoupées et réduites pour laisser la place au béton ou aux futurs habitants de l’écoquartier. Les jardinières récalcitrantes sont menacées d’expulsion. Eh oui, à Besançon, ça gentrifie même les radis.

Si la mairie a été contrainte de réduire la voilure, plusieurs hectares de jardins, d’espaces boisés, de prairies et de friches sont toujours menacés par le béton… pour construire deux parkings et 600 logements dans une ville où le taux de vacance avoisine les 10 % [1].

Au quartier libre des Lentillères, à Dijon, les annonces du maire, M. François Rebsamen, n’étaient que promesses électorales. Passé sa réélection, en 2020, il a rétropédalé sur l’abandon de la phase 2 du projet d’écoquartier. Le bras de fer se joue désormais sur une bande de 1,14 hectare, au lieu des 2 hectares prévus, qui doit servir à prolonger l’écoquartier.

Les Petites Lentillères, soit une trentaine de jardins potagers ainsi qu’un fournil, de petites cabanes en bois et un lieu de vie, sont menacées par ce projet. Mais la mairie a coupé court à tout dialogue avec la population. Après la démission de M. Rebsamen, en novembre dernier, et son remplacement par sa première adjointe, Nathalie Koenders, la mairie a maintenu sa position.

Les jardins populaires sont plus essentiels que jamais

Ensemble, nous vous signifions de nouveau que nous ne laisserons pas ces terres disparaître sous le béton. Alors que l’avenir semble parfois obscur, que le changement climatique, l’effondrement de la biodiversité, la montée du fascisme menacent partout, les jardins populaires plus que jamais doivent être préservés.

Ce sont des lieux essentiels, où se nouent des liens par-delà les clivages sociaux ou d’âge, où se fabrique l’autonomie alimentaire, où s’échangent graines et cultures.

Encore une fois, nous dénonçons les politiques d’urbanisme tournées vers les logiques de compétitivité et d’attractivité, et revendiquons la préservation du vivant, le respect dû aux humains et non-humains, l’usage des terres par celles et ceux qui en prennent soin.

Un jardin n’est pas remplaçable, une destruction n’est pas compensable, une espèce n’est pas déplaçable.

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