Morandini, le champion du buzz sélectif ? Désinformation Covid et réintégrations YouTube, version biaisée


Jean-Marc Morandini, l’animateur de CNews, spécialiste de la machine à clics et à la pollution informationnelle, frappe de nouveau. Le 24 septembre dernier, il poste sur X le tweet partisan suivant :

 « YouTube s’apprête à réintégrer des créateurs jusqu’ici bannis de la plateforme pour avoir diffusé des informations erronées sur le Covid-19 et les élections américaines », 

suivi d’un lien vers son article éponyme sur jeanmarc-morandini.com. Avec en guise d’effet boomerang, un tollé dans les commentaires, où les abonnés zélés hurlent au scandale : « Erronées ? Non, c’était la vérité censurée par Biden ! » Ou encore : « Des infos fiables mais pas dans le narratif officiel. » 

Bravo, Morandini, vous avez réussi à transformer une lettre anodine d’Alphabet 
en grenade dégoupillée qui risque de se retourner contre vous.

Disséquons ce mirage d’article journalistique. Au cœur de cette affaire, une lettre de cinq pages envoyée le 23 septembre par les avocats d’Alphabet (maison-mère de YouTube) au républicain Jim Jordan, président de la Commission judiciaire de la Chambre des représentants. Ce document répond à des assignations du Congrès et défend farouchement la liberté d’expression de la plateforme. YouTube y annonce effectivement une réintégration possible de créateurs bannis pour « violations répétées des politiques relatives à la COVID-19 et à l’intégrité des élections qui ne sont plus en vigueur ». Point final. Pas un mot sur des « informations erronées ». Au contraire : la lettre insiste sur l’évolution des règles pour « autoriser un large éventail de contenus concernant la COVID-19 et les élections », et sur le fait que YouTube n’a « jamais eu de règles communautaires interdisant les discussions sur les origines de la pandémie ». C’est une question de cohérence politique, pas un mea culpa sur de la désinfo.

Lettre de l'avocat de Google
Lettre de l’avocat de Google (traduction en français France-Soir)

 

Morandini, lui, tord les aveux de Google comme un pro de l’infofiction. Il y voit une « victoire pour les alliés conservateurs de Donald Trump », accusant les « vérificateurs d’informations professionnels » d’un « parti pris de gauche ». Il cite même des noms : Dan Bongino (ex-FBI), Sebastian Gorka (antiterrorisme à la Maison Blanche sous Trump) ou Steve Bannon, bannis pour leurs positions tranchées. Pour enfoncer le clou, il accuse l’administration Biden d’avoir « fait pression » sur YouTube pour censurer – un écho fidèle à la lettre, mais déformé pour alimenter le narratif victimaire de la droite. Résultat : 16 000 vues, 137 likes, et un festival de réponses qui amplifient le narratif victimaire. C’est du Morandini pur jus : un demi-vrai emballé dans une fausse vérité, pour faire buzzer et diviser. Il exploite fort bien les biais cognitifs, comme le biais de confirmation : il sélectionne et reformule les faits pour conforter les convictions préexistantes de son audience, transformant une nuance en triomphe absolu. C’est du journalisme sur mesure, où la réalité est taillée pour déclencher le buzz, au risque de semer plus de confusion que de clarté.

Et ce n’est pas anodin, de sa part. En mars 2025, la cour d’appel de Paris l’a condamné à deux ans de prison avec sursis pour « corruption de mineurs », dans l’affaire des castings pour son projet de série « No Limit ». Des jeunes comédiens, âgés de 15 à 18 ans, accusaient Morandini de leur avoir demandé des actes sexuels explicites – photos de fesses nues, masturbation filmée – sous prétexte de « préparation au rôle ». En première instance, en décembre 2022, il avait écopé d’un an avec sursis, mais l’appel a alourdi la peine, confirmant les faits de corruption sur mineurs. Plus tôt, en 2016, il avait été mis en examen pour les mêmes raisons, avec interdiction de contact avec des mineurs. 

Jean-Marc Morandini le 24 octobre 2022 ©AFP - Alain JOCARD
Corruption de mineur Jean-Marc Morandini condamné – photo AFP

 

Et en 2023, un autre procès pour harcèlement sexuel sur un jeune comédien, avec six mois avec sursis requis. Morandini serait-il un prédateur en costard, qui joue les victimes d’une « cabale journalistique » devant les juges, tout en harcelant ses proies vulnérables ?

Cette affaire Morandini-YouTube ne serait pas un accident : cela semble être un schéma récurrent. L’homme qui a bâti sa carrière sur le sensationnalisme – des people trashés aux rumeurs people – excelle à exploiter les failles pour semer le doute. Ici, il transforme une mesure de bonne gouvernance (évoluer les politiques pour plus de liberté d’expression) en triomphe complotiste, flattant son public conservateur tout en ignorant que YouTube n’a pas de « programme de vérification des faits » rémunéré, contrairement à ce qu’il insinue. Pire : en qualifiant les contenus bannis d’ « erronés », il valide implicitement les thèses anti-vax et électorales frauduleuses, alors que la lettre célèbre justement la « diversité des points de vue » sans les valider.

Morandini serait-il au journalisme ce que Macron est à la politique ? Un artisan du chaos, (71% des Français pensent que Macron est un mauvais président et 74% qu’il divise le pays), calculé, qui miserait sur la polarisation pour dominer le terrain. Ainsi peut-on dire que Morandini n’est pas un journaliste ? Ou qu’il serait plutôt un pollueur de l’info qui monétise le sensationnalisme et la confusion en privilégiant l’émotion au factuel ?

Avec son passif judiciaire auprès de jeunes vulnérables, on se demande : qui manipule qui ? YouTube réintègre des créateurs ? Tant mieux, pour un débat sain, c’est une étape vers plus de pluralisme. Mais, chez Morandini, ce serait le carburant d’un nouveau cycle de clics toxiques.

À quand un sursaut pour un journalisme qui éclaire, plutôt que d’attiser les ombres ? 

Un spécialiste des médias indépendants déclare : « À quand une plateforme qui le bannirait pour « violations répétées de l’éthique » ? » Ce jour-là, nombreux sont ceux qui applaudiront des deux mains.





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