Une affaire qui secoue Bruxelles, encore une…
Didier Reynders, ancien commissaire européen à la Justice et figure de premier plan de la politique belge, a été officiellement inculpé pour blanchiment d’argent. Celui qui, ironiquement, supervisait la politique européenne de lutte contre le blanchiment, se retrouve désormais au cœur d’une tempête visant ses propres finances personnelles. Une véritable « Cahuzac » mais cette fois-ci à l’échelle européenne. Qui est pris qui croyait prendre !
Les premières perquisitions ont eu lieu en décembre 2024, à son domicile d’Uccle ainsi que dans sa résidence en province de Liège. Selon plusieurs sources concordantes, notamment Le Monde, ou RTL Belgique, les enquêteurs s’intéressent à des dépôts en espèces d’un montant cumulé d’environ 700 000 euros, effectués sur ses comptes personnels entre 2008 et 2018. Ces mouvements de fonds, jugés incompatibles avec ses revenus officiels, auraient éveillé les soupçons de la Cellule de traitement des informations financières (CTIF).
Mais c’est surtout le mécanisme supposé de blanchiment qui intrigue. L’ancien ministre belge aurait utilisé des billets de loterie électroniques, les « e-tickets » de la Loterie nationale, pour légitimer des sommes d’argent d’origine indéterminée. Concrètement, Reynders ou son entourage auraient acheté en liquide d’importantes quantités de ces e-tickets — parfois plusieurs milliers d’euros à la fois — dans divers points de vente en Belgique. Ces billets, une fois joués, permettaient de générer des gains déclarés comme issus de la chance, puis transférés sur un compte joueur officiel avant d’être déposés sur son compte bancaire. Ce système aurait servi à donner une apparence légale à des fonds d’origine opaque, pour un montant estimé à environ 200 000 euros.
Une vendeuse interrogée par Le Monde affirme que « M. Reynders venait régulièrement acheter pour deux à trois mille euros de tickets », une pratique inhabituelle pour un particulier. Interrogé, l’ancien commissaire européen assure pour sa part que tout est en ordre et que l’argent utilisé provenait de son patrimoine privé, évoquant la vente d’œuvres d’art et d’antiquités. À ce jour, aucun document public n’a encore confirmé l’origine de ces fonds.
Cette affaire revêt un caractère hautement sensible. En tant que commissaire à la Justice, Didier Reynders était responsable de la coordination européenne en matière de transparence financière et de lutte contre le blanchiment. L’ironie de voir le principal architecte des politiques anti-fraude lui-même visé par une inculpation pour blanchiment n’échappe à personne à Bruxelles.
La Loterie nationale belge, de son côté, aurait joué un rôle central dans la détection des anomalies. Ce sont ses propres systèmes de contrôle internes qui auraient signalé des opérations jugées « très inhabituelles ». Les enquêteurs cherchent désormais à retracer l’origine exacte des espèces utilisées pour acheter ces billets de loterie.
Didier Reynders rejette catégoriquement les accusations et affirme qu’il démontrera le caractère parfaitement légal de son patrimoine. Mais la question demeure : avec quel argent a-t-il joué pour « gagner » les 200 000 euros de gains qu’il revendique ? Tant que cette origine n’aura pas été prouvée, le doute planera sur celui qui incarnait, il y a encore peu, la rigueur financière et la probité bien connue au sein de la Commission européenne.
Les prochaines semaines seront décisives : le juge d’instruction chargé du dossier doit entendre plusieurs témoins et analyser les flux financiers suspectés. Une mise en accusation formelle devant la justice belge pourrait suivre d’ici la fin de l’année.
Avis aux divers pressing du Parlement…