Est-ce vraiment Donald Trump qui «dirige le monde» ?


par Philip Giraldi

Ou ne contrôle-t-il que la Maison-Blanche ?

Le président américain, Donald J. Trump, qui affirme avec une certaine arrogance diriger à la fois le pays et le monde, a créé une plateforme politique appelée «MAGA» [Make America Great Again]. Il a utilisé cet instrument pour remporter la victoire électorale, promettant d’améliorer la vie des Américains, de réformer la bureaucratie fédérale et de débarrasser le pays des immigrants illégaux et des criminels. Il s’est également concentré sur le gaspillage, dans tous les sens du terme, résultant de ce qu’il qualifie de «guerres de Biden», en référence aux conflits en Asie et en Europe qu’il estimait inutiles.

Le slogan «Make America Great Again» a été un outil de marketing efficace, mais les électeurs auraient mieux fait de prendre en compte les réalisations de Trump durant son premier mandat présidentiel. En matière de politique étrangère, et plus particulièrement de guerre, il a imprudemment retiré les États-Unis du Plan d’action global conjoint (JCPOA), un accord négocié par le président Barack Obama qui supervisait et inspectait le programme nucléaire présumé de l’Iran. En 2019, il a également annulé la participation des États-Unis au Traité sur les forces nucléaires à portée intermédiaire avec la Russie, déclenchant une course à l’armement nucléaire en Europe et amenant les scientifiques à rapprocher l’horloge nucléaire de minuit, suggérant ainsi que le moindre faux pas pourrait avoir des conséquences dévastatrices, voire l’anéantissement nucléaire. Il a également fait assassiner de manière irresponsable le général iranien Qassem Soleimani, alors en mission de paix à Bagdad en Irak en 2020, et a bombardé à deux reprises des cibles syriennes avec des missiles de croisière sur la base d’informations fallacieuses fournies par les néoconservateurs.

Plus récemment, il a bombardé l’Iran pour soutenir Israël, a contribué au renversement du gouvernement syrien et a soutenu des guerres illégitimes en Ukraine et à Gaza. On peut donc clairement affirmer que Donald Trump n’est pas franchement un homme de paix, et que sa vision de la politique internationale et de la diplomatie est des plus limitées. C’est aussi un homme qui croit que «dans le doute, il faut bombarder !». Il a récemment élaboré et cité des scénarios de guerre nucléaire avec la Russie, très probablement pour empêcher la publication de documents relatifs à l’affaire Epstein qui pourraient contenir des informations potentiellement dévastatrices sur le président.

Il a publié un message sur les réseaux sociaux intitulé «Vérité», tellement sérieux qu’il était truffé d’erreurs grammaticales, orthographiques et syntaxiques, suggérant ainsi qu’il en était bien l’auteur. Il y annonçait avoir positionné deux sous-marins nucléaires près de la Russie, car il a été contrarié par les piques de l’ancien président russe Dmitri Medvedev sur Twitter. Preuve que même un ex-insoumis pseudo-guerrier devenu président peut s’émouvoir d’un commentaire désobligeant sur Twitter au point de vouloir anéantir le monde. Et lorsque la poussière radioactive sera retombée, Trump sera assuré de remporter le prix Nobel de la paix, dont il a déclaré la semaine dernière qu’il l’a déjà pleinement mérité au moins quatre ou cinq fois grâce à son étonnant sens du pacifisme.

