Si vous lisez ceci, sachez que c’est vraiment arrivé.
Je ne sais pas où et quand vous lisez ces lignes. Je vous écris de chez moi, à Jaffa, en Israël ; nous sommes le 9 avril 2025 et il est 13h00.
Pendant des années et des années, nous avons dit que « nous devions raser Gaza ». Eh bien, Gaza est maintenant rasée. Mais ce n’est pas parce que nous en avions besoin, c’est parce que nous le voulions. Nous voulions raser Gaza, et nous l’avons fait. Nous l’avons fait sous un tonnerre d’applaudissements.
La terre s’est remplie d’acclamations victorieuses pour chaque maison effondrée et chaque famille effacée.
Nous disons que nous l’avons fait à cause du massacre du 7 octobre 2023, pour sauver les otages pris ce jour-là, ou pour nous assurer qu’un massacre similaire ne se reproduira plus jamais.
Je ne sais pas quelle histoire s’imposera à l’avenir comme l’explication acceptable de la destruction de Gaza, mais ce sont des mensonges. Nous l’avons fait parce que nous le voulions.
Nous avons anéanti une région entière.
À l’heure actuelle, je ne sais pas encore ce qu’il adviendra de ses plus de deux millions d’habitants. Nous en avons déjà tué au moins cinquante mille, probablement plus. Quant aux vivants, je sais que leur présent est aussi difficile que peut l’être l’existence humaine, et que leur avenir est sombre.
Il n’y a pas d’avenir à Gaza. Il n’est pas possible d’y vivre dans son état actuel, et toute réhabilitation prendra de nombreuses années et nécessitera d’énormes investissements.
Dans l’état actuel des choses, nous bloquons toute offre de reconstruction, toute tierce partie désireuse de prendre la bande de Gaza sous son aile, alors que nous poursuivons notre campagne de mort et de destruction.
Il n’y a pas de passé à Gaza. Il y avait une vie, une civilisation, mais nous en avons anéanti tous les vestiges. Universités, musées, mosquées, cimetières. Nous n’avions pas besoin de les détruire, mais nous le voulions. Nous voulions effacer toute trace de vie dans cette région.
Les pays du monde occidental ont soutenu l’anéantissement ou sont restés les bras croisés. Les États-Unis l’ont financé et armé. En Israël, toutes les institutions de l’État ont joué leur rôle. L’académie, la presse, les tribunaux, la culture – tout le monde l’a soutenu et légitimé.
Nous l’avons tous voulu. La résistance de l’intérieur était marginale et négligeable, et nous avons condamné ceux qui résistaient comme des traîtres. La police a interdit toute expression de résistance à l’anéantissement, et le public a soutenu ce silence.
L’anéantissement de Gaza est devenu le projet national, et nous l’avons mis en œuvre avec diligence et joie. Ceux qui y ont pris une part active ont été acclamés comme des héros.
Nous savions ce que nous faisions. Nous savions les souffrances indescriptibles que nous causions. Nous savions que nous commettions des crimes en temps réel. Nous savions, et nous déclarions au monde entier, que c’était à cela que ressemblait la justice, que c’était le visage de la moralité.
Je ne sais pas ce que j’aurais pu faire différemment. Je ne sais pas s’il y a quelque chose que j’aurais pu faire pour arrêter cela.
Je voulais résister, mais je ne savais pas comment. Écrire cela ne sert à rien, si ce n’est à témoigner de ce qui s’est passé et à exprimer mon impuissance face à tout cela.
Voilà comment cela s’est passé.
Tom Zandman, citoyen israélien, @TomZandman
Traduction « yep » par Viktor Dedaj avec probablement toutes les fautes et coquilles habituelles