par Mike Whitney
«Trump n’a pas usurpé pleinement les pouvoirs dictatoriaux pour imposer ses droits de douane… Cependant, ses actions, en particulier son utilisation de la loi sur les pouvoirs économiques d’urgence internationaux (IEEPA) et d’autres pouvoirs d’urgence, ont suscité de vives inquiétudes parmi les critiques, les juristes et certains membres du Congrès, qui craignent qu’il ne repousse les limites de l’autorité exécutive d’une manière qui pourrait être considérée comme autoritaire ou dictatoriale». Grok
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«Nous venons d’apprendre que la personne la plus puissante du monde, Donald Trump, a un patron : le marché obligataire. Il ne l’a peut-être pas reconnu lui-même, mais le tumulte financier mondial qu’il a provoqué (…) l’a enfermé dans une prison fiscale. (…) Il est totalement à la merci de la bonne volonté des investisseurs obligataires. (…)
Il a également tendu un pistolet chargé à son ennemi présumé, la Chine, et à son allié supposé, le Japon. (…) Les pistolets chargés qu’ils ont sont les (…) plus d’un billion de dollars de bons du Trésor américain et la Chine pas beaucoup moins. S’ils vendaient ces obligations, ou même s’ils choisissaient de ne pas refinancer les obligations arrivant à échéance, cela pourrait être un désastre pour Trump. Parce que cela pourrait provoquer une autre hausse potentiellement paralysante des rendements obligataires.
Voici la mesure de la débâcle de Trump. Il a peut-être détruit le plus important avantage concurrentiel financier des États-Unis, à savoir que les investisseurs ont traditionnellement acheté le dollar et les bons du Trésor américain en période d’incertitude économique et politique. Plus maintenant, car il est personnellement devenu la source mondiale d’incertitude et d’anxiété économiques. Donc, comme je le dis, il est maintenant dans une prison fiscale. Et si les investisseurs obligataires, notamment au Japon et en Chine, le voient imposer des droits de douane ou réduire les impôts d’une manière qui ne leur plaît pas (…) ils ont les moyens et le pouvoir de l’arrêter». ~ Robert Peston

Pourquoi les marchés ont-ils réagi de manière si erratique à l’annonce du «Jour de la libération» de Trump ?
Les investisseurs n’aiment pas l’incertitude. L’incertitude engendre la peur, la peur engendre la panique, et la panique engendre l’effondrement des marchés. L’imposition soudaine par Trump de droits de douane radicaux a fait craindre que des changements fondamentaux dans le commerce mondial n’entraînent une hausse de l’inflation, un ralentissement de la croissance, une perturbation des chaînes d’approvisionnement et une escalade des conflits avec les partenaires commerciaux des États-Unis. Ce sont ces conséquences anticipées qui ont mis les investisseurs sur les nerfs et fait plonger les marchés.
Trump a tenté d’apaiser les craintes des investisseurs en présentant ses droits de douane comme un élément essentiel de sa politique «Les États-Unis d’abord». Il tente de convaincre ses partisans que ces nouveaux droits «libéreront» les travailleurs américains de ce que Trump appelle des «pratiques commerciales déloyales». (Dans un discours, «il a comparé les droits de douane à une déclaration d’indépendance économique établissant des parallèles avec d’autres événements historiques américains».)
Que pouvons-nous en déduire ?
Tout d’abord, que (selon Trump) les États-Unis ont été victimes de traitements abusifs de la part de leurs alliés et de leurs rivaux. Comme l’a dit Trump : «Ils nous arnaquent». C’est l’état d’esprit qui sous-tend la philosophie du «Jour de la libération» de Trump, une philosophie selon laquelle le reste du monde devrait être puni pour la surconsommation génératrice de déficit des États-Unis et son océan de 36 000 milliards de dollars de dettes. C’est la faute de tout le monde, pas la nôtre. Et c’est principalement la faute de la Chine, car elle a ouvert son pays aux entreprises américaines voraces qui ont délocalisé leurs industries pour profiter de la main-d’œuvre bon marché de la Chine. Selon Trump, la Chine devrait également être blâmée pour cela.
Le problème de la politique économique «Les États-Unis d’abord» est que les autres pays vont eux aussi défendre leurs propres intérêts économiques. Ainsi, si quelqu’un comme Trump essaie de supprimer arbitrairement le système actuel de commerce international et d’imposer sa propre version, il va rencontrer une forte opposition. (C’est ce qui s’est produit.)