Sans oublier la question des relations entre les États-Unis et Israël, où Trump et son prédécesseur ont clairement été les marionnettes du Premier ministre Benjamin Netanyahou, qui a maintenant décidé qu’Israël allait occuper toute la bande de Gaza – sans les Gazaouis – ignorant certaines des propositions de Trump. Trump est véritablement lié pieds et poings à Israël, et quiconque le nie est soit naïf, soit bien pire. Un de mes amis a récemment rédigé une lettre destinée à la Maison-Blanche pour protester contre le soutien américain aux crimes de guerre commis à Gaza. Le bureau d’information de la Maison-Blanche lui a répondu par un courrier, apparemment signé par Trump, dans lequel il est notamment écrit :

«Quand j’ai été élu président, j’ai clairement indiqué que l’Amérique soutiendrait fermement Israël… Pour assurer la sécurité de notre pays, j’ai imposé des restrictions de visa aux ressortissants étrangers, y compris aux étudiants, s’ils ont des liens avec des organisations terroristes. Je suis fermement déterminé à expulser les radicaux pro-Hamas et à restaurer la sécurité et le patriotisme sur nos campus universitaires. Ces mesures reflètent un engagement clair et inébranlable en faveur d’une politique étrangère de paix par la force. Sous ma direction, les États-Unis s’opposent une fois encore avec détermination au terrorisme et restent solidaires de leurs alliés. L’État d’Israël incarne la persévérance et le triomphe de l’humanité, et je soutiendrai toujours son droit à mener sa guerre contre le terrorisme».

Il n’est donc question que d’Israël, sans aucune mention des intérêts réels des États-Unis. Or, comme Israël est la principale source mondiale du terrorisme international, allant jusqu’à planifier le génocide de deux millions de Gazaouis, la réponse de Trump semble quelque peu hypocrite. D’autant que les États-Unis sont complices de crimes de guerre et n’ont rien fait pour mettre fin aux combats à Gaza ou en Ukraine. Pourtant, il pourrait y mettre fin d’un simple coup de fil à Volodymyr Zelensky et à Netanyahou, en coupant tout soutien à l’une ou l’autre de ces initiatives, voire aux deux. Les États-Unis pourraient également admettre que les arguments avancés par le président russe Vladimir Poutine concernant l’Ukraine et l’OTAN, et que les atrocités commises par Israël à Gaza sont de véritables crimes de guerre constituant un génocide, sont également fondés. La récente inspection des conditions «humanitaires» à Gaza par l’ambassadeur américain Mike Huckabee et le négociateur en chef Steve Witkoff valait le détour. L’événement, mis en scène par l’armée israélienne, mettait en vedette plusieurs Arabes présentés comme des «Gazaouis» décrivant avec complaisance à quel point ils sont terrifiés par leurs propres dirigeants du Hamas, et éperdument reconnaissants envers les Israéliens. Huckabee et Witkoff n’ont bien entendu détecté ni famine ni massacre de Palestiniens par leurs hôtes israéliens.

Au même moment, 20 membres du Congrès républicains, membres de l’AIPAC et emmenés par le président de la Chambre Mike Johnson, ont sillonné Israël, y compris la Cisjordanie, territoire autrefois considéré comme le futur État palestinien, et aujourd’hui envahi par des colons israéliens soutenus par des soldats adeptes d’exécutions sommaires de Palestiniens. Ces ordures du Parti républicain, en grande partie des sionistes chrétiens, ont délibérément inclus dans leur itinéraire un village palestinien dont les habitants ont été chassés et envahi par des colons et leur progéniture. Il s’agissait de la première visite d’une délégation du gouvernement américain validant ainsi ouvertement de telles pratiques. Une délégation de membres du Congrès démocrates se prépare entre-temps à débarquer en Israël pour témoigner de leur loyauté totale dès que les républicains seront partis. Cela se produit systématiquement à chaque congé parlementaire.

