le gouvernement pénalise les particuliers


28 mars 2025 à 16h01

Mis à jour le 28 mars 2025 à 18h56

Durée de lecture : 5 minutes

À partir d’aujourd’hui, il n’est désormais plus possible de revendre l’intégralité de l’électricité que l’on produit. Un mois de mobilisation, de réunions, de multiples alertes de députés… Rien n’y a fait : le gouvernement a entériné dans un arrêté publié le 27 mars les baisses drastiques des prix d’achat de l’électricité produite par les panneaux solaires sur les petites et moyennes installations en toiture.

Le tarif dit « d’injection totale » est supprimé en dessous de 9 kilowatts-crête (kWc). Il faudra donc obligatoirement autoconsommer au moins une partie de sa production, le reste pouvant toujours être revendu à EDF mais à un prix cassé : 4 centimes par kilowattheure produit, trois fois moins qu’avant.

Prime à l’installation divisée par trois

Les premières et principales cibles sont en effet les très petites installations — celles posées sur les bâtiments résidentiels — sur ce qu’on appelle le segment 0 à 9 kilowatts-crête (kWc) de puissance. Elles vont souffrir d’un deuxième coup de rabot : elles bénéficiaient jusqu’ici d’une prime, variable selon la puissance. Déjà nettement abaissée en 2024, cette prime est désormais réduite à 80 euros/kWc pour tous les projets de moins de 9 kWc de puissance. Ainsi, pour une installation classique de 3 kWc, on passerait d’une aide totale de 660 à 240 euros.

Pour évaluer les effets concrets de ces mesures, nous avons pris une hypothèse standard : une installation de 3 kWc (8 panneaux sur 15 m2) sur un pavillon résidentiel orienté plein sud dans le pourtour méditerranéen, avec un coût global d’installation de 6 000 euros. Bilan : le changement de tarif multiplie par 1,5 voire double la durée nécessaire pour rembourser son équipement.

Cela reste toujours viable sur la durée du contrat d’achat de l’électricité produite (vingt ans), surtout si la part autoconsommée est importante et que le coût d’électricité augmente, mais cela rend l’investissement bien moins attractif qu’il y a encore quelques mois.

Seule concession : une entrée en vigueur repoussée

En compensation, la loi de Finances votée en début d’année avait déjà planifié une baisse de la TVA de 10 % à 5,5 % sur les travaux d’installation mais cette baisse n’entrera en vigueur qu’à partir du 1er octobre, dans six mois.

Surtout, cette baisse de taxe sera conditionnée à des critères d’origine de la production, ce qui exclura probablement un bon nombre de panneaux importés et peu coûteux. Un choix écologiquement et socialement judicieux mais qui va forcément rendre moins sensible l’effet de la baisse, les panneaux européens étant peu nombreux et plus coûteux.

La mobilisation de la filière depuis un mois et demi a tout de même permis d’obtenir un calendrier légèrement moins brutal. Originellement, la baisse devait être rétroactive, au 1er février dernier. Or, en matière d’énergie, c’est la date de dépôt de la demande de raccordement qui fait foi pour savoir à quel tarif l’on va être payé. La rétroactivité des baisses de tarifs mettait donc en grande difficulté les projets avec des devis signés mais pas encore raccordés durant cet hiver.

La nouvelle date ne change pas fondamentalement les choses : faute de clarté dans les tarifs applicables depuis début janvier, rares sont les installateurs qui se sont engagés dans de nouveaux chantiers. Et cela pourrait se prolonger. Car avec cette baisse de TVA six mois après l’entrée en vigueur des nouveaux tarifs, de nombreux particuliers risquent d’attendre, laissant un creux d’activité pour les installateurs.

Le gouvernement privilégie les plus grosses installations

Ce risque plane encore plus sur un autre segment de puissance, les installations de 100 à 500 kWc. Pour ces toitures considérées comme de taille moyenne, sur des parkings, bâtiments publics ou entrepôts, c’est le mécanisme de financement dans son ensemble qui va changer.

Fini les tarifs d’achat projet par projet. À partir de cette fin d‘été, les entreprises installatrices devront candidater à un appel d’offre simplifié, avec un prix plafond fixé par le gouvernement : 95 euros par mégawattheure (MWh), contre 105 euros encore en ce début d’année. La seule concession du gouvernement a été d’accepter un gel de ce tarif pour trois mois, avant que celui-ci ne redevienne dégressif si les projets déposés chaque trimestre dépassent les attentes du ministère. C’est la grande crainte du pouvoir : faire trop de photovoltaïque sur des toitures de taille moyenne par rapport à de plus grands projets, qui coûtent moins aux finances publiques.

« L’effondrement a été temporairement évité »

Dans un communiqué, le Syndicat des énergies renouvelables (SER) et Enerplan considèrent qu’avec ces ajustements « l’effondrement a été temporairement évité » mais « il faut se remettre vite autour de la table de discussion pour sortir de cette période transitoire et permettre aux professionnels de retrouver une visibilité après cette période chaotique ».

Très actif depuis sa constitution en février, le Collectif de défense du photovoltaïque en France (CDPF) reste quant à lui amer. Dans son livre blanc, il réclamait surtout plus de temps pour que la filière s’adapte à ces changements drastiques.

Sans cela, « ce sont les installateurs qui vont payer les pots cassés », déplore Floriane de Brabandère, leur porte-parole. Elle qualifie de « petit coup derrière la nuque » la nouvelle obligation pour les entreprises de déposer une caution de 10 000 euros à chaque fois qu’elles candidateront à un projet de 100 à 500 kWc de puissance. Beaucoup de petites ou moyennes entreprises auront du mal à faire cette avance faute de trésorerie, et sachant qu’elle ne sera pas restituée si le projet n’arrive pas à son terme.

Un élément de plus qui pousse le CDPF à poursuivre la bataille, notamment au niveau juridique, en attaquant l’arrêté devant le Conseil d’État et en portant plainte devant la Commission européenne.

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