Brésil – mordu par son chien, il accuse l’entreprise : l’absurde au télétravail


Résumé : un employé de Vale, mordu par son chien en télétravail, réclame une indemnisation à son entreprise, arguant qu’elle aurait dû l’instruire pour éviter l’incident. Ce cas, jugé au Brésil en mars 2025, illustre l’infantilisation, le rejet de la responsabilité et la bureaucratie galopante de nos sociétés. Il pose des questions profondes sur l’autonomie, la victimisation et notre rapport à l’incertitude dans un monde saturé de règles.

Quand le toutou mord, l’entreprise doit payer – bienvenue en 2025

Un employé de l’entreprise minière brésilienne Vale, analyste opérationnel senior, a été mordu par son propre chien alors qu’il travaillait depuis chez lui. Il exige aujourd’hui une indemnisation de son employeur. Ce n’est pas une blague : le tribunal régional du travail de Bahia, au Brésil, a même examiné cette affaire. Publiée le 19 mars 2025, cette histoire révèle les revendications de l’employé, qui soutient que Vale aurait dû lui fournir des « instructions » pour éviter qu’un tel incident ne se produise pendant ses heures de télétravail.

Un cas comme symptôme de notre société. Ce fait divers met en lumière plusieurs maux contemporains :une infantilisation généralisée de nos sociétés, un rejet profond de la responsabilité personnelle, une passivité entretenue par une avalanche de procès et de bureaucratie.

En demandant à Vale de « prendre soin » de lui, cet employé incarne une dépendance puérile, préférant s’en remettre à autrui plutôt que d’assumer son autonomie. Notre époque est saturée de litiges : des plaintes pour des incidents mineurs aux batailles juridiques sur des vétilles, chaque accroc devient une occasion de rejeter la faute sur les autres et de gonfler un système bureaucratique déjà tentaculaire.

Cette bureaucratie, devenue un monstre totalitaire, nous étouffe sous un déluge de formulaires, règlements, procédures, normes, guides, notices, codes, standards et prescriptions. Les entreprises ploient sous les demandes d’indemnisation, les assurances régentent nos moindres faits et gestes, tandis que des cohortes d’avocats encombrent les tribunaux avec des affaires souvent insignifiantes.

Cet employé de Vale, en réclamant une compensation pour une morsure infligée par son propre chien dans son propre domicile, aggrave cette spirale. Il exige davantage de règles, d’instructions, de cadres – comme si une entreprise pouvait produire un manuel intitulé « Comment empêcher votre chien de vous mordre pendant une visioconférence ». Cette obsession du contrôle trahit une peur viscérale de l’incertitude, un refus d’admettre que la vie, y compris en télétravail, est imprévisible par nature.

En cherchant à tout réglementer, nous alimentons un cercle vicieux, une dépendance croissante où l’autonomie devient un poids trop lourd à supporter.

Ce cas soulève des questions essentielles :

  • Où s’arrête la délégation et où commence la responsabilité ?
  • La victimisation est-elle une forme de mauvaise foi ?
  • La quête d’indemnisation traduit-elle une fuite face à l’absurde de notre condition ?
  • Comment concilier liberté individuelle et dépendance collective ?
  • La culture de la plainte reflète-t-elle un refus de l’effort ?
  • Les réseaux sociaux amplifient-ils notre immaturité ? Le spectacle, constant dans l’histoire, atteint aujourd’hui une vitesse et une portée inédites grâce aux médias modernes.
  • Hannah Arendt, dans La Condition de l’homme moderne, avait-elle raison de redouter une société écrasée par la bureaucratie ?
  • Comme le suggère Byung-Chul Han dans La Société de la fatigue, sommes-nous trop épuisés pour affronter l’incertitude et le chaos ?
  • La responsabilité personnelle est-elle encore envisageable dans un monde qui glorifie la dépendance ?

L’histoire de cet employé mordu par son chien est à la fois cocasse et révélatrice. Elle montre que le télétravail exige non seulement un bon dressage canin, mais aussi une réflexion profonde sur nos sociétés modernes. Ces dernières cultivent avec zèle une immaturité collective, sacrifiant l’autonomie sur l’autel d’une victimisation addictive (voir aussi l’article Le citoyen-spectateur & la démocratie télévisée).

Une inversion morale s’opère lorsque l’abandon collectif de la responsabilité se pare des atours de la justice. Se réfugier dans la bureaucratie pour échapper à l’angoisse de l’incertitude, c’est fuir la réalité brute de l’existence humaine. Ce refuge se transforme en prison volontaire, où la sécurité d’une vie sans audace nous enferme dans un consensus glacial.

Il est urgent de promouvoir, dans les médias, les livres, les écoles et les universités, une indépendance forgée dans l’effort et l’imperfection. C’est un combat de longue haleine pour restaurer la Haute Culture, mémoire vive de notre vie commune bien au-delà des livres d’histoire. Aristote le disait déjà : 

l’intelligence ne s’exerce pas sur les seules données des sens, mais sur les formes préservées dans la mémoire.

 

Antoine Bachelin Sena auteur de plusieurs livres (https://antoinebachelinsena.com/2024/02/16/livres/), il peut être suivi sur X x.com\antoinebachelin 





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