Rebondissement en Italie dans l’affaire du sabotage de Nord Stream. Deux semaines après une décision opposée, une cour d’appel a approuvé l’extradition du suspect ukrainien, accusé d’être responsable de l’explosion du gazoduc en 2022, vers l’Allemagne. La décision vient également deux semaines après celle d’un tribunal polonais de ne pas satisfaire la requête de Berlin.
Fin septembre 2022, quatre explosions sous-marines détruisent gravement les gazoducs Nord Stream 1 et 2 en mer Baltique. Les relevés sismiques danois et suédois confirment rapidement que la nature des explosions est bien artificielle et volontaire, menant à la qualification immédiate d’acte de sabotage par les gouvernements concernés.
La Cour de cassation s’oppose
À la suite de ces explosions, plusieurs capitales européennes réagissent promptement en condamnant l’incident, et lancent des enquêtes nationales. L’Allemagne, la Suède et le Danemark ouvrent chacune des investigations distinctes. En janvier et février 2024, la Suède et le Danemark annoncent tour à tour la clôture de leurs enquêtes, invoquant l’absence de preuves formelles pour désigner un auteur ou engager des poursuites judiciaires. Seule Berlin, malgré la pression internationale, décide de poursuivre ses investigations pour faire la lumière sur ce sabotage.
L’enquête menée par les autorités allemandes aurait permis d’identifier une cellule composée de plusieurs personnes originaires d’Ukraine. Après plusieurs mois, un suspect ukrainien, Volodymyr Z., a été interpellé par les autorités polonaises le 30 septembre 2025 dans la banlieue de Varsovie, en exécution d’un mandat d’arrêt européen émis par l’Allemagne. L’homme, moniteur de plongée de formation, est soupçonné d’avoir participé au sabotage du gazoduc Nord Stream.
Son arrestation intervient après celle, en août 2025, d’un autre suspect ukrainien, Serhii Kuznietsov, en Italie. Ce dernier, pressenti comme coordinateur logistique du commando, avait également fait l’objet d’un mandat d’arrêt européen émis par la justice allemande. Il est arrêté en août, lorsqu’il était en vacances avec sa famille sur la côte adriatique. Depuis, il est derrière les barreaux dans une prison de haute sécurité en Italie et risque, en Allemagne, jusqu’à quinze ans de prison.
La plus haute cour judiciaire italienne avait toutefois bloqué, le 15 octobre dernier, son extradition. La cour a jugé que les faits qui lui sont reprochés, qualifiés de “sabotage” par les autorités allemandes, ne pouvaient pas être considérés comme un “acte de terrorisme”. Son avocat a d’ailleurs insisté dans sa défense sur le statut de militaire de son client, soulignant que le gazoduc « une cible militaire légitime » en raison de la guerre que mène la Russie en Ukraine.
Le suspect se pourvoit en cassation
Lundi dernier, la cour d’appel de Bologne valide l’extradition du suspect ukrainien vers l’Allemagne, toujours selon Nicola Canestrini, l’avocat de Serhii Kuznietsov. Ce dernier a déjà fait part de son intention de contester cette décision en se pourvoyant en cassation.
Il continue de nier avoir opéré ou participé à cet acte de sabotage et assure qu’il était présent en Ukraine au moment des faits qui lui sont reprochés
Son avocat met également en avant l’immunité reconnue par un tribunal polonais pour un autre suspect ukrainien dans la même affaire et demande que le tribunal italien prenne la même décision.
Le tribunal de district de Varsovie a refusé d’extrader le citoyen ukrainien Volodymyr Z. En annonçant sa décision, le juge a également ordonné la libération immédiate du suspect, précisant que la procédure visait uniquement à vérifier si le mandat d’arrêt européen pouvait être légalement exécuté sur le territoire polonais, et non à juger sur la culpabilité du suspect.
La principale raison du refus tient au fait que la partie allemande n’aurait fourni que des informations très générales, sans preuve concrète selon le tribunal polonais. De plus, cette décision s’inscrit dans le contexte diplomatique tendu et d’une appréciation politique du sabotage, considéré à Varsovie comme une opération “nuisible à la machine de guerre russe”. Le Premier ministre polonais Donald Tusk a exprimé sa satisfaction sur cette décision, estimant que l’affaire était close à ce stade.