« Faut vous bouger, les gars ! », par Seth Harp (Le Monde diplomatique, novembre 2025)


L’armée américaine en petite forme

Le 30 septembre dernier, le ministre de la défense américain — désormais rebaptisé ministre de la guerre — a prêché devant plusieurs centaines d’officiers supérieurs l’urgence d’une révolution culturelle contre le présumé laxisme régnant dans les rangs : diversité, obésité, manque d’entraînement. Un défilé raté à Washington, quelques semaines plus tôt, aurait-il provoqué sa colère ?

Inspiré par ce qu’il avait vu un 14 juillet à Paris, ou peut-être jaloux des parades militaires impeccables de Moscou et de Pékin, le président Donald Trump a souhaité qu’aux États-Unis aussi les forces armées affichent leur puissance devant leur commandant en chef, c’est-à-dire lui-même. Le 14 juin dernier, un grand défilé à Washington célébra ainsi le 250e anniversaire de la création de l’US Army, et celui de M. Trump. Mais le spectacle ne fut pas toujours à la hauteur de ses espérances.

Au matin, les touristes étrangers sont apparemment plus nombreux que les supporteurs MAGA (« Make America Great Again »), ce qui rappelle que M. Trump ne jouit pas d’une immense popularité. Toute une journée de festivités se déroule sur l’esplanade du National Mall en attendant la parade. Sur l’une des pelouses, un concours d’aptitude physique oppose dix-huit équipes de militaires le long d’un parcours semé d’épreuves et d’obstacles. La remise des prix est coanimée par le sergent-major Michael Weimer, un ancien des forces Delta qui a lui-même pris part au challenge avec quatre autres quinquagénaires haut gradés. « On a fini neuvièmes, ce n’est pas normal ! Faut vous bouger, les gars ! », ironise-t-il à l’adresse des participants plus jeunes, un peu rondouillards, qui, assis dans le public, dégoulinent de sueur et peinent à reprendre leur souffle. La mauvaise condition physique de la jeunesse américaine complique les recrutements de l’armée depuis plusieurs années.

Un peu plus loin, des soldats du 3e régiment d’infanterie — une unité d’apparat aussi appelée « Vieille Garde » — font virevolter fusils et baïonnettes sous les applaudissements (mollassons) d’un petit groupe de touristes asiatiques, d’anciens combattants et de fans du président. Une démonstration fasciste, ça ? Loin de la mise en scène autoritaire annoncée par la gauche, l’événement donne plutôt à voir un spectacle de lassitude et d’apathie politiques. Au lieu de glorifier la puissance de feu des forces armées, il expose sans le vouloir leur (…)

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Seth Harp

Journaliste, auteur de The Fort Bragg Cartel : Drug Trafficking and Murder in the Special Forces (Viking Press, New York, 2025). Une version plus longue de ce texte a paru dans Harper’s, New York, octobre 2025.



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