En mai 2024, l’ONG Seastemik, avec Data for Good et Le Monde, publiait un rapport qui lève le voile sur les ravages d’un secteur dominé par une poignée de géants : l’élevage intensif de saumons. La Norvège, le Chili, le Canada et l’Écosse assurent 96 % de la production mondiale et vident les mers pour ce faire.
Depuis 2021, la consommation de saumon a bondi. Parmi les plus gros consommateurs, et importateurs, on retrouve les Etats-Unis, la Russie et le Japon. La France est championne d’Europe sur le sujet, important 99 % de sa consommation. Tout cela a un coût.
« Pour élever un seul saumon, il faut pêcher jusqu’à 440 poissons sauvages », rappelle Seastemik. Les populations côtières d’Afrique de l’Ouest voient leurs ressources disparaître au profit des fermes aquacoles du Nord. Le rapport détaille que « la Norvège pêche ou importe chaque année 2 millions de tonnes de poissons sauvages, dont 123 000 à 144 000 tonnes depuis les eaux d’Afrique de l’Ouest ». Une quantité qui permettrait de nourrir plusieurs millions de personnes sur place.
Cette logique productiviste n’épargne ni les écosystèmes ni les consommateurs. Évasions massives de poissons modifiés, propagation de parasites, usage massif d’antibiotiques au Chili — plus de 460 tonnes en 2021 —, et omniprésence des microplastiques : autant d’alertes qui fissurent l’image (parfois) saine du saumon d’élevage. Seastemik souligne également la souffrance animale, avec des taux de mortalité dépassant parfois 20 %, conséquence directe de la densité des bassins et du stress permanent.
Les projets de fermes terrestres, présentés comme des solutions, s’annoncent aussi énergivores que polluants. En réalité, conclut l’ONG, seul un virage vers une aquaculture durable — algues, coquillages, végétalisation des assiettes — pourrait réconcilier appétit, justice sociale et respect du vivant.