
Lors du G7, partiellement virtuel, du 24 février, le président des États-Unis a menacé les participants de quitter l’organisation si ceux-ci publiaient la déclaration qu’ils avaient préparée.
La période que nous vivons, avec le rapprochement des États-Unis et de la Russie, bouleverse l’échiquier politique mondial. Ce faisant toutes les institutions intergouvernementales sont perturbées. Il apparait que certaines d’entre elles répondaient à un objectif officieux, que tous se gardaient bien d’énoncer publiquement, mais qui ne résiste pas aux évolutions du temps. D’autres menaient des actions contraires à leurs objectifs officiels, ce qui ne gênait guère lorsque tous leurs membres étaient d’accord entre eux, mais paraît aujourd’hui insupportable. En définitive, le multilatéralisme, tel qu’il était pratiqué, était tout, sauf multilatéral.
Le G7 et l’OTAN ne fonctionnent déjà plus
La coordination politique de « l’Occident » était assurée par le G7, un ensemble de réunions à tous les niveaux, qui élaborait un discours commun. Or, lors de la réunion virtuelle des chefs d’État et de gouvernement du 24 février 2025, le président des États-Unis, Donald Trump, a refusé de signer le communiqué final et a menacé ses partenaires de quitter le G7 s’ils le publiaient sans son accord [1].
Depuis un mois, les réunions du G7 se déroulent sans les États-Unis. Ainsi, lors de la réunion virtuelle du 28 mars des conseillers de sécurité nationale, à laquelle l’Ukraine était associée, l’États-unien, Michael Waltz n’y a pas participé [2].
Force est de constater qu’il n’y a plus de coordination politique de « l’Occident ». Par conséquent, il n’y a plus, non plus, de coordination militaire.
Les Français et les Britanniques, d’abord en concurrence, puis d’un commun accord et en concertation, ont lancé une série de rencontres des chefs d’État et de gouvernement alliés. Ils cherchent à assurer la sécurité du continent sous les parapluies nucléaires français et britannique. Mais, en l’état, cette idée ne peut pas fonctionner car le problème a été mal posé.
En effet, pour le moment, ils interprètent les évènements comme un déplacement des armées des États-Unis d’Europe vers l’Extrême-Orient, alors que le président Trump cherche à mettre fin à « l’Empire américain », à la fois par idéologie —c’est un jacksonien [3]—et par nécessité —il gère la crise de la dette [4]—.
Dans l’hypothèse des alliés, il suffirait d’augmenter les dépenses militaires des uns et des autres pour pallier au retrait US alors que, s’il s’agit de la fin de « l’impérialisme américain » comme je le soutiens, ce n’est pas tant le budget de l’Alliance atlantique que son mode d’organisation qui est en cause. Washington ne souhaite plus assumer le commandement de l’ensemble, mais juste montrer la voie.
Or, si les États européens et leurs alliés canadiens, australiens, coréens et japonais, obéissaient tous aux États-Unis, ils ne s’entendent pas pour autant entre eux. L’Histoire du continent européen est une suite sans fin de rivalités, de conflits et de guerres, à la seule exception de l’Empire romain. À l’époque, les populations se sont soumises à Rome pour se protéger des invasions. Dès sa chute, les vikings et les mongols pillèrent le continent. Les empire de Charlemagne, de Charles Quint, de Napoléon ou de Hitler n’ont jamais connus la paix. Aujourd’hui, aucun danger imminent ne pousse les Européens à s’unir. D’où l’invention d’une prétendue menace russe, comme si « l’Armée rouge » se préparait à parader sur les Champs-Élysées.
Il y a deux semaines, le 19 mars, la RAND Corporation, c’est-à-dire le lobby militaro-industriel états-unien, suggérait de créer un « conseil de dissuasion européenne » avec la France, le Royaume-Uni et d’autres États européens clés comme l’Allemagne et la Pologne [5]. Certes, cependant les armes stratégiques nucléaires ne peuvent pas être des moyens de dissuasion en l’absence d’armées conventionnelles solides. Or aucun des Européens n’en a, les armées française et britannique actuelles n’ont pas pour vocation de défendre leurs territoires, mais de se projeter dans des opérations néo-coloniales, principalement en Afrique.
Les gigantesques moyens de l’OTAN sont compromis. Il suffit que les États-Unis ne partagent plus leurs moyens propres pour que plus rien ne fonctionne. Leurs renseignements sur les champs de bataille sont indispensables au fonctionnement des armes qui leur ont été achetées. Par ailleurs, s’ils ne souhaitent pas être impliqués dans un conflit, ils devront bloquer l’usage des armes lourdes qu’ils ont vendues, des blindés aux avions. Ce qui avait été conçu pour contenir des aventures de certains alliés les étouffe désormais tous.
Au demeurant le même problème se posera avec les armes lourdes vendues par la France et par le Royaume-Uni qui, toutes également, ont été équipes d’inhibiteurs. Paris et Londres devront aussi les bloquer lorsque, après la défaite de l’Ukraine, la Pologne tentera de récupérer la Galicie orientale et que la Hongrie récupèrera la Transcarpathie. Et que deviendra l’OTAN quand la Roumanie tentera de récupérer la Moldavie ?