Malgré cela, l’annonce de Trump a eu un effet désastreux sur le système financier mondial, déclenchant une fuite convulsive des bons du Trésor américain. Cela a incité de nombreux analystes à spéculer sur le fait que la guerre commerciale de Trump allait fondamentalement changer la manière dont le commerce international est mené. Cela a bien sûr déclenché de nouvelles alarmes, faisant grimper l’anxiété des investisseurs à des niveaux records. Le ministre des Affaires étrangères de Singapour, Vivian Balakrishhnan, a résumé la situation ainsi :
«C’est la fin d’une époque. (…) L’architecte, le maître d’œuvre, le concepteur du système d’intégration économique fondé sur des règles a décidé qu’il devait maintenant s’engager dans une démolition à grande échelle du même système qu’il a créé».
Il a raison, n’est-ce pas ? L’ère des marchés intégrés dans un système mondialisé est révolue. Le monde est en train d’être redivisé en blocs rivaux par une administration qui croit que le pays qui emprunte et consomme plus que tout autre pays dans l’histoire de l’humanité est injustement exploité par des travailleurs mal payés à travers la planète. L’idée est risible.

Pour bien comprendre à quel point la théorie sous-jacente de Trump repose sur la conviction que «Ils nous arnaquent», nous avons extrait ce court extrait d’un post d’Arnaud Bertrand commentant un discours du président du Conseil des conseillers économiques de Trump, Steve Miran :
«L’argument principal de Miran est de repositionner le statut de monnaie de réserve mondiale du dollar non pas comme un privilège exorbitant. (…) mais comme un «fardeau» que le reste du monde doit compenser aux États-Unis pour le porter. Comme l’explique Miran, le fait d’avoir le dollar comme monnaie de réserve «a provoqué des distorsions monétaires persistantes et a contribué, avec les barrières commerciales injustes d’autres pays, à des déficits commerciaux insoutenables» qui «ont décimé notre secteur manufacturier».
Donc, il veut renoncer au statut de monnaie de réserve du dollar, c’est ça ? Non. Il veut le beurre et l’argent du beurre. Il affirme que la «domination financière» des États-Unis «ne peut être tenue pour acquise et que l’administration Trump est déterminée à la préserver», mais que cette même domination financière «a un coût» et que «d’autres pays» doivent payer pour cela. (…)
Arrêtons-nous un instant pour réfléchir à la pure folie de cette situation : les États-Unis suggèrent littéralement aux pays d’envoyer des chèques au Trésor américain en guise de tribut pour le «privilège» de maintenir le dollar comme monnaie de réserve mondiale, alors que c’est précisément ce statut de réserve du dollar qui est la pierre angulaire de la puissance américaine». ~ Arnaud Bertrand
WTF ? Donc, Miran pense que la surconsommation et les dépenses déficitaires sont si indispensables au système économique mondial que les autres pays devraient payer les États-Unis pour qu’ils continuent à profiter de leur situation sans vergogne ?
En effet, c’est sa position. Et cette croyance n’est pas non plus limitée à Miran. En fait, c’est la pierre angulaire idéologique sur laquelle repose la philosophie commerciale de Trump. «Nous dépenserons ; vous paierez. Nous prendrons ; vous donnerez. Nous régnerons, vous suivrez». Vous voyez le tableau ?
Oh, et pour ajouter l’insulte à l’injure, nous nous considérons également comme la «victime» dans cette relation. («Ils nous arnaquent».) C’est ahurissant.
L’approche dispersée de Trump en matière de commerce international témoigne de cette arrogance sans bornes. Et cela semble être la force motrice derrière le «Jour de la libération», la croyance immuable que le reste du monde n’existe que pour servir les intérêts des États-Unis. Ai-je tort ?
Non. Il suffit de regarder les marchés. Les investisseurs votent avec leurs pieds. Ils se dirigent vers les sorties. Leur panique est un référendum sur les politiques commerciales de Trump. Il ne s’agit pas d’une «crise financière». Il s’agit d’une «ruée vers les actifs à risque américains induite par les droits de douane» qui est attribuable à un seul homme : Donald Trump. Personne d’autre n’en est la cause.
Le programme économique phare de Trump (les droits de douane réciproques) repose sur l’idée erronée que le reste du monde est censé fonctionner comme le distributeur automatique de billets des États-Unis. Mais les investisseurs ne partagent pas cette conviction ; ils pensent que les droits de douane vont déclencher une vente massive d’actifs financiers américains et faire s’effondrer le marché. Et c’est aussi ce que nous dit l’effondrement du marché des bons du Trésor. Extrait d’un article de Politico :
«La forte vente des titres de la dette publique qui sous-tendent le système financier mondial a poussé le président Donald Trump à suspendre pendant 90 jours ses projets d’imposer des droits de douane punitifs à des dizaines de partenaires commerciaux. (…)
Les investisseurs considèrent souvent les obligations d’État comme un refuge en période de tensions sur les marchés. Or, c’est le contraire qui s’est produit. Les fonds spéculatifs et d’autres investisseurs se sont débarrassés des titres du Trésor alors même que les actions plongeaient, faisant grimper les rendements qui servent de référence à tout, des taux hypothécaires aux prêts aux entreprises.
La pause de 90 jours n’a pas réussi à apaiser les craintes du marché. (…) Si l’incertitude politique continue de perturber les investisseurs obligataires et d’augmenter les coûts d’emprunt, cela exposerait Trump à un cocktail détonnant de taux d’intérêt élevés, d’inflation élevée et de croissance économique lente, voire négative. (…)
Il est difficile de savoir à l’heure actuelle dans quelle mesure la nervosité du marché obligataire est due aux turbulences générales du marché (certains investisseurs vendent des bons du Trésor parce qu’ils ont besoin de liquidités) ou si elle pourrait être le signe de quelque chose de plus inquiétant, comme une perte de confiance dans les actifs américains alors que Trump bouleverse l’ordre économique mondial. (…) Le fait que le dollar et les bons du Trésor s’effondrent alors même que les actions s’effondrent reflète des questions plus larges sur «qui va financer les déficits continus. D’où viendra le capital pour soutenir les agents des États-Unis en général ?»»
La situation est désastreuse, c’est pourquoi Trump a jeté l’éponge et levé les droits de douane sur 90 pays, à l’exception de la Chine. Son plan visant à utiliser les droits de douane comme moyen d’infliger des souffrances à ses partenaires commerciaux a été déjoué par une fuite inattendue de la dette américaine qu’il n’avait pas prévue.
Cet incident témoigne de l‘importance capitale des bons du Trésor américain dans le système mondial. Le marché des bons du Trésor, qui pèse 28 000 milliards de dollars et est le plus fluide et le mieux capitalisé au monde, joue un rôle particulier dans l’économie mondiale. Les rendements des bons à 10 et 2 ans servent de référence pour la tarification d’autres instruments financiers dans le monde, notamment les obligations d’entreprises, les prêts hypothécaires et les prêts. Lorsque les rendements des bons du Trésor augmentent ou diminuent, ils influencent les coûts d’emprunt à l’échelle mondiale. En d’autres termes, les rendements des bons du Trésor américain «donnent le ton des conditions monétaires mondiales», et lorsque le marché devient volatil, comme ce fut le cas après le fiasco des droits de douane de Trump, tout s’effondre.
Il n’est pas exagéré de dire que le marché des bons du Trésor américain est la pierre angulaire sur laquelle repose le capitalisme occidental et que toute fissure apparaissant dans cette fondation est susceptible d’avoir un impact catastrophique sur l’économie mondiale. C’est pourquoi Trump a rapidement cédé et assoupli sa politique envers tous les pays sauf la Chine.
Quant à la Chine, le pays est désormais effectivement soumis à un embargo américain qui a été imposé bon gré mal gré sans l’approbation du Congrès et en claire violation des règles de l’OMC. Voici un bref extrait de Grok :
«L’OMC définit un cadre pour le commerce international (qui prévoit notamment) l’interdiction des barrières commerciales arbitraires ou injustifiables (…) les droits de douane ne peuvent être utilisés pour établir une discrimination injuste entre les partenaires commerciaux. Les droits de douane de Trump enfreignent les règles de l’OMC (…) car ils semblent violer les engagements NPF, de non-discrimination et de consolidation tarifaire sans justification claire au titre des exceptions de l’OMC. (Les droits de douane) ne sont pas non plus suffisamment justifiés au titre des exceptions de sécurité nationale et sont considérés comme discriminatoires et protectionnistes». (Grok)
Il convient également de noter que les pays auxquels Trump a imposé des droits de douane sont invités à s’aligner sur les objectifs de sécurité nationale des États-Unis. C’est une question que les médias n’ont pas abordée en détail, mais l’implication est que l’administration utilise la coercition économique pour rallier une coalition anti-Chine qui se joindra aux États-Unis dans leurs efforts pour sanctionner, isoler et encercler la RPC.
De plus, Trump a invoqué la loi sur les pouvoirs économiques d’urgence internationale (IEEPA) pour justifier ses droits de douane, notamment ceux annoncés dans le cadre de sa politique du «Jour de la libération» et de ses actions antérieures. Selon Grok :
«Une fiche d’information de la Maison-Blanche datée du 2 avril 2025, indique que Trump a déclaré une urgence nationale en raison de «pratiques commerciales et économiques étrangères» créant une menace pour la sécurité nationale et économique des États-Unis, et mentionne l’utilisation de l’IEEPA pour imposer des «droits de douane réactifs» afin de faire face à cette urgence (…)
L’IEEPA, promulguée en 1977, permet au président de déclarer une urgence nationale en réponse à une «menace inhabituelle et extraordinaire» pour la sécurité nationale, la politique étrangère ou l’économie qui trouve son origine en dehors des États-Unis. Une fois déclarée, le président peut bloquer les transactions, réglementer les importations/exportations et prendre d’autres mesures économiques (…)
Conclusion
Oui, Trump a invoqué l’IEEPA pour justifier ses droits de douane, notamment ceux annoncés le 2 avril 2025 à l’occasion de la Journée de la libération, ainsi que les mesures prises précédemment en février 2025. Il a déclaré des urgences nationales en vertu de l’IEEPA pour imposer à la fois le droit de douane de base de 10% sur toutes les importations et les droits de douane réciproques plus élevés, présentant les déficits commerciaux et les questions connexes comme des menaces pour l’économie et la sécurité nationale des États-Unis». (Grok)
Question : Trump a-t-il utilisé l’International Emergency Economic Powers Act (IEEPA) pour éviter d’obtenir l’approbation du Congrès pour sa politique commerciale ?
«Oui, Trump a utilisé la loi sur les pouvoirs économiques d’urgence internationale (IEEPA) pour éviter d’avoir à obtenir l’approbation du Congrès pour ses droits de douane, notamment ceux du Jour de la Libération et les mesures antérieures de 2025. En déclarant des urgences nationales liées aux déficits commerciaux, au trafic de drogue et à la migration, il revendique le pouvoir unilatéral, en vertu de l’IEEPA, d’imposer des droits de douane sans consentement législatif, exploitant ainsi les larges pouvoirs d’urgence de la loi».
Question : le Congrès a-t-il le pouvoir légal de superviser l’imposition de droits de douane ?
«Oui, le Congrès a le droit légal de superviser l’imposition de droits de douane en vertu de la Constitution et de la loi fédérale (article I, section 8), car il détient le pouvoir ultime de réglementer le commerce extérieur et d’imposer des droits. Cependant, l’utilisation par Trump de l’IEEPA pour déclarer des urgences nationales lui permet de contourner temporairement cette surveillance, en s’appuyant sur de larges pouvoirs exécutifs qui ne nécessitent pas l’approbation du Congrès».
Dernière question pour Grok : comment appelle-t-on un dirigeant politique qui usurpe l’autorité constitutionnelle légitime du Congrès et s’arroge tous les pouvoirs de l’État ?
«Un dirigeant politique qui usurpe l’autorité constitutionnelle légitime du Congrès et s’arroge tous les pouvoirs de l’État est le plus souvent qualifié d’autocrate, de dictateur ou de tyran dans les cas extrêmes (…) Pour Trump en particulier, les étiquettes dépendent du point de vue : les critiques considèrent son utilisation de l’IEEPA comme autoritaire, tandis que ses partisans y voient un leadership audacieux».
Je blâme le Congrès autant que Trump, mais, quel que soit le point de vue, nous sommes en terrain inconnu.
source : The Unz Review