Le baroque bleu de Lisbonne, par Marina Da Silva (Le Monde diplomatique, mars 2025)


Se déployant d’Alcântara à Xabregas, passant du marché de la Ribeira à la tour de Belém, du château Saint-Georges au funiculaire de Bica, l’architecture lisboète est un enchantement célèbre, et célébré. Entre les parcs et les jardins, les églises et les musées, les places et les palais — ou encore le monastère gothique manuélin des Hiéronymites —, le tout compose un patrimoine flamboyant, dont une part fut perdue après le séisme de 1755.

Le livre accordéon qui paraît aux éditions Chandeigne (1) donne à voir de façon étonnante une œuvre d’art monumentale abritée au Musée national de l’azulejo, écrin des faïences merveilleusement inventives qui caractérisent le pays. Attribuée au peintre d’origine espagnole Gabriel del Barco, elle se déploie sur vingt-trois mètres pour évoquer près de quatorze kilomètres de côtes et offrir une vue d’ensemble de la grandeur de la capitale portugaise, du nord au sud, d’est en ouest, de la terre et du ciel, telle qu’elle était avant le tremblement de terre. Au fil du dépliement, sur les deux faces de ce leporello, on peut, pour la joie du regard, plonger dans le dessin-paysage d’azulejos qui exaltent avec intensité les profondeurs du bleu et du blanc, ou déchiffrer la carte de la ville par ses trésors repérés, documentés et contextualisés. Dans ces deux moments, où l’exaltation de la représentation le dispute parfois au réel, on aimera se perdre ou alors recomposer les itinéraires d’un voyageur ébloui.



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