L’Espagne, une monarchie zombie, par Pablo Castaño (Le Monde diplomatique, mars 2023)


Safari, bonnes affaires et impopularité

Présent à Paris lors de la réception de son ami Mario Vargas Llosa à l’Académie française, le 9 février 2023, l’ancien souverain espagnol Juan Carlos défraye la chronique pour ses frasques, son goût de l’argent et ses amitiés intéressées avec les souverains du Golfe. La médiatisation de ces agissements longtemps tus contribue à éroder l’image de la Maison royale et renforce le camp des partisans d’une république.

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Francisco de Goya. — « Ni mas ni menos » (Ni plus ni moins), de la série « Los caprichos » (Les caprices), 1799

Photographie : Jacques Quecq d’Henripret – RMN-Grand Palais

«Je suis désolé. J’ai fait une erreur et cela ne se reproduira pas. » C’est par cette déclaration piteuse que Juan Carlos, alors roi d’Espagne, crut se tirer d’affaire en avril 2012 après sa sortie d’hôpital. Il avait été admis pour une fracture à la hanche survenue au cours d’un safari de luxe tous frais payés au Botswana. Alors que le pays sombrait dans l’une des pires crises économiques de son histoire et que la Commission européenne menaçait de mettre l’économie espagnole sous tutelle, cet accident de chasse mettait à mal l’image d’un monarque « proche du peuple ». Ce fut le coup de grâce porté à une popularité déjà ternie : l’affaire a également mis en lumière la relation extraconjugale du roi avec Mme Corinna Larsen, une femme d’affaires allemande qui, quelques années plus tard, a porté plainte contre lui pour harcèlement.

Ainsi s’amorça la crise la plus grave jamais connue par la monarchie espagnole depuis sa restauration en 1975, lorsqu’à la mort du général Francisco Franco son successeur désigné, le jeune Juan Carlos de Bourbon, fut désigné chef de l’État. À l’issue d’une transition politique turbulente, le nouveau souverain s’accommoda de l’instauration d’une monarchie constitutionnelle qui lui permettait de se soustraire à la tenue d’un référendum pour ou contre la république. Il compensa ensuite son manque de légitimité démocratique lors de la tentative de putsch militaire du 23 février 1981. Ce jour-là, un groupe d’agents de la Guardia Civil prend d’assaut le Congrès, où sont réunis l’ensemble des députés et du gouvernement, tandis qu’une partie de l’armée se soulève et s’empare des rues de Valence. Selon la version officielle, le roi déjoue le coup d’État en désavouant le chef de la rébellion, le général Alfonso Armada, et en exhortant les principaux dirigeants militaires à ne pas se joindre à la conjuration. Pendant la nuit, revêtu de son uniforme de capitaine général (la Constitution espagnole accorde au roi le titre symbolique de « chef suprême » des armées), Juan Carlos tient un discours (…)

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