1er mars 2025 à 09h24
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Le chuintement d’une chouette effraie. Le sifflet d’un hibou petit-duc. Le hululement de la hulotte. Voici les cris que vous pourrez entendre tout le mois de mars lors d’animations organisées à l’occasion des Nuits de la chouette par la Ligue de protection des oiseaux (LPO) et ses associations partenaires. Une opération naturaliste, qui célèbre cette année son trentième anniversaire, et qui permet « de faire de la sensibilisation auprès du grand public sur ces espèces encore méconnues », explique Jérémy Dupuy, ornithologue à la LPO.
Pendant longtemps, ces rapaces nocturnes furent symbole d’un mauvais présage. On les clouait sur les portes des granges pour conjurer le mauvais sort et les esprits malfaisants. Une pratique barbare qui a disparu depuis que l’animal est protégé. « Ils ont bénéficié de plusieurs lois de protection mises en place dans les années 1970. Depuis, les destructions se sont ralenties et les gens qui braconnaient ont arrêté », poursuit Jérémy Depuis.
Certaines espèces ont même conquis de nouveaux territoires, comme le montre la première estimation de grande ampleur de la population de rapaces nocturnes, que la LPO vient de publier. Elle a été menée de 2015 à 2018 avec l’aide de 1 200 bénévoles qui ont compté les couples reproducteurs des neuf espèces de rapaces nocturnes qui vivent en France : la chouette hulotte, la chevêche d’Athéna, l’effraie des clochers, le hibou des marais, le grand-duc d’Europe, le hibou moyen-duc, le petit-duc scops, la chevêchette d’Europe et la chouette de Tengmalm.
Les populations de chouette hulotte en hausse
Ces deux dernières ont été étudiées grâce au réseau Petites chouettes de montagne, copiloté par la LPO et l’Office national des forêts. Seuls les effectifs du grand-duc d’Europe et du hibou des marais ont été plus difficiles à évaluer à cause d’un manque de données.
Le résultat de cette vaste étude a soulagé les ornithologues : la plupart des espèces se portent plutôt bien. La chouette hulotte, la plus commune en France, compte 260 800 couples, un chiffre en hausse. Notons cependant qu’elle se fait rare dans les zones de grandes cultures où les massifs forestiers ont disparu, ainsi que sur le littoral méditerranéen.

Les populations de chouette hulotte ont progressé ces dernières années.
Flickr/CC BY–NC 2.0/Clément Bastié
La chevêche d’Athéna, classée en préoccupation mineure par l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), compte aujourd’hui 101 300 couples reproducteurs. Elle a repeuplé certains secteurs où elle avait disparu. « Depuis dix ans, elle colonise les Pyrénées, mais on ne sait pas pourquoi », signale Jérémy Dupuis.
D’autres espèces, en revanche, restent menacées, comme la chouette de Tengmalm, qui vit dans les forêts de haute altitude et compte 1 000 à 3 000 couples. Un effectif en baisse, menacé par le réchauffement climatique qui entraîne la disparition de leurs forêts. « J’ai peur que les chouettes de Tengmalm ne soient condamnées à disparaître des massifs montagneux du sud de la France », déplore Jérémy Dupuis.
Encourager leur reproduction en construisant des nichoirs
L’effraie des clochers, aussi appelée la dame blanche, dont l’effectif estimé à 87 700 couples est également en diminution. Ce rapace reconnaissable à sa tête couleur crème en forme de cœur niche dans les clochers ou les combles des greniers. Mais avec la rénovation des bâtiments, beaucoup de sites ne sont désormais plus accessibles. C’est la raison pour laquelle la LPO a lancé l’opération Une chouette, un village. L’objectif est d’installer 3 000 nichoirs dans 60 départements, offrant ainsi des lieux de reproduction pour les couples.
Les résultats encourageants de cette étude ne doivent pas masquer les menaces qui continuent de peser sur ces rapaces nocturnes, comme la disparition des haies et des bandes enherbées ainsi que de leurs proies — mulots, rats, campagnols — considérées comme des ravageurs de culture.
« À nous de tout mettre en œuvre pour protéger ces oiseaux fascinants, essentiels au bon fonctionnement des écosystèmes », conclut Allain Bougrain Dubourg, président de la LPO, dans un communiqué.
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