Les préfets servent-ils toujours la République ?, par Philippe Baqué (Le Monde diplomatique, septembre 2025)


Fermeture des services à la population, répression des manifestations, décisions arbitraires

Pour bien des manifestants, la figure du préfet évoque la répression qu’ils subissent dans la rue — alors même que la fonction est censée garantir l’intérêt général et l’égalité de tous devant la loi, au nom de la République. À mesure que les réformes affaiblissent l’institution préfectorale, ou la politisent, ses missions s’éloignent des préoccupations de la population.

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Pejac. — « Triptyque », 2016

pejac.es

«Des manquements graves et persistants des services. » En février 2024, un collectif d’associations écrivait au préfet d’Indre-et-Loire pour lui reprocher la mise au rebut sans justification de plus de cinq cents demandes de titre de séjour au cours des dix-huit mois précédents. De son côté, la préfecture niait toute « pratique administrative abusive envers les usagers étrangers ». Dans un communiqué daté d’avril, elle plaidait un simple allongement des délais de traitement. Pourtant, à Tours comme ailleurs, la maltraitance des étrangers s’institutionnalise. Par la volonté politique de limiter l’immigration, mais également à la suite d’importantes restructurations qui dégradent l’exercice de l’État.

Longtemps, des files d’individus contraints d’attendre dans la nuit l’ouverture matinale des guichets ont symbolisé l’encombrement des services destinés aux immigrés. Depuis 2021, la dématérialisation des procédures doit les décharger. Le portail de l’administration numérique pour les étrangers en France (ANEF) a vocation à traiter leurs demandes. Mais, en pratique, les dysfonctionnements se multiplient. « Modules de prise de rendez-vous en ligne saturés (…), téléservices mis en place hors de tout cadre légal et réglementaire, déploiement de l’ANEF assorti de nombreux bugs… » : en juin 2024, un rapport de la défenseure des droits dénonçait une inégalité d’accès aux services publics et recommandait d’accroître les effectifs des préfectures les moins diligentes.

Au sein de cette administration territoriale, seuls les services des étrangers restent ouverts au public. Le plan « Préfecture nouvelle génération » (PPNG) de 2016 a dématérialisé puis externalisé la délivrance des titres d’identité et des cartes grises. Désormais, les particuliers doivent accomplir toutes les démarches sur des plates-formes. Des conseillers des espaces France services, ouverts dans les mairies — voire des sociétés privées contre rétribution —, peuvent les accompagner. Mais « le service de proximité que (…)

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