La Gendarmerie était folle de la messe ; elle devra pourtant respecter la laïcité, ce qui est quand même la moindre des choses pour des fonctionnaires chargés de faire respecter la loi


Victoire : la gendarmerie interdite de messe

Par un Bref du 18 mai 1962, le pape Jean XXIII a décrété que Geneviève (420-502), considérée comme vierge et sainte par l’Église romaine, protège non seulement Paris, mais aussi les gendarmes. Depuis lors, les groupements de gendarmerie départementale ou mobile organisent chaque année, fin novembre, des fêtes de tradition en l’honneur de leur patronne comportant le plus souvent un office religieux auquel les militaires participent en uniforme et sur le temps de service. Le Diocèse aux Armées propose même une prière du gendarme qui s’achève ainsi : « Par l’intercession de Sainte-Geneviève, ô Dieu, trois fois Saint / je t’en supplie : / soutiens mon service, ranime mon courage et fortifie ma foi. »

Saisi par la Libre Pensée d’un recours pour excès de pouvoir, le Tribunal administratif de Lyon a annulé, le 19 mars 2025, la décision du colonel commandant le groupement départemental de l’Ardèche d’organiser une journée de célébration de Geneviève, le 30 novembre 2022, « en tant qu’elle comportait l’organisation d’un office religieux au sein d’une église. » Il l’a jugée illégale au regard de l’article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958 – « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances. » – et, implicitement, de l’article L. 4121-2 du Code de la défense – « Les opinions ou croyances, notamment philosophiques, religieuses ou politiques, sont libres. Elles ne peuvent cependant être exprimées qu’en dehors du service et avec la réserve exigée par l’état militaire. Cette règle s’applique à tous les moyens d’expression. Elle ne fait pas obstacle au libre exercice des cultes dans les enceintes militaires et à bord des bâtiments de la flotte ».

Certes, le Tribunal administratif de Lyon reconnaît au chef des gendarmes le pouvoir d’ordonner chaque année en l’honneur de « Sainte-Geneviève » un évènement dit de tradition, à caractère festif et à finalité cohésive, qui présente plusieurs sens. Toutefois, il émet deux réserves.

En premier lieu, il considère que ce principe ne s’applique pas à l’office religieux inscrit au programme : « […] une messe célébrée par deux représentants du culte catholique au sein d’une église située hors de l’enceinte militaire ne saurait, compte tenu de sa nature même et de son caractère indissociable de la religion catholique, constituer une célébration susceptible de revêtir une pluralité de significations […] ».

En second lieu, il estime que le commandement ne peut, à cette occasion, « […] exprim [er] la reconnaissance d’un culte et une préférence religieuse en méconnaissance du principe de laïcité tel que garanti par l’article 1er de la Constitution […] ». En l’espèce, celles-ci résultaient clairement des modalités d’organisation de la journée, consignées dans une note de service du 29 novembre 2022 : « présence à la messe » ; port de la « tenue n° 11 » de cérémonie ; réservation par le commandement de bancs pour les autorités dans l’église ; sécurisation de l’office par des militaires de la gendarmerie en « tenue de service courant ».

La Libre Pensée se félicite du jugement du Tribunal administratif de Lyon qui protège la liberté de conscience des citoyens et des gendarmes : elle laisse ouverte la possibilité aux unités de gendarmerie de fêter Geneviève une fois l’an, ce que notre association n’a d’ailleurs jamais contesté, mais interdit, en application du principe de laïcité et donc de neutralité de l’État, d’inclure dans ces journées dites de tradition un office religieux auquel participent les militaires en tenue et sur le temps de service.

La Libre Pensée invite toutes ses Fédérations départementales à faire largement connaître ce jugement, en particulier aux Élus locaux et Préfets qui participent régulièrement es-qualité à ces messes, et à contester toute tentative d’en organiser encore en 2025 dans le cadre du service et avec les moyens humains et matériels de la Gendarmerie.

Une victoire qui en appelle d’autres à venir !

Paris, le 22 mars 2025





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