Alors qu’une remarque humoristique du Premier ministre français François Bayrou concernant Burger King a fait sourire, la France connaît un phénomène inhabituel, celui du boycott croissant des marques américaines, motivé par des considérations économiques, politiques et sociétales, pouvant s’inscrire dans la durée.
Lors d’une réunion du conseil municipal à Pau le 24 mars, une remarque humoristique du Premier ministre français François Bayrou a suscité l’attention des médias et du public. Alors qu’il évoquait l’installation d’une borne de recharge électrique devant un restaurant Burger King, François Bayrou s’est exclamé, l’air amusé : «Hum… Burger King.» Cette référence ludique au célèbre slogan de l’enseigne américaine a déclenché quelques rires dans la salle.
Cette scène, enregistrée et diffusée largement sur les réseaux sociaux, a rapidement été reprise par Burger King France pour promouvoir avec humour son nouveau menu au cheddar, en plaisantant sur l’idée d’un «nouveau jingle» issu de l’intervention du Premier ministre.
Un contexte de tensions commerciales croissantes entre la France et les États-Unis
Si l’anecdote sur le Premier ministre a suscité l’amusement général, elle survient toutefois dans un contexte particulier de tensions économiques et commerciales grandissantes entre la France et les États-Unis. Ces tensions, alimentées par les récents différends politiques, ont suscité une réaction plus profonde au sein de la société française, matérialisée par un boycott croissant des produits américains.
Selon un sondage de l’Ifop pour le site touristique NYC.fr, près d’un Français sur trois (32%) affirme avoir renoncé récemment à l’achat de produits ou de marques américaines. Ce chiffre, comparable à celui observé en Suède (29% selon une enquête similaire), traduit une tendance inhabituelle sur le territoire français où cette forme de protestation est généralement peu courante.
Les entreprises principalement visées par ce boycott sont emblématiques de la culture de consommation américaine : Coca-Cola (48%) et McDonald’s (44%) arrivent en tête des marques évitées par les consommateurs français. Starbucks (15%) et KFC (12%), également associés à l’image du fast-food américain, figurent aussi parmi les marques concernées. Tesla (19%) et X (10%), toutes deux dirigées par Elon Musk, représentent les exceptions notables hors secteur alimentaire.
La durée et la motivation du boycott chez les Français
D’après cette étude, les motivations de ce boycott apparaissent variées. Si l’opposition à certaines politiques américaines joue un rôle majeur, avec 61% des sondés exprimant leur désaccord envers la politique intérieure et étrangère actuelle des États-Unis, des raisons économiques et sociales sont également mises en avant.
Ainsi, 62% des participants au boycott déclarent vouloir soutenir les entreprises et l’emploi français, tandis que 56% mettent l’accent sur la défense des intérêts économiques européens. La contestation des politiques de diversité, équité et inclusion des entreprises américaines est également un motif secondaire, mais significatif pour 44% des répondants, atteignant même 52% chez les électeurs de gauche.
Ce boycott est-il simplement une réaction temporaire liée aux récentes décisions américaines, ou bien s’agit-il d’un phénomène destiné à perdurer ? Les auteurs de l’étude estiment plutôt que ce mouvement pourrait s’inscrire durablement dans les habitudes françaises. En effet, 57% des personnes interrogées affirment envisager de poursuivre leur boycott à moyen terme.
Cependant, d’autres études dressent un tableau moins idyllique. Par exemple, selon lpsos, les jeunes adultes (18-34 ans), bien que 69% d’entre eux estiment le boycott comme un moyen de pression efficace, ne sont que 38% à envisager réellement de boycotter des marques high-tech américaines, contre seulement 23% chez les 55-75 ans. En d’autres termes, malgré les positions politiques exprimées, la tentation de posséder les derniers modèles tels que l’iPhone 16e ou le Google Pixel 9a reste forte. Reste à savoir si cette tentation l’emportera sur les convictions affichées.