Après avoir, chassé les jeunes sur TikTok à grand coup de comm, utilisé toutes les techniques de marketing pour les toucher sur les réseaux, le « En même temps » du Palais fait encore fureur. Alors on va interdire aux lycéens d’utiliser leur téléphone portable même pendant l’intercours… C’est un souhait d’Emmanuel Macron !
Cela soulève tout de même des problèmes financiers et de mise en œuvre très pratiques selon plusieurs syndicats et chefs d’établissements, qui soulignent la difficulté de faire respecter la mesure au collège.
Mais « quoi qu’il en coute » à partir de la rentrée prochaine, on veut faire +plus de portables au lycée+ », a déclaré le chef de l’État lors d’un échange avec les lecteurs des journaux régionaux de l’Est de la France du groupe Ebra à Mirecourt, dans les Vosges.
« On l’avait fait dans les collèges de manière expérimentale, on l’a généralisé en septembre dernier » et cela fonctionne « plutôt bien », a-t-il soutenu, déconnecté comme d’habitude du terrain.
Le téléphone est déjà interdit de la maternelle au collège par une loi de 2018, mais celle-ci peine parfois à être respectée. Le dispositif « portable en pause », expérimenté en 2024-2025 et officiellement généralisé depuis septembre, vise à renforcer son application en contraignant les élèves à le laisser dans des casiers, mallettes ou pochettes si nécessaire.
Emmanuel Macron « veut généraliser un dispositif qui n’existe pas ou qui a été un échec », affirme Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU (collèges et lycées), rappelant les contraintes financières des établissements. « Il passe à côté de l’enjeu essentiel, celui de la prévention, de l’information, de la régulation de tous les outils numériques ».
Seuls deux conseils départementaux, sur 101, ont financé le dispositif « portable en pause » dans l’ensemble de leurs collèges et une dizaine d’autres pour un ou deux collèges de leurs territoires, selon l’association d’élus Départements de France, qui pointe le coût de la mesure.
Interrogé par l’AFP, le ministère de l’Éducation nationale n’était pas en mesure de fournir une proportion sur les 5 300 collèges publics du pays, c’est quand même navrant.
« Dans beaucoup de collèges, on fait en sorte que les élèves n’utilisent pas leur téléphones pendant les cours, mais hors cours, on n’a pas la capacité de mettre des boites où ils les posent et les reprennent, avec le risque de créer des attroupements de 500 élèves au même endroit, les élèves peuvent dire qu’il n’en ont pas, on n’a pas envie de les fouiller », raconte Jean-Rémi Girard, président du syndicat d’enseignants Snalc.
« La loi se suffisait », estime Bruno Bobkiewicz, proviseur et secrétaire général du syndicat SNPDEN Unsa. « Ça nous arrive d’en confisquer, mais c’est pas le sujet principal de préoccupation dans nos collèges ».
L’interdiction du téléphone portable en cours existe déjà au lycée, conformément aux règlements intérieurs des établissements. Pour l’élargir aux temps de pause (cours de récréation, couloirs), il faudrait une loi ou un vote en conseil d’administration de chaque établissement, selon lui.
Si les directions des quelque 1 600 lycées, qui accueillent des élèves parfois majeurs, devaient récupérer les téléphones, « ce serait du délire », dit-il. « Je ne vais pas mettre 1 200 casiers à l’entrée ».
« Je pense que ce serait une bonne idée pour qu’on perde peut-être moins de temps sur notre téléphone, interdire peut-être juste les réseaux sociaux et pas forcément interdire le fait d’utiliser le téléphone », a témoigné auprès de l’AFPTV Kezia, 17 ans, élève de première au lycée Claude Gellée à Épinal.
« Au lycée, on peut commencer à apprendre à respecter les règles et à savoir utiliser son téléphone comme il le faut », estime Louwann, 17 ans.
Selon le ministère, élargir l’interdiction au lycée naît de la « nécessité de lutter contre la consommation croissante d’écrans » chez les adolescents, qui pose des problèmes d’apprentissage, de socialisation et de santé publique ».
Si les représentants syndicaux interrogés – qui déplorent tous ne pas avoir été consultés avant cette annonce – ne remettent pas en cause les effets néfastes d’une utilisation excessive du smartphone chez les adolescents, ils voient un problème sociétal plus large, qui nécessite une régulation en dehors de l’établissement.
« Il faut convaincre, faire réfléchir, pour faire évaluer les comportements », juge Agnès Andersen, secrétaire générale du syndicat de chefs d’établissement ID-FO, selon qui « annoncer cela maintenant donne vraiment l’impression qu’on cherche à détourner l’attention du vrai sujet : le budget de l’Éducation nationale ».
Ne chercherait-on pas tout simplement à habituer, dès le plus jeune âge, à la contrainte ? Ou est-ce tout simplement une nouvelle envie « d’emmerder » d’autres citoyens dès l’adolescence ?