À la Conférence sur la sécurité de Munich, le 14 février, le vice-président JD Vance est venu dénoncer « le recul de l’Europe de certaines de ses valeurs les plus fondamentales, des valeurs qui sont partagées avec les États-Unis d’Amérique. » Son discours marque le renoncement de Washington à « l’Empire américain » et e début de la déroute des élites alliées.
Les institutions nationales et intergouvernementales révèlent leurs vrais visages
À la tête du département de l’Efficacité économique, Elon Musk dégraisse la bureaucratie états-unienne. L’opinion publique l’écoute révéler la gabegie de l’administration Biden. En tant que libertarien, Musk se contente de diminuer l’État fédéral. Mais derrière ce combat, le président Trump détruit, pièce par pièce, tous les budgets de « l’impérialisme américain ». Il a révoqué l’essentiel de l’USAID, la prétendue agence d’aide humanitaire qui servait de paravent à la CIA. Il s’en prend identiquement au United States Institute of Peace (USIP) et à la National Endowment for Democracy (NED), les deux agences qui versent légalement des subventions pour prolonger la CIA dans le cadre des « Cinq Yeux » (c’est-à-dire de la coopération des services secrets anglo-saxons). Tous les jours, on découvre de nouvelles agences, aux activités obscures, qui étendaient « l’impérialisme américain » dans le monde. La dernière en date, la petite U.S. African Development Foundation, située à proximité de la Maison-Blanche, a interdit aux agents du DOGE de pénétrer dans ses locaux qu’elle a fait garder par ses propres policiers. Ses employés s’y sont retranchés comme des forcenés pour que nul ne puisse découvrir à quoi ils servaient.
Toutes les ONG et tous les partis politique que l’État fédéral américain subventionnait dans le monde vont devoir trouver de nouvelles sources de financement ou fermer.
Je ne résiste pas au plaisir de vous raconter comment, chez tous les alliés, ce système s’effondre sur sa base. Par exemple, l’ONG française Reporters sans frontières qui prétend défendre « le droit, pour chaque être humain, d’avoir accès à une information libre et fiable », est en réalité une officine de la CIA. Elle avait refusé de me défendre lorsque je fus menacé et que j’ai dû quitter la France. Or, le président Trump vient de fermer les radios et télévisions de propagande. Sans complexe, Reporters sans frontières s’est associé aux employés de Voice of America pour intenter un procès à l’administration états-unienne et demander la réintégration des prétendus « journalistes » de la station.
Ou encore, la Fondation Jean-Jaurès, liée au Parti socialiste français, s’est progressivement alliée à des pseudopodes de la CIA. Aujourd’hui, elle emploie, par exemple, Rudy Reichstadt, fondateur de Conspiracy Watch, déjà grassement subventionné par la France. Tout en se réclamant de la Charte de Munich qui précise les droits et devoirs des journalistes, ce personnage nous a décrit, sur près de 300 articles, comme des « faussaires », sans jamais indiquer en quoi nous aurions falsifié la réalité.
L’effondrement de ces ONG et partis politiques subventionnés par Washington correspond à la prise de conscience de la reproduction de ce système par l’Union européenne. Celle-ci comprend des agences comparables à l’USAID, à l’USIP et à la NED. Si tous les experts savent depuis longtemps que l’UE subventionne des ONG pour dire du bien d’elle et d’autres pour dénigrer ses opposants, on ne découvre que maintenant l’ampleur de sa propagande. Le Mathias Corvinus Collegium (MCC) hongrois vient ainsi de publier une étude de Thomas Fazi sur les subventions de propagande l’UE [6].
On y apprend, par exemple que l’UE a lancé des programmes pour « combattre les discours eurosceptiques déjà répandus par les élites autocratiques » (RevivEU) ou pour « dénationaliser l’engagement européen » (EU TURN 2025) ; des programmes qui s’ajoutent au financement des petits copains, comme la Fondation Robert Schuman pour lutter contre la « mythologie eurosceptique et national-populiste » ou le European Policy Centre pour dire du bien des migrations internationales et du mal de la Russie.
On savait déjà, par les études de l’European Centre for Law & Justice (ECLJ) [7], que la Cour européenne des Droits de l’homme, loin d’être un tribunal impartial, était la chasse gardée des employés du spéculateur George Soros. On sait désormais que l’Union européenne, loin d’être une administration respectueuse de la diversité de ses membres, manipule son budget contre ses « citoyens ».
Nous n’en sommes pas encore à dégraisser l’Union européenne et le Conseil de l’Europe, mais la conscience du dévoiement de la bureaucratie de Bruxelles et de la justice de Strasbourg est là.
Conclusion
Le multilatéralisme que nous avons connu au sein des institutions de « l’Occident », le G7 et l’OTAN, persiste, mais est paralysé. Ces organisations vont rapidement disparaître sous leur forme actuelle. Pour continuer, elles devront changer radicalement de forme.
De même, la prétendue « société civile », loin d’être l’émanation des citoyens en complément des institutions démocratiques, apparaît désormais comme truffée d’organisme hybrides travaillant en sous-main pour les États, à l’insu de leurs citoyens et contre eux.