Ce fut une semaine riche en plaisirs et excitations, mais un événement se démarque de tous les autres. Mercredi, Kristi Noem, la secrétaire du département de la Sécurité intérieure que je surnomme la «tueuse de chiens», a annoncé l’instauration de nouvelles conditions de décaissement des 1,9 milliard de dollars de fonds de l’Agence fédérale de gestion des urgences (FEMA) autorisés par le Congrès dans le prochain «gros et beau budget» américain. N’oublions pas que cet argent provient des contribuables et est destiné à soulager les souffrances des Américains touchés par des catastrophes naturelles. L’administration Trump a désormais déclaré que les États et les villes ne percevront pas de fonds de la FEMA s’ils devaient décider de boycotter ou de mettre fin à toute relation commerciale avec des entreprises ou des particuliers israéliens. Les États et municipalités doivent désormais certifier qu’ils ne se livreront pas à un «boycott discriminatoire interdit», à savoir le refus de commercer, la rupture de relations commerciales ou toute autre limitation des relations commerciales avec des entreprises israéliennes, des entreprises faisant des affaires en Israël ou avec Israël, ou des entreprises autorisées, agréées ou organisées en vertu des lois d’Israël pour faire affaire avec l’État hébreu.

La condition imposée pour l’octroi de ces fonds cible le mouvement international de boycott, désinvestissement et sanctions (BDS), qui appelle à un boycott mondial de l’État d’Israël pour protester contre l’occupation de la Palestine et le génocide perpétré par l’armée israélienne dans la bande de Gaza. Face à la réaction hostile des électeurs, le département de la Sécurité intérieure (DHS) a déclaré son intention d’appliquer le boycott concernant Israël, «même en l’absence de quelque exigence que ce soit liée à Israël dans les avis de financement actuels de la FEMA. À ce jour, aucun État n’a perdu de financement et ne s’est vu imposer de nouvelles conditions».

Le DHS a écrit de manière quelque peu évasive sur X :

«Les subventions de la FEMA restent régies par la législation et la politique en vigueur, et non par des considérations politiques. Le DHS appliquera toutes les lois et politiques anti-discrimination, y compris celles relatives au mouvement BDS, expressément fondé sur l’antisémitisme. Ceux qui se livrent à la discrimination raciale ne méritent pas un seul dollar de financement fédéral».

En résumé, l’administration Trump estime que les Juifs sont toujours des victimes, même lorsqu’ils tuent des milliers de bébés d’un an. Qu’il s’agisse donc d’une entreprise ou d’une entité politique, il est désormais interdit de prendre une mesure commerciale ou d’investissement motivée par des considérations morales. De même, un dirigeant politique disposant d’un pouvoir exécutif ne peut exercer sa liberté d’expression ou prendre des décisions fondées sur les agissements d’un pays étranger, ni sur de telles perceptions quand il s’agit d’Israël.

Être un contribuable américain qui paie des impôts pour aider ses concitoyens est sans importance si Israël est impliqué. La faveur particulière accordée à Israël est d’ailleurs unique. Aucun autre pays ne bénéficie d’un statut aussi privilégié auprès du gouvernement américain actuel. Au-delà de cette décision fédérale, la pression qui pèse sur le mouvement BDS est considérable, des lois étant déjà en vigueur dans plusieurs États. Cette pression émane de groupes qui, collectivement, constituent le lobby israélien/juif [AIPAC] et œuvrent depuis de nombreuses années à favoriser Israël de toutes les manières possibles et imaginables. Au moins 36 États américains ont adopté des lois interdisant ou refusant des avantages et des emplois aux citoyens encourageant le boycott d’Israël sous quelque forme que ce soit. Dans certains États, les demandeurs d’emploi ou d’aide sociale doivent signer un document juridique dans lequel ils s’engagent à ne pas appeler au boycott, au désinvestissement ou à des sanctions à l’encontre d’Israël ou des Israéliens.

Les Américains feraient bien de se demander si favoriser un pays étranger sous couvert de corruption et de manipulation est ou non une trahison. C’est pourtant indéniablement le cas, et nos dirigeants et décideurs, qui se sont tant décarcassés pour promouvoir Israël au détriment des États-Unis, pourraient bien devoir bientôt payer le prix fort de leurs manœuvres, car le vent est indubitablement en train de tourner. Quelqu’un devrait faire part de l’information à Donald Trump et à ses complices.

source : The Unz Review via Spirit of Free Speech